Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
10:06:45
Chères et chers collègues,
Bonjour.
La séance est ouverte.
Je rappelle aux membres qu'ils doivent insérer leur badge avant de prendre la parole. Lorsque vous commencez votre discours, veuillez appuyer une seule fois sur le bouton « request » du microphone.
L'ordre du jour appelle l'examen d'une proposition de modification de la composition de la commission sur l'égalité et la non-discrimination. Cette proposition figure dans le Document Commissions 202501 Addendum 3.
La proposition de modification de la composition de la commission de l'égalité et de la non-discrimination est-elle approuvée ?
Je vois qu'elle est acceptée.
L'ordre du jour appelle la présentation et la discussion du rapport de Mme Luz MARTINEZ SEIJO, au nom de la commission de la culture, de la science, de l'éducation et des médias, sur le thème « La multiperspectivité dans l’enseignement de la mémoire et de l’histoire au service de la citoyenneté démocratique » (Document 16090).
Afin d'en terminer à 12 h, j'interromprai la liste des orateurs vers 11 h 45 pour laisser place à la réplique et au vote.
La parole est à Mme Luz MARTINEZ SEIJO, rapporteure. Vous disposez de 7 minutes maintenant et de 3 minutes à la fin pour répondre au débat.
La parole est à vous.
Merci, Madame la Présidente.
J'ai l'honneur de présenter ce rapport en un jour particulièrement important, alors que nous allons célébrer ici même l'anniversaire de l'Holocauste.
La mémoire est précisément le sujet de ce rapport, qui analyse l'importance de l'enseignement de l'histoire et de l'utilisation de la mémoire pour promouvoir la citoyenneté démocratique dans un environnement européen de multiculturalité et de polarisation. Il s'agit d'un rapport initié il y a quelque temps par M. Roberto RAMPI.
Il traite des défis sociaux et éducatifs actuels, de la promotion des valeurs démocratiques, de la pensée critique et du respect de la diversité. Le rapport souligne que l'enseignement de l'histoire ne consiste pas seulement à transmettre des faits, mais aussi à aider les élèves à analyser le passé de manière critique, à comprendre le présent et à construire un avenir plus inclusif, en utilisant une approche basée sur les compétences pour différencier les faits et la propagande à partir de perspectives multiples et en développant une compréhension critique du monde.
Ce rapport souligne que l'enseignement pour une citoyenneté démocratique doit être incorporé à tous les niveaux de l'éducation, de l'école primaire à l'enseignement supérieur, et à l'éducation non formelle. L'enseignement de l'histoire, en le rendant participatif et centré sur l'élève, joue un rôle crucial dans ce processus.
Le cadre de référence des compétences pour une culture démocratique du Conseil de l'Europe est un guide qui permet de développer les connaissances, les aptitudes et les attitudes nécessaires pour participer aux sociétés démocratiques. Ce modèle inclut des compétences telles que la pensée critique, la sensibilité culturelle et le respect de la diversité.
Cependant, la mise en œuvre de l'éducation à la citoyenneté démocratique comporte des défis structurels : des programmes rigides, une formation initiale insuffisante des enseignants sur les compétences en matière de citoyenneté et une approche pédagogique basée sur la mémorisation de faits, ce qui rend la pensée critique et participative plus difficile.
Deuxièmement, le rapport souligne que des questions sensibles et controversées doivent également être intégrées dans les programmes d'histoire, par exemple les guerres, les génocides, les régimes totalitaires, etc. Cette approche vise à développer le respect face à des points de vue différents et la tolérance face à l'ambiguïté. Le rapport souligne que la clé pour surmonter ces défis est d'apprendre aux élèves à se mettre à la place de l'autre et à comprendre différentes perspectives. Il établit également la différence entre la mémoire et l'histoire – la première est subjective et collective, tandis que l'histoire cherche à interpréter le passé par le biais d'une analyse critique et de preuves. Les deux sont valables mais doivent être rigoureusement abordées en classe.
Troisièmement, la mémoire historique est essentielle pour promouvoir l'inclusion, la réconciliation et les valeurs démocratiques. Son utilisation permet d'honorer les victimes, de réfléchir aux injustices du passé et de prévenir la répétition d'atrocités à l'avenir. Le rapport préconise une approche participative dans l'utilisation de la mémoire, qui implique un questionnement, une analyse et une reconstruction des moments historiques avec les élèves.
La mémoire de l'Holocauste est un merveilleux exemple de la façon dont la mémoire critique peut éduquer aux droits de l'homme et renforcer la cohésion sociale. La mémoire joue un rôle important dans la réparation des traumatismes historiques ; elle offre aux victimes et à leurs descendants une reconnaissance sociale et permet de développer le dialogue et la réflexion dans la société en général. Toutefois, le rapport met en garde contre les distorsions de la mémoire à des fins politiques et l'exclusion de récits alternatifs, qui mettent certains secteurs mal à l'aise.
Quatrièmement, nous mentionnons la nécessité de relier l'éducation formelle à des initiatives non formelles, telles que des visites de sites de mémoire, de musées ou d'itinéraires culturels. Ces expériences aident les élèves à explorer l'histoire de manière immersive et à comprendre leur pertinence contemporaine. Ce rapport inclut des exemples de bonnes pratiques et de lieux de mémoire tels que le mémorial de Sibérie en Pologne, le musée de l'enfance de la guerre en Bosnie, qui abordent les traumatismes historiques en utilisant des méthodes innovantes et promeuvent la réconciliation ; des programmes d'itinéraires culturels européens qui promeuvent un patrimoine commun à travers des thèmes tels que l'histoire juive et l'itinéraire de la libération. J'aimerais également mentionner le Réseau européen Mémoire et Solidarité, et vous inviter à visiter l'exposition à la sortie de l'hémicycle qui montre la solidarité dans des circonstances difficiles.
Ces initiatives nous montrent que les expériences non formelles peuvent compléter les programmes éducatifs formels et introduire des méthodes participatives et interactives pour enrichir l'enseignement de l'histoire.
Le rapport comprend également une étude de cas en Espagne, dans la région de Navarre. Cette année commémore l'anniversaire de 1975, une période de grande incertitude politique en Espagne suite à la mort de FRANCO, lorsque la société espagnole a décidé de choisir la démocratie et la liberté. L'Espagne est un bon exemple d'intégration de la mémoire historique dans l'éducation. L'histoire de la guerre civile et de la dictature a donné lieu à des initiatives législatives et éducatives pour faire face à ce passé traumatisant. Les lois sur la mémoire démocratique et sur l'éducation prévoient des mesures visant à inclure la mémoire historique dans les programmes scolaires et à promouvoir l'éducation civique et les valeurs. La Navarre est un excellent exemple de gestion de la mémoire historique au niveau régional. L'Institut navarrais de la mémoire gère des programmes qui favorisent la paix et la coopération, tels que les écoles de la mémoire, qui combinent la formation des enseignants, la recherche et les activités scolaires pour fournir des connaissances, réparer les préjudices et promouvoir la réconciliation. En outre, un réseau de sites de mémoire explorant les thèmes du travail forcé, de la répression sexuelle et de l'exil offre aux élèves un lien direct avec le passé.
Enfin, le rapport préconise une approche de multiperspectivité dans l'enseignement de l'histoire, permettant aux élèves d'explorer différents événements et d'analyser de manière critique les événements historiques du passé. Cette approche favorise l'inclusion, la pensée critique et une compréhension plus ajustée de l'histoire.
En bref, l'enseignement de l'histoire est fondamental pour renforcer les valeurs démocratiques, contrer les tendances autoritaires et favoriser la cohésion sociale.
Je vous remercie.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
10:15:00
Merci, Madame la rapporteure.
Nous entamons maintenant notre débat, et dans ce débat, j'appelle d'abord les représentants des groupes politiques.
La première sur la liste est Mme Sevilay ÇELENK ÖZEN du Groupe pour la gauche unitaire européenne.
La parole est à vous.
Türkiye, UEL, Spokesperson for the group
10:15:23
Merci, Madame la Présidente,
Chers collègues, permettez-moi tout d'abord de féliciter la rapporteure pour son excellente contribution. Ce rapport nous aide à comprendre comment aborder l’histoire et la mémoire pour renforcer les valeurs démocratiques et la citoyenneté démocratique.
Alors que nous discutons de ce rapport aujourd’hui, je me souviens des mots de l’historien français Fernand BRAUDEL. Il nous rappelle que le passé, tout comme le présent, est une interprétation des faits. Cette idée nous incite à réfléchir de manière critique à la façon dont nous transmettons l’histoire. Elle met également en évidence une responsabilité essentielle : qui interprète ? Qui raconte l’histoire ? Les détenteurs du pouvoir ou les citoyens eux-mêmes ?
BRAUDEL nous enseigne aussi que l’histoire ne progresse pas uniquement à travers les grands événements, mais également à travers la vie quotidienne des citoyens ordinaires. C’est là, je crois, le fondement d’une approche véritablement démocratique de l’enseignement de l’histoire.
Si nous nous focalisons uniquement sur les dirigeants, les traités et les guerres, nous risquons d’occulter les vies, les luttes et la résilience des gens ordinaires qui, eux aussi, font l’histoire et en subissent les conséquences.
Aujourd’hui, alors que l’Europe est entourée de conflits et de guerres – de Gaza à l’Ukraine en passant par la Syrie –, l’accent mis par ce rapport sur la citoyenneté démocratique à travers la multiperspectivité est plus que jamais nécessaire.
Ces conflits ne sont pas uniquement des crises géopolitiques. Ils sont aussi des crises de mémoire et de récits. Ils nous rappellent que le souvenir n’est jamais neutre : c’est un acte politique, un choix. Ce que nous choisissons de nous rappeler et ce que nous choisissons d’oublier façonne notre identité collective et notre avenir.
Promouvoir la multiplicité des perspectives dans l’enseignement de l’histoire est un outil puissant pour la réconciliation, la paix et la démocratie. À une époque où les conflits mémoriels exacerbent les divisions, il est impératif que l’histoire enseignée dans nos écoles ne soit plus seulement un regard sur le passé, mais le socle d’une mémoire commune et inclusive.
Assurons-nous que le souvenir serve l’unité et la compréhension, et non la division. Ensemble, construisons une Europe plus démocratique et plus pacifique.
Je vous remercie.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
10:18:13
Merci, Mme Sevilay ÇELENK ÖZEN.
L'oratrice suivante est Mme Gökçe GÖKÇEN du Groupe des socialistes, démocrates et verts.
La parole est à vous.
Merci, Madame la Présidente.
Chères et chers collègues,
Les débats politiques qui ont lieu aujourd'hui en Europe ne sont pas indépendants des souffrances vécues par le passé, ni de la crainte que de telles tragédies ne se répètent. Les crises auxquelles l'Europe et ses institutions sont confrontées aujourd'hui, les réponses européennes, la montée des mouvements d'extrême droite et les prises de position des jeunes face à ces crises sont souvent discutées sous différents angles : droit, droits humains discours de haine, politique.
Cependant, nous plaçons notre confiance dans la démocratie et dans la manière dont un débat ouvert y contribue. Nous pouvons construire une citoyenneté démocratique non seulement en regardant le présent et le futur avec inquiétude, mais aussi le faire avec confiance et un état d'esprit qui ne craint pas le débat.
Faire revivre la mémoire, se rendre compte de ce que nous avons oublié, voir comment les enfants et les jeunes peuvent améliorer la démocratie lorsqu'ils ont accès à de vraies connaissances. Tout cela est bien sûr lié à l'enseignement de l'Histoire.
Chères et chers collègues,
Les qualités que l'Europe représente – tolérance, pluralisme, paix, sécurité – ne lui ont pas été données en un jour. Les guerres mondiales, les conflits, les régimes totalitaires, le racisme, la xénophobie et la violence : voilà ce dont se rappelait l'Europe il n'y a pas si longtemps.
Pourtant, c'est aussi un fait que l'Histoire, lorsqu'elle est racontée comme l'histoire des guerres, des nations et des États, ne parvient souvent pas à transmettre pleinement les coûts supportés par les personnes. Les gens ont vécu de véritables tragédies humaines, ont fait de grands sacrifices, ont beaucoup souffert. Et les sociétés qui ont le mieux analysé les souffrances auxquelles elles étaient confrontées, qui se sont engagées dans des conversations difficiles et qui ont trouvé la vérité avec confiance, sont celles qui ont rencontré la démocratie.
Et la démocratie ne doit pas être considérée comme acquise. C'est un acquis difficile à gagner et facile à perdre. C'est pourquoi les principes directeurs pour l'enseignement de l'histoire et le Cadre de référence devraient servir de principes clés. Les États devraient mettre à jour leur enseignement de l'histoire, à la fois en termes de programmes et de méthodologie, en veillant à ce qu'ils reflètent des perspectives multiples.
Une coopération devrait être établie entre l'éducation réglementée et l'éducation non réglementée, y compris la contribution des sites de monuments mémoriaux et des musées. L'enseignement de l'histoire est un outil qui peut aider à tourner une nouvelle page pour comprendre où nous sommes et ce que nous sommes.
Pour ces raisons, nous soutenons pleinement le rapport et remercions Mme Luz MARTINEZ SEIJO pour ce travail bien pensé.
Merci.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
10:20:57
Merci, Madame Gökçen.
L'orateur suivant est M. Ionuț-Marian STROE, du Groupe du Parti populaire européen.
La parole est à vous.
Romania, EPP/CD, Spokesperson for the group
10:21:14
Madame la Présidente,
Chers collègues,
Alors que nous constatons un recul démocratique et une polarisation croissante à travers l’Europe, il est essentiel de réaffirmer le rôle fondamental de l’éducation dans la protection de nos valeurs communes. Le Groupe du Parti populaire européen se félicite de cette contribution opportune sur la multiperspectivité dans l’éducation à la mémoire et à l’histoire pour une citoyenneté démocratique, et nous soutenons pleinement le message central de ce rapport.
À une époque marquée par la désinformation et le révisionnisme historique, les jeunes doivent développer leur esprit critique afin d’analyser les sources historiques, de comprendre les différentes interprétations du passé et de distinguer les faits de la propagande.
Il ne s’agit pas de relativiser les vérités historiques, mais bien de favoriser une compréhension nuancée d’événements complexes et d’empêcher toute instrumentalisation de l’histoire à des fins politiques. En ce sens, l’approche préconisée ne fait que renforcer la capacité des jeunes à détecter les manipulations et les distorsions du récit historique, une compétence devenue essentielle dans le paysage informationnel actuel.
Nous pensons qu’il est crucial de mettre l’accent sur l’éducation civique, ancrée dans nos valeurs européennes communes, pour bâtir des sociétés résilientes et inclusives. Cela implique d’introduire l’éducation à la citoyenneté démocratique en tant que matière distincte et obligatoire, tout en intégrant ces compétences et thématiques dans d’autres disciplines pertinentes, notamment l’enseignement de l’histoire, à toutes les étapes de l’éducation formelle.
L’enseignement de l’histoire ne doit pas devenir un instrument de division, mais plutôt un levier de dialogue et de compréhension mutuelle. L’accent mis sur les droits humains et la démocratie est essentiel, tout comme l’étude des régimes totalitaires qui ont dévasté l’Europe aux XXᵉ et XXIᵉ siècles.
Les partenariats entre les écoles, les institutions culturelles, les lieux de mémoire, les musées et les organisations de la société civile peuvent offrir aux élèves des opportunités d’apprentissage précieuses. Ces « espaces d’apprentissage sûrs pour la démocratie », comme le souligne ce rapport, permettent un enseignement interactif, un dialogue intergénérationnel et une compréhension approfondie de l’histoire.
Le Groupe du Parti populaire européen estime que les États membres doivent encourager et soutenir activement ces initiatives, en garantissant des ressources et un financement adéquats.
Nous restons fermement engagés en faveur d’une éducation de qualité pour tous les citoyens européens. Nous exhortons tous les États membres à prendre ces recommandations au sérieux et à œuvrer ensemble pour garantir que les générations futures disposent des compétences, de l’esprit critique et des valeurs nécessaires pour défendre et promouvoir notre héritage démocratique commun.
Nous vous remercions.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
10:24:12
Merci, Monsieur Stroe.
Notre prochain orateur est M. Markus WIECHEL du Groupe des conservateurs européens et de l'Alliance démocratique.
Sweden, EC/DA, Spokesperson for the group
10:24:21
Merci, Madame la Présidente.
À mon avis, deux éléments fondamentaux structurent nos vies : le temps, qui façonne notre Histoire en tant que communautés et sociétés, et l’espace physique, qui sous-tend la géographie et constitue, en quelque sorte, la scène où se déroulent sans cesse les événements de l’Histoire.
C’est pourquoi l’histoire, tout comme la géographie, ont longtemps été considérées comme des matières scolaires essentielles, en particulier après deux guerres mondiales dévastatrices.
L’idée était que, même si nous ne pouvons pas nous projeter avec certitude dans l’avenir, nous pouvons tirer des leçons du passé, afin d’orienter nos sociétés vers un avenir plus pacifique et un ordre international plus stable et plus humain.
La cérémonie que nous organiserons dans une heure en mémoire de la libération d’Auschwitz en 1945 est le type d’événement dont le souvenir doit être préservé à jamais. L’Holocauste, ou toute autre tragédie de cette ampleur, ne doit jamais se reproduire.
Plus largement, le premier terme du titre de notre débat – multiperspectivité – souligne notre devoir d’entendre et de respecter des points de vue variés sur les événements historiques.
C’est précisément ce que nous faisons dans cette Assemblée depuis sa création en 1949. C’est l’essence même de notre Conseil de l’Europe et de notre démocratie.
En conclusion, je souhaite féliciter la rapporteure et la commission pour la qualité de leur travail.
J’espère sincèrement que notre débat et ce rapport, essentiels pour l’avenir de l’éducation, trouveront l’écho qu’ils méritent dans nos écoles, nos universités et dans la vie publique.
Je vous remercie, Madame la Présidente.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
10:26:18
Merci, Monsieur Wiechel.
L'oratrice suivante est Mme Yuliia OVCHYNNYKOVA de l'Alliance des démocrates et des libéraux pour l'Europe.
Vous avez la parole.
Ukraine, ALDE, Spokesperson for the group
10:26:27
Madame la Présidente,
Mesdames et messieurs,
Au nom de l'Alliance des démocrates et des libéraux pour l'Europe, je tiens à remercier la commission et Mme la rapporteure pour ce rapport extrêmement important et nécessaire.
Ce rapport traite du cœur même du Conseil de l'Europe et de la démocratie : la nécessité de se souvenir de notre passé, d'apprendre de l'histoire et d'éduquer les gens pour qu'ils deviennent de véritables citoyens de nations démocratiques. Ce sont les ingrédients clés de l'Europe en tant que projet de paix. Une paix qui naît de la connaissance, des valeurs et des actions visant à protéger notre monde des guerres. C'est pour cela que nous sommes ici, chers membres, c'est pour cela que le Conseil de l'Europe, les Nations Unies et enfin l'Union européenne ont été créés.
Aujourd'hui, nous sommes témoins de la manière dont la Russie tente de saper le monde entier en falsifiant et en fabriquant brutalement toute l'histoire d'avant et d'après la seconde guerre mondiale. Et il ne s'agit pas seulement de l'Ukraine ou de la Géorgie, de la République de Moldova ou du Bélarus, de la Slovaquie ou de la Hongrie, de l'Allemagne ou de la France.
Un enseignement de l'histoire bien conçu est essentiel pour acquérir une compréhension plus profonde et plus nuancée du passé. Il nous permet d'évaluer le présent de manière critique, en faisant la différence entre les faits, les souvenirs, les interprétations et les perspectives. L'enseignement de l'histoire devrait être un élément clé de l'éducation aux droits humains et un fondement du développement de la citoyenneté démocratique chez les jeunes.
Les systèmes éducatifs doivent s'adapter aux changements sociaux et y répondre par de nouveaux programmes et des méthodologies interactives. Ils doivent lutter contre l'érosion des valeurs démocratiques, en particulier chez les jeunes en Europe. Pour ces raisons, l'éducation à la citoyenneté démocratique devrait être une matière obligatoire distincte, incluse dans d'autres matières pertinentes telles que l'enseignement de l'histoire, à tous les stades de l'éducation réglementée, et faire partie intégrante de la formation professionnelle et de l'éducation non réglementée.
Nous devons inclure des compétences en matière de culture démocratique dans la formation des enseignants et la formation professionnelle, en multipliant les possibilités d'échange et de développement professionnel des enseignants. À une époque où les récits historiques sont de plus en plus manipulés pour justifier l'agression, notamment dans le contexte de la guerre en cours en Europe, le rôle de l'histoire critique est extrêmement important. Alors embrassons cette mission avec dévouement et engagement, en veillant à ce que l'enseignement de l'histoire reste un pilier de nos sociétés démocratiques.
Unissons-nous pour construire un avenir où aucune agression ne reste sans réponse, où aucun crime ne reste impuni et où aucune nation ne reste seule dans sa lutte pour la souveraineté et la dignité.
Je vous remercie de votre attention.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
10:29:33
Merci, Madame Ovchynnykova.
Dans le débat, la parole est à Lord George FOULKES.
Merci, Madame la Présidente,
Permettez-moi de féliciter également Mme Luz MARTÍNEZ SEIJO pour son excellent rapport sur cette question essentielle.
L’histoire est un outil puissant. Entre de bonnes mains, elle encourage la citoyenneté démocratique et favorise la compréhension mutuelle. Mais entre de mauvaises mains, elle peut être instrumentalisée pour saper la diversité, éroder la démocratie et renforcer la polarisation. L’interprétation est la clé. Et comme le dit l’adage : « Il y a toujours deux côtés à une médaille. »
Ignorer la pluralité des points de vue en n’enseignant l’histoire que sous une seule perspective est dangereux et constitue un véritable échec pour les générations futures. C’est en s’engageant de manière critique avec le passé que les jeunes acquièrent les compétences nécessaires pour faire face aux défis contemporains et distinguer les faits de la fiction, un enjeu d’autant plus crucial à l’ère des réseaux sociaux.
Prenons un exemple de l’histoire britannique : les relations entre l’Écosse et l’Angleterre. Des siècles de conflits – des guerres d’indépendance aux tensions qui ont suivi l’Union des couronnes – ont laissé un héritage d’animosité entre Écossais et Anglais.
Mais aujourd’hui, ces deux nations ont su élaborer un programme d’histoire équilibré, intégrant les perspectives écossaises et anglaises, contribuant ainsi à briser les stéréotypes et à promouvoir le respect mutuel.
L’enseignement de l’Acte d’Union de 1707, mis en regard avec des moments de division comme les soulèvements jacobites, illustre la complexité de l’unité et de la séparation. Si les Anglais ont Flodden, nous avons Bannockburn. Et s’ils affirment que l’Écosse a été absorbée dans l’Union, nous pouvons leur rappeler que c’est Jacques VI d’Écosse qui est devenu leur roi, Jacques Ier d’Angleterre.
En fin de compte, reconnaître les contributions majeures de l’Écosse à l’histoire britannique, au siècle des Lumières et à la révolution industrielle, tout en menant des débats ouverts sur son avenir, montre comment la multiperspectivité peut enrichir le récit collectif qui nous unit.
Enseigner l’histoire de manière responsable et inclusive, c’est renforcer la démocratie et former des citoyens résilients et éclairés. Nous devons donc veiller à ce que les jeunes d’Europe et d’ailleurs – et particulièrement aux États-Unis aujourd’hui – apprennent à analyser le passé de manière critique, à embrasser la diversité et à défendre les principes du pluralisme et de la démocratie.
En effet, alors que des enquêtes récentes indiquent que la génération Z britannique exprime un soutien croissant aux régimes autoritaires, nous avons plus que jamais besoin d’un enseignement de l’histoire qui leur rappelle que la démocratie a été durement conquise et qu’elle ne doit jamais être considérée comme acquise.
Je vous remercie.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
10:32:34
Je vous remercie.
La parole est à Mme Marianne BINDER-KELLER.
Vous avez la parole.
Chère Madame rapporteure,
Je vous remercie pour ce rapport et je le soutiens sans réserve.
« Plus jamais ça » est une évidence de ma jeunesse. Dans ma famille, avec des parents qui ont encore vécu la guerre, la guerre était omniprésente. L'assimilation de la folie du Troisième Reich avec ses 80 millions de morts dans le monde, l'assassinat de prisonniers politiques, le génocide des personnes juives, l'extermination ciblée de six millions de femmes, d'hommes et d'enfants juifs, s'enfonçait dans la conscience collective. L'horreur était omniprésente et, en grandissant, j'ai lu avec stupeur les minutes du procès de Nuremberg. Mais aujourd'hui, je regarde avec la même stupeur les rues d'Europe et l'on y crie effectivement : « Juifs ! Mort aux Juifs. » Des étudiants hurlent contre des professeurs juifs. Des enfants juifs sont persécutés par une foule quelconque et des étudiantes et étudiants juifs sont victimes d'hostilité. Il n'est pas nécessaire d'en rajouter. Mais nous nous posons tous la question suivante : que s'est-il passé moins de 80 ans après l'Holocauste ?
Changement de décor. Pendant près de trente ans, l'Europe a été divisée. En tant qu'enfant de la guerre froide, j'ai vécu un mur qui traversait l'Europe de part en part. D'un côté, les démocraties de l'Ouest, de l'autre, la dictature soviétique et les États satellites qui lui étaient rattachés. À Berlin, ceux qui voulaient fuir de l'Est vers l'Ouest étaient abattus au pied du mur. Et trente ans plus tard, nous voyons en Europe, après la chute du mur, dans des démocraties, à une époque où la liberté est unique, des courants qui rendent hommage à un autocrate comme Poutine et qui pourtant font effectivement une inversion victime/coupable à l'occasion de l'invasion brutale et contraire au droit international de l'Ukraine. Qui ont par exemple aussi oublié et occulté la terreur stalinienne en Ukraine, l'Holodomor. Que s'est-il passé ?
Je peux continuer comme ça. Par exemple, les podiums sur lesquels je suis assis avec des personnes qui veulent enfin la paix en Europe, mais qui ne posent pas leurs exigences à l'agresseur, mais à l'Ukraine envahie, pour qu'elle donne à l'agresseur ce qu'il veut. Ce serait alors la paix. Quelle paix ? Nous savons à quoi a mené la politique d'apaisement de Chamberlain. Mais sur ces podiums, l'histoire est souvent complètement occultée. C'est ce que nous voyons dans les talk-shows, sur les médias sociaux, l'opinion devient un fait, la propagande un lavage de cerveau. 1984, le célèbre roman de George Orwell, nous fait penser à lui. L'histoire est adaptée chaque jour et l'individu perd sa liberté. Et c'est pourquoi c'est précisément cette éducation que nous devons avoir maintenant qui nous sauvera de cette perte de liberté.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
10:36:04
Merci, Madame Binder-Keller.
Le prochain sur la liste est Sir Edward LEIGH.
La parole est à vous, s'il vous plaît.
Madame la Présidente,
L'enseignement de l'histoire est en effet essentiel pour l'avenir de l'Europe. Et je suis d'accord avec Lord George FOULKES pour dire qu'il existe une multiplicité de récits et de modes d'interprétation.
L'objectif essentiel de l'histoire doit rester la recherche de la vérité, la capacité de raconter, sur la base de preuves et de l'intelligence, ce qui s'est réellement passé à un moment et dans un lieu donnés et quels en ont été les effets. La vérité doit toujours être la chose la plus importante. Mais il est très utile de prendre en compte une multiplicité de points de vue pour parvenir à la vérité.
Cette résolution souligne à juste titre que l'inclusion de parties sensibles et parfois controversées de l'histoire et la prise en compte de perspectives multiples lors de l'analyse des sources peuvent renforcer la culture démocratique. C'est exact. Il est clair que nous devons encourager un plus grand respect des différences d'opinions. Mais pendant trop longtemps, les élites politiques confortables de toute l'Europe ont fonctionné comme un huis clos intellectuel.
Tout ce qui s'éloigne d'un consensus confortable, libéral et fabriqué est considéré au mieux avec dédain, et souvent même avec un mépris total. Cela a sapé le fonctionnement de nos institutions nationales et européennes, notre culture démocratique. Cela explique pourquoi les électeurs du Royaume-Uni ont décidé de quitter l'Union européenne. Cela aide à comprendre pourquoi il y a eu une telle montée du populisme, non seulement ici en Europe, mais dans le monde entier, comme l'ont montré les récentes élections aux États-Unis.
Dans le même temps, quiconque soutient cette approche multiperspectives peut voir les dangers de ce que cette résolution demande. Le paragraphe 6.1.1. appelle à « introduire l’éducation à la citoyenneté démocratique en tant que matière obligatoire distincte et à intégrer les compétences pour une culture de la démocratie dans d’autres matières pertinentes, telles que l’enseignement de l’histoire, à tous les stades de l’éducation formelle ». C'est exactement le type d'approche lourde et descendante que nous devrions chercher à éviter. Et je crains que les cours obligatoires de « citoyenneté démocratique » ne fassent que renforcer, dans chaque pays où ils seront introduits, les récits conformistes libéraux de centre gauche existants.
Cela sapera précisément la multiplicité des perspectives que ce rapport et cette résolution cherchent à promouvoir. En réalité, les compétences et les approches nécessaires à la promotion d'une culture démocratique sont des compétences éternellement utiles. Au Moyen Âge, les grands centres d'apprentissage – Paris, Bologne, Oxford – étaient fondés sur les arts libéraux divisés en trivium et quadrivium : la grammaire, l'art et la structure du langage ; la logique, l'étude de la raison, de la validité ; et la rhétorique, l'art de parler, de discuter et de persuader.
Ces trois ensembles d'aptitudes ou de compétences pourraient être mieux adaptés à la vie et à l'engagement en tant que citoyens de sociétés démocratiques. Au lieu de cela, je soupçonne que les leçons de citoyenneté démocratique ne feront qu'alimenter de force l'agenda anti-intellectuel et effectivement sans substance de la diversité, de l'équité et de l'inclusion.
Le calendrier DEI est largement rejeté par les électeurs dans les mandats démocratiques à travers l'Europe et le monde, et nous devrions le rejeter également.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
10:39:28
Je vous remercie.
La parole est à M. Bertrand BOUYX.
Vous avez la parole.
Merci, Madame la Présidente.
Mes chers collègues,
Avant d’entrer dans le vif du sujet, je voudrais dire pourquoi ce sujet me passionne et pourquoi je le trouve fondamental dans le monde tel qu’il va et tel qu’il évolue sous nos yeux. Pour la simple raison que nous ne pouvons plus nous permettre de vivre divisés, chacun dans son coin, sûr de son point de vue contre ses voisins mais face à des géants géographiques, économiques, technologiques et aujourd’hui militaires.
Il y a diverses raisons qui nous empêchent de nous unir encore plus étroitement. Je ne vais pas toutes les citer mais, en tout état de cause, il y en a une qui me paraît primordiale : c’est celle qui a trait aux affects des peuples européens, affects qui se sont souvent construits les uns contre les autres. Bref, l’histoire ne passe pas et bloque encore et toujours, en 2025, les perspectives d’avenir.
Sans remonter à la bataille de Bouvines et aux exploits de Jeanne D'ARC,1848, 1870, 1919, 1945, 1989 sont des dates qui produisent encore leurs effets aujourd’hui. Pour les uns, la catastrophe se produit du fait de la chute de l’Empire ottoman ; pour les autres, c’est l'Empire ottoman qui a longtemps empêché leur nation de jouer pleinement son rôle et de profiter d’opportunités qu’ils paient encore ; pour d’autres, ce sera l’Union soviétique ; et encore pour d’autres, les deux. Parfois, c’est une question de territoires disputés. Je ne vais pas citer de régions particulières pour ne pas raviver les plaies.
Ou plutôt, si, je vais en citer une, une qui se trouve dans mon pays, où nous nous trouvons aujourd’hui : l’Alsace. Région qui a changé quatre fois de nationalité entre 1870 et 1945, région qui est aujourd’hui un trait d’union entre la France et l’Allemagne. Sur quoi est assise cette réconciliation ? Non pas sur un oubli, mais un enseignement de l’histoire le plus partagé possible à destination des petits Français et des petits Allemands. Alors, vous me direz que la réconciliation a précédé le manuel d’histoire franco-allemand, qui ne date pas de très loin puisqu'il a une vingtaine d’année. Nous pouvons d’ores et déjà promouvoir l’idée d’un manuel d’histoire germano-polonais, roumano-hongrois ou encore gréco-turc et, in fine, pourquoi pas européen, avec l’ambition de créer un affect commun permettant de faire face aux défis du futur, parce que c’est de cela dont il s’agit.
Le rapport de Mme Luz MARTINEZ SEIJO, notre collègue espagnole, ne s’arrête pas aux questions éducatives, même si elles sont évidemment au cœur de la question. Elle apporte toute l’expertise de son pays qui a dû fournir un travail titanesque pour réconcilier les mémoires franquistes et républicaines à la mort du dictateur, pour entrer pleinement dans la démocratie et le progrès en tant que nation unifiée.
Le rapport fourmille de pistes très intéressantes sur les lieux de mémoire, sur la question de la muséographie et sur les itinéraires culturels européens. C’est une grande question que celle-là, de celles qui ne se voient pas mais qui sont essentielles pour bâtir un avenir.
J’en profite pour rappeler ma modeste contribution avec une proposition que j’ai faite de créer un ordre des solidarités européennes visant à décorer les citoyens qui se seraient illustrés dans ce domaine. Je vais donc voter ce rapport avec enthousiasme. J'en profite également pour saluer tous les membres de l'Observatoire de l'enseignement de l'histoire au Conseil de l'Europe et particulièrement la personne qui le dirige, M. Alain LAMASSOURE.
Merci.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
10:43:00
Merci.
La parole est à Mme Bisera KOSTADINOVSKA-STOJCHEVSKA.
Madame la Présidente,
Je voudrais tout d'abord féliciter la rapporteure pour ce rapport particulièrement opportun.
Comme nous pouvons le constater, l'histoire n'a jamais été aussi mal utilisée qu'aujourd'hui et ces derniers temps. L'approche équilibrée, mais innovante, décrite dans cette recommandation détaillée place les enseignants et les étudiants au centre et laisse l'histoire raconter son histoire, et non les politiciens.
Nous sommes tous d'accord pour dire que le système éducatif doit s'adapter aux changements sociaux et y répondre par de nouveaux programmes. Ces programmes doivent contribuer à lutter contre l'érosion des valeurs démocratiques, en particulier chez les jeunes Européens.
Nous devons également aider les élèves à développer leur esprit critique en leur apprenant à évaluer les sources historiques et à porter des jugements éclairés.
Nous devons les aider à développer une analyse des événements historiques fondée sur les droits humains, à multiplier les perspectives dans l'enseignement de l'histoire et à prendre en compte de manière critique les différents points de vue.
Nous devons garantir le libre accès aux environnements d'apprentissage virtuels. Et nous devons les aider à faciliter le partenariat entre les écoles, les institutions culturelles et les autres acteurs concernés, tels que les lieux de mémoire, les musées, les archives, les sociétés civiles et les artistes.
Enfin, je dirais que nous devons laisser l'histoire être notre professeur et non notre prison.
Je vous remercie.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
10:44:32
Je vous remercie.
L'orateur suivant est Mme Yelyzaveta YASKO.
Madame Yasko, vous avez la parole.
Chères et chers collègues,
Je suis sûre que vous vous êtes souvent demandé pourquoi nous, Ukrainiens, sommes si follement courageux. Nous voulons tellement parler d'histoire, de notre autodétermination. Je suis sûre que vous vous êtes souvent posé cette question.
L'une des réponses se trouve dans notre histoire : dans le passé, au cours des siècles passés, notre mémoire historique nous a été enlevée. Il y a toujours eu une tentative de la part d'un agresseur, de l'Empire russe, de l'Union soviétique, d'effacer notre mémoire. De nos racines familiales, de notre histoire.
Et maintenant, nous savons ce que signifie « plus jamais ça. » Nous le savons mieux que quiconque, probablement, parce que cela nous arrive aussi aujourd'hui.
Presque chaque famille sait que certains d'entre nous, des membres de notre famille, ont été envoyés en Sibérie, ou ont été torturés, ou ont été tués en prison. Mais nous n'avons jamais pu accéder aux archives, parce qu'elles ont toujours été confisquées par l'Union soviétique, par le KGB, par tous ceux qui voulaient effacer notre mémoire. Heureusement, en 2015, nous avons ouvert nos archives et, en tant que personne ayant travaillé sur certains de ces dossiers, il était incroyablement effrayant de voir certains dossiers d'exécutions de l'époque de STALINE, des centaines de noms de personnes qui ont été envoyées, exécutées en Sibérie.
Cela montre à quel point les méthodes diaboliques ont existé et existent encore pour déformer notre mémoire, notre histoire et notre réalité.
Un autre exemple que je souhaite évoquer ici aujourd'hui est – et je suis sûre que vous l'avez écouté à maintes reprises – le discours russe selon lequel le Donbass est russe, que les entreprises du Donbass ont été construites par des Russes. Mais en fait, si vous regardez l'histoire, vous verrez que la majorité des usines industrielles du Donbass ont été construites par des Européens. Les gens parlaient des langues différentes. Le Donbass a toujours connu une diversité ethnique. Il y avait beaucoup, beaucoup de gens d'origines ethniques différentes. Les Grecs en font partie. C'est pourquoi Marioupol est en fait une ville ukrainienne grecque.
En parlant de tout cela, je voudrais vous encourager à investir dans l'éducation de vos enfants, afin qu'ils se souviennent, qu'ils étudient les différentes pages de l'Histoire et des archives. Nous avons tous la possibilité de nous tourner vers cette vérité pour l'avenir. S'il vous plaît, investissez dans les politiques et toutes les initiatives possibles pour lutter contre la propagande et la désinformation et pour défendre la vérité de l'Histoire.
Je vous remercie.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
10:47:59
Merci, Madame Yasko.
L'orateur suivant est M. Andries GRYFFROY.
Je dois remercier notre rapporteure, Mme Luz MARTINEZ SEIJO, pour ce magnifique rapport, car ce que j'ai déjà entendu de la part des orateurs précédents, c'est qu'en fait, chaque pays, chaque nation a une histoire.
Nous parlons de l'Ukraine et de la commémoration de l'Holocauste. Et je peux aussi vous dire ce que nous avons, par exemple, dans les Flandres, nous avons les Flanders Fields, très connu des Britanniques, les coquelicots. Il s'agit de la Première Guerre mondiale, où nous avons des cimetières d'Allemands, de Britanniques et de Canadiens côte à côte, où nous avons un énorme monument commémoratif avec une grande pancarte « plus jamais la guerre ». Et, 22 ans plus tard, la guerre a repris.
Mais pour certains d'entre nous, il est encore difficile de parler de leur passé. Ils ne peuvent pas en parler ouvertement. Et c'est là que nous devons dire que cet enseignement de l'histoire ne doit pas se limiter à transmettre des faits, mais qu'il doit aider les élèves à analyser le passé de manière critique, à comprendre le présent et à construire ainsi un avenir plus inclusif grâce à une approche fondée sur les compétences.
Et comment nous pouvons le faire. Cela signifie bien sûr que nous devons l'intégrer à tous les niveaux de l'éducation. Si nous ne parlons pas de l'école primaire, nous parlons de l'université, et cela signifie, en fonction de chaque pays, que nous devons peut-être réformer les programmes scolaires, mais que nous devons certainement rechercher des renforcement pour les enseignants, si nécessaire.
Mais la deuxième partie est aussi que la mémoire historique ne passe pas seulement par les livres. Nous avons besoin de ces musées, de ces sites commémoratifs, de ces racines culturelles qui nous permettent de regarder au-delà de nos propres frontières. Nous devons donc relier l'éducation formelle à l'éducation non formelle.
Et oui, pour cette raison, nous devons protéger notre patrimoine, nous devons conserver notre patrimoine, parce qu'il s'agit aussi d'une question d'identité. Et nous pouvons le faire par le biais d'une méthodologie interactive. Mais nous pouvons aussi le faire en soutenant cette éducation non formelle, comme nous l'appelons, en assurant le financement, et j'insiste ici, l'autonomie des musées et des lieux de mémoire.
En conclusion, grâce à sa rapporteure, ce rapport offre un très bon cadre pour repenser l'enseignement de l'histoire comme un moyen de promouvoir notre diversité culturelle et de préparer les générations futures à relever les défis démocratiques du XXIe siècle.
Merci pour cet excellent rapport.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
10:51:14
Je vous remercie.
L'orateur suivant est M. Attila TILKI.
Merci
Cela fonctionne-t-il ? Oui.
Le programme national hongrois a été introduit en 2013 et a été modifié par étapes à partir de septembre 2020. Il comprend des objectifs éducatifs clés tels que l'éducation à la citoyenneté et à la démocratie, le développement de la conscience de soi et de la culture sociale, ainsi que l'éducation morale. Chacun de ces objectifs est particulièrement important pour une attitude d'acceptation et d'ouverture envers les autres et pour une coexistence démocratique dans la société.
Le programme national, révisé en 2020, rompt avec l'ordre strictement chronologique de l'enseignement de l'histoire et suit dans certains cas le principe thématique. Ainsi, il traite de sujets qui couvrent des périodes historiques entières, tels que les origines de la démocratie moderne : l'État démocratique. Les auteurs du manuel scolaire ont également souhaité présenter différents points de vue sur des sujets sensibles, mettant ainsi davantage l'accent sur la multiperspectivité que dans les manuels précédents.
L'enseignement de l'histoire doit être un programme délibérément patriotique, orienté vers les enfants et le XXIe siècle, qui donne aux écoles plus de liberté que ses prédécesseurs. Nous devons être en mesure de transmettre notre patrimoine aux générations futures. Si nous avons une idée claire de ce que nous entendons par famille, travail, respect, amour de la patrie, nous avons le devoir de la transmettre. C'est le rôle de l'enseignement de l'histoire.
Il n'existe pas d'éducation neutre. Les systèmes éducatifs sont des systèmes de valeurs, qui enseignent ce que nous pensons être les valeurs de la société hongroise. Et parmi les valeurs que nous chérissons, il y a les héros qui nous ont aidés à survivre pendant les siècles passés. Les étudiants doivent savoir qui nous sommes vraiment, pour montrer que nous sommes les Hongrois avec mille ans d'État chrétien, des réalisations culturelles monumentales, 19 prix Nobel, 184 médailles d'or olympiques, une belle capitale et un beau paysage.
Je vous remercie.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
10:54:19
Merci.
L'orateur suivant est M. Sergio GUTIÉRREZ PRIETO.
Vous avez la parole.
Madame la Présidente,
Tout d'abord, je voudrais féliciter notre collègue Mme Luz MARTINEZ SEIJO pour ce rapport qui offre un large éventail de possibilités qui nous permettraient de créer un sentiment de réconciliation avec le passé, de reconnaître ce que nous sommes aujourd'hui et de nous rendre collectivement plus forts pour l'avenir.
Qui pourrait s'opposer à l'apprentissage et à la compréhension de notre passé ? Qui pourrait s'opposer à la connaissance, comme l'a dit José SARAMAGO, de la mémoire historique en tant que conscience collective créée en tant que connaissance créée par le peuple ? Naturellement, ce sont ceux qui ont honte de leur passé ou qui veulent le cacher afin que nous ne tirions pas les leçons qui s'imposent.
La mémoire historique ne se limite pas à l'apprentissage des faits historiques du passé. Elle nous permet de comprendre qui nous sommes, d'apprendre de nos erreurs et de consolider, ce qui est le plus important, nos valeurs fondamentales avec lesquelles nous développons un sens de la citoyenneté.
L'apprentissage de notre mémoire historique nous aide à développer un plus grand sens de la compassion civique avec ceux qui sont différents de nous, qui pensent différemment ou qui souhaitent exercer leurs droits d'une manière différente.
C'est pourquoi le relativisme avec lequel certains défendent notre passé ou notre mémoire est l'un des principaux problèmes ou écueils de notre système démocratique et de sa consolidation.
C'est pourquoi il est important que les écoles enseignent la mémoire démocratique. Nous devons apprendre à enseigner la mémoire démocratique pour trois raisons. Tout d'abord, parce que la compréhension du passé renforce notre liberté, notre identité collective en tant que système démocratique. Une société qui oublie son passé compromet réellement la possibilité de préparer un avenir digne de ce nom.
Ensuite, parce que c'est un outil puissant contre l'information et la manipulation, car ceux qui connaissent leur passé peuvent développer une pensée critique à l'égard de ce qui se passe aujourd'hui.
Et surtout, fondamentalement, c'est un acte de justice envers ceux qui se sont battus pour créer des démocraties, nos systèmes de droits de l'homme et nos libertés publiques.
À cette fin, et comme l'a dit BORGES, « ce qui est oublié sera sans doute répété ».
Et ce que la rapporteure souligne dans ce rapport, c'est qu'il est absolument essentiel de se souvenir de notre passé, de connaître notre passé afin de ne pas répéter les erreurs et les fautes du passé.
Félicitations à la rapporteure.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
10:57:10
Je vous remercie.
L'oratrice suivante sur la liste est Mme Denitsa SACHEVA.
Vous avez la parole.
Madame la Présidente,
Mesdames et messieurs,
Je ne peux que saluer le travail accompli par la rapporteure, Mme Luz MARTINEZ SEIJO, qui attire notre attention sur la question de la citoyenneté démocratique et de l'éducation.
Permettez-moi tout d'abord de rappeler que la Déclaration et le programme sur l'éducation à la citoyenneté démocratique, fondée sur les droits et les responsabilités des citoyens, ont été adoptés par le Comité des Ministres en 1999 à Budapest, à l'occasion du cinquantième anniversaire du Conseil de l'Europe. Il a été initié par M. Svetlozar RAÈV, le premier ambassadeur bulgare auprès du Conseil de l'Europe en 1992, qui s'est battu pendant sept ans pour rapprocher les États membres afin qu'ils soutiennent son adoption.
Je voudrais ici rendre hommage à l'ambassadeur français de l'époque, Jacques Warin, qui a réussi à trouver un consensus entre les 41 États membres du Conseil de l'Europe de l'époque et à négocier un accord entre eux.
Nous revenons maintenant à ce débat et je voudrais souligner un élément important qui manque. Il s'agit de l'éducation à la paix. Les systèmes éducatifs ont la grande responsabilité d'inculquer aux générations futures les connaissances nécessaires à la compréhension du monde, de favoriser la culture de la coopération et de combler le fossé numérique et la fracture de l'information. L'éducation à la paix devrait et doit faire partie de l'éducation formelle par le biais des politiques nationales des programmes scolaires d'histoire et d'éducation civique.
En ce qui concerne la multiperspectivité, je suis très réticente. Je pourrais vous donner de nombreux exemples dans les pays des Balkans, où l'histoire est déformée de telle manière qu'elle peut provoquer des conflits au lieu d'une compréhension mutuelle. Ce n'est pas une multiperspectivité que de créer des récits, des fantasmes et des fictions erronés qui alimenteraient les conflits entre voisins.
Il est préférable de créer un organisme indépendant chargé de vérifier les faits historiques plutôt que de soutenir la création de rêves. Bien sûr, les faits peuvent être interprétés différemment, mais il n'est pas recommandé de les falsifier.
Encourager la multiplicité des points de vue dans l'enseignement de l'histoire au stade actuel ne serait pas un soutien et nous devrions y réfléchir à deux fois avant de l'approuver dans les États membres.
Merci.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
10:59:33
Merci, Madame Sacheva.
Je demande maintenant à Mme Sona GHAZARYAN de prendre la parole.
Vous avez la parole.
Madame la Présidente, je vous remercie.
Chère Luz, je vous remercie pour votre rapport important, qui arrive à point nommé.
Je voudrais remercier les organisateurs de la quatrième conférence annuelle de l'Observatoire sur l'enseignement de l'histoire en Europe et réaffirmer le ferme soutien de l'Arménie à la mission de l'Observatoire.
L'Europe et le monde entier traversent une période de turbulences et sont confrontés à des défis qui font écho à des périodes plus sombres de l'histoire. L'ordre international et les institutions multilatérales, établies après la seconde guerre mondiale pour promouvoir la paix et la stabilité, sont aujourd'hui mis à rude épreuve, alors que la guerre est revenue en Europe et au-delà, érodant les fondements de la sécurité et de la coopération.
Nous assistons à une normalisation inquiétante de la force, à un recul des institutions démocratiques et à une montée du populisme – des évolutions qui menacent nos valeurs communes, soutenant la paix dans nos sociétés. Pour ajouter à cette crise, le discours de haine et la désinformation gagnent du terrain, souvent alimentés par des récits qui manipulent l'histoire à des fins politiques.
L'Arménie connaît parfaitement ces défis. Au-delà de nos préoccupations en matière de sécurité, nous sommes quotidiennement confrontés à des distorsions possibles de l'histoire et de l'identité culturelle. L'instrumentalisation de l'histoire à des fins de division menace la coexistence pacifique, à laquelle nous aspirons tous.
Il est absolument inacceptable de nier les réalités historiques ou de manipuler et falsifier l'histoire pour justifier des revendications territoriales à l'encontre de pays voisins. L'histoire devrait servir de fondement à la vérité, ouvrant la voie à la réconciliation et non d'outil pour faire avancer des programmes diviseurs et trompeurs.
Un autre point grave sur lequel je souhaite attirer votre attention est le discours de haine dans les manuels d'histoire parrainés par l'État, qui encourage l'agression, l'intolérance et le racisme. Lorsque les ressources éducatives sont utilisées pour inculquer des préjugés, elles sapent la paix et perpétuent des stéréotypes néfastes.
Il est essentiel de contrer cette tendance dangereuse en promouvant un enseignement de l'histoire précis et équilibré, qui respecte la diversité et rejette toutes les formes de haine et de discrimination, en prévenant les nettoyages ethniques, les conflits motivés par la haine et les crimes contre l'humanité.
L'identification de ces défis n'est qu'un début. Il nous incombe désormais de travailler collectivement à la recherche de solutions. La construction d'une culture de la paix commence par une éducation innovante, centrée sur le citoyen, qui donne aux jeunes les moyens de s'engager de manière critique dans l'histoire plutôt que de l'accepter passivement.
Cela nécessite des efforts soutenus et une coopération pour développer des systèmes éducatifs fondés sur la démocratie et le concept de « vivre ensemble ». L'Arménie s'est engagée dans cette voie et soutient les initiatives qui mettent la vérité historique au premier plan.
Je vous remercie.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
11:02:58
Merci, Madame Ghazaryan.
L'orateur suivant est Mme Marietta KARAMANLI.
Je vous en prie, Madame.
Merci, Madame la Présidente.
Madame la rapporteure,
Mes chers collègues,
Je voudrais tout d’abord remercier Mme la rapporteure pour ce travail, ce travail qui est opportun pour améliorer justement l’enseignement de l’histoire aujourd’hui auprès des plus jeunes ; difficile par les implications que peut avoir ce changement de paradigme ; et également concret par ses recommandations et points de sortie.
La multiperspectivité dans l’enseignement, formel ou informel, pour reprendre une distinction faite par la rapporteure, peut se définir sommairement comme une démarche visant à prendre en considération une diversité de perspectives venant enrichir la compréhension du monde tel qu’il s’inscrit dans le temps.
Les sciences humaines et sociales sont par nature des champs laissant une part d’interprétation. Le moment actuel est marqué par la négation, par certains, de ce qui différencie la science et la recherche. Certains événements, faits ou mouvements sont établis et doivent être comme tels, et jusqu’à preuve du contraire, considérés comme un socle à partir duquel une recherche est faite et une interprétation peut être menée. Là est la discussion.
Alors qu’on commémore la libération des camps de concentration et la fin d’un génocide, des extrémistes radicaux remettent toujours en cause leur existence et leur objet. En France, cela n’est pas une opinion mais un délit visant la contestation de l’existence de crimes contre l’humanité. L’apport conjoint des historiens, des chercheurs, des enseignants, des acteurs et évidemment des victimes est non seulement utile mais aussi nécessaires pour progresser dans les connaissances et assurer la commémoration.
Je souhaite donc ici faire deux observations, Madame la rapporteure.
La formation des enseignants est un enjeu. Il ne peut y avoir de progrès sans prise en compte de ce que veut dire leur formation alors même que les médias, les réseaux sociaux et l’environnement culturel et sociétal ont été fortement bouleversés par le net. L’éducation aux médias est, de ce point de vue, importante. Cela ne conduit pas à diminuer la place et le rôle des enseignants mais, à l’inverse, à affirmer leur place et leur rôle.
Parallèlement, il ne peut y avoir non plus de progrès sans ouverture de l’école aux partenaires et en partenariat, je dirais, avec toutes les institutions culturelles, citoyennes et de recherche. Là encore, la collégialité, le principe de l’écoute, la diversité des lieux, la recherche doivent assurer une expertise de qualité.
Voilà ce que je voulais partager avec vous très rapidement et je vous remercie de votre attention.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
11:06:08
L'oratrice suivante est Mme Mariia MEZENTSEVA-FEDORENKO.
Je vous en prie, Madame, vous avez la parole.
Merci, Madame la Présidente.
Merci beaucoup, chères et chers collègues.
Je voudrais commencer par évoquer l'histoire très méconnue et intéressante de 400 jeunes étudiants ukrainiens qui, en ce jour, il y a cent sept ans, en 1918, ont empêché l'annexion éventuelle de l'actuelle capitale de l'Ukraine, Kiev. Ils se sont battus jusqu'à la mort contre un groupe de 4 000 bolchéviques, les ont vaincus et ont protégé l'actuel territoire moderne de l'Ukraine.
En les commémorant aujourd'hui, nous comprenons à quel point il est important d'étudier et d'apprendre l'histoire dans les programmes scolaires et universitaires : l'histoire non racontée, l'histoire inversée, l'histoire mélangée. Et en fin de compte, nous nous retrouvons dans les multiples dimensions de la guerre d'agression, des crimes de guerre de masse, des crimes contre l'humanité, des déportations, de la famine, des meurtres et des viols.
Ma famille et de nombreuses familles ukrainiennes, ainsi que de nombreuses familles européennes et du monde entier, ont vécu cette injustice historique. Si mon arrière-grand-mère n'avait pas survécu à la grande famine du début du XXe siècle, je ne serais pas ici devant vous. Mais STALINE a commis ce crime, un crime de génocide, avec l'intention de nous effacer de la planète Terre, comme le fait POUTINE aujourd'hui au XXIe siècle. Je ne pourrais simplement pas raconter la véritable histoire aujourd'hui.
Je tiens à vous rappeler, chères et chers collègues, que nous sommes tous liés ici, au Conseil de l'Europe, aux reines du XIe siècle, et je voudrais les nommer : Anne, reine de France, Elizabeth, reine de Norvège et du Danemark, Anastasia, reine de Hongrie, Marguerite, reine d'Écosse. Toutes ont en fait des racines ukrainiennes, nous sommes tous liés. Notre histoire doit être racontée correctement.
Et parce que jusqu'à aujourd'hui, des terroristes comme POUTINE, des terroristes comme LOUKACHENKO, qui s'est attribué 83 % des récentes élections, des gens qui oppriment aujourd'hui les forces démocratiques en Géorgie, tous ces gens essaient de réécrire notre histoire commune. Pour empêcher cela, l'Assemblée souligne, dans les programmes scolaires, la possibilité de manipuler la recherche et les faits, ainsi que les outils de propagande.
C'est pourquoi l'histoire doit être renforcée et enseignée correctement, en particulier celle des XIXe et XXe siècles.
Je voudrais remercier la rapporteure pour son courage et la commission pour avoir élaboré ce texte. Je suis sûre qu'il doit être mis en œuvre par tous nos ministres de l'Éducation, au niveau local et au niveau gouvernemental.
Je vous remercie.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
11:09:32
J'invite maintenant Mme Victoria TIBLOM à prononcer son discours.
Je vous en prie, Madame Tiblom.
Merci, Madame la Présidente.
Mesdames et Messieurs,
« Ceux qui ne se souviennent pas du passé sont condamnés à le répéter » – sages paroles du philosophe George SANTANYA en 1905.
J'ai pensé à cette citation en lisant le rapport de notre rapporteure, Mme Luz MARTINEZ SEIJO, au nom de notre commission de la culture, de la science, de l'éducation et des médias, intitulé « La multiperspectivité dans l’enseignement de la mémoire et de l’histoire au service de la citoyenneté démocratique », qui incite à la réflexion.
La « multiperspectivité » est peut-être un mot nouveau. Il signifie simplement qu'en étudiant différentes périodes ou personnalités historiques, nous ne devons pas le faire d'un seul point de vue, mais de plusieurs – qu'il s'agisse de la guerre civile américaine, de la révolution russe ou de la première guerre mondiale.
Et nous devons le faire en discutant avec d'autres, dans le respect de leurs opinions, qui peuvent être différentes des nôtres, tout comme les nôtres peuvent être parfois divergentes.
Comme le souligne la rapporteure, ce dialogue et cette tolérance sont d'autant plus nécessaires en cette période de tensions internationales en Europe et au-delà, où l'on assiste à une érosion de la démocratie et à une polarisation sociale.
Le fait que le nombre de pays démocratiques diminue au lieu d'augmenter est une évolution très triste qui affectera certainement nos générations futures.
En conclusion, le rapport affirme qu'il est temps de redonner à l'histoire la place qu'elle mérite à tous les niveaux, dans les écoles, les universités et les médias – et je suis tout à fait d'accord.
Merci, Madame la Présidente.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
11:11:36
Je vous remercie.
La parole est à Mme Margo GREENWOOD. Je vous en prie.
Merci, Madame la Présidente.
Chères et chers collègues,
Je tiens tout d'abord à saluer et à remercier la rapporteure, Mme Luz MARTINEZ SEIJO, pour son travail sur le rapport.
En tant que femme autochtone et professeure depuis vingt-sept ans, j'approuve sans équivoque l'inclusion d'histoires sensibles dans les programmes scolaires et la prise en compte de perspectives multiples en tant que moyen fondamental de renforcer la culture démocratique, le pluralisme et les droits humains au sein de la société, et ce pour toutes les raisons que les orateurs précédents ont déjà exposées.
Au Canada, ce fait reste vrai. Depuis la création de l'État du Canada en 1867, plusieurs gouvernements ont été complices et ont commis des actes de violence et de discrimination à l'encontre des peuples autochtones. L'établissement et la scolarisation forcée d'enfants autochtones dans des pensionnats est l'un des chapitres les plus pénibles de la relation entre le Canada et les peuples autochtones.
Au nom de l'assimilation culturelle, l'État a arraché de force des enfants autochtones à leur famille dès l'âge de trois ans pour les placer dans des pensionnats éloignés les uns des autres, où beaucoup ont subi des préjudices inimaginables et ne sont souvent revenus qu'à l'âge de 16 ans – si tant est qu'ils soient revenus.
Entre les années 1870 et 1996, au moins 150 000 enfants des Premières Nations, inuits et métis ont subi ce sort. Au moins 6 000 enfants ont péri à cause de cela. En 2015, la Commission de vérité et de réconciliation (CVR) a publié son rapport final intitulé « Honorer la vérité, se réconcilier pour l'avenir », fruit d'années d'enquête sur les atroces pensionnats canadiens.
Le rapport final contient 94 appels à l'action. Ces appels portent sur différents domaines mis en évidence dans le rapport de Mme Luz MARTINEZ SEIJO, notamment la nécessité pour les pays d'aborder leur passé difficile et sensible par le biais de l'éducation et du souvenir. À titre d'exemple, l'appel à l'action 62 invite tous les gouvernements du Canada à : « l’établissement d’un programme adapté à l’âge des élèves portant sur les pensionnats, les traités de même que les contributions passées et contemporaines des peuples autochtones à l’histoire du Canada ». De nombreuses écoles de par le Canada ont mis en place un programme d'enseignement sur les peuples autochtones.
En ce qui concerne la commémoration, depuis 2021, une journée nationale de la vérité et de la réconciliation a été instaurée le 30 septembre. Beaucoup la connaissent sous le nom de journée des chemises orange, car nous portons des chemises orange en souvenir des enfants des pensionnats et de leurs familles. Nombre de ces appels à l'action n'ont pas encore été pleinement mis en œuvre, mais nous espérons que le Canada continuera à s'attaquer à ces préjudices du passé.
En conclusion, l'éducation et la mémoire jouent un rôle clé pour refermer ces blessures tout en promouvant la démocratie à laquelle nous aspirons tous.
Merci.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
11:15:04
Merci, Madame Greenwood.
Notre prochaine oratrice est Mme Yevheniia KRAVCHUK.
Madame Kravchuk, vous avez la parole.
Merci, Madame la Présidente.
Chers collègues,
Chère Luz,
Merci pour ce rapport.
Vous savez, en Ukraine, nous disons que nos enfants n'ont pas besoin de manuels pour apprendre l'histoire. Ils n'ont qu'à regarder par la fenêtre.
Ma fille aura 11 ans demain. Et c'est en fait le nombre d'années qu'a duré l'occupation, car c'est en février, fin février 2014, que les soldats verts sont apparus en Crimée et que l'annexion a commencé.
Tout d'abord, les occupants ont jeté les livres d'histoire qui se trouvaient dans les écoles. Et maintenant, les camarades de ma fille apprennent dans les écoles que les Ukrainiens ne sont pas une nation, qu'ils n'ont pas de langue. Ces adolescents qui avaient 15 ou 14 ans en 2014 sont maintenant attirés par l'armée russe pour combattre leurs compatriotes ukrainiens.
En fait, la Russie continue de faire ce que l'Union soviétique a fait.
Combien d'entre vous connaissent la contribution des Ukrainiens pendant la seconde guerre mondiale ? Saviez-vous que sept millions de soldats ukrainiens ont servi dans l'armée soviétique ? Saviez-vous que la moitié d'entre eux ne sont pas rentrés chez eux ? Saviez-vous que cinq millions de civils ont été tués ? Un Ukrainien sur quatre a été tué pendant la seconde guerre mondiale.
Mais la Russie tente de privatiser la grande victoire de la seconde guerre mondiale, en oubliant la contribution des autres nations.
En réalité, c'est un soldat ukrainien, un soldat soviétique à l'époque, qui a placé le drapeau de la victoire sur le Reichstag en mai 1945.
Et vous savez ce que la Russie fait d'autre en ce moment ? Elle manipule l'histoire pour justifier son agression. Elle dit en fait que l'Ukraine n'est pas une nation, que les Ukrainiens ne sont pas une nation, que l'Ukraine n'est pas un pays. C'est pourquoi elle peut occuper le pays en oubliant les règles et les frontières internationalement reconnues.
Devrions-nous les laisser faire ? Je vous demande instamment de continuer à soutenir l'Ukraine dans sa lutte pour l'indépendance, pour la souveraineté, parce qu'à l'heure actuelle, votre soutien dépend de ce que vos enfants apprendront dans les livres d'histoire, dans les manuels scolaires sur cette guerre. Que ce soit vous, [ou] ceux qui ont commencé la guerre, comme le disent les Russes – que « les pays de l'OTAN sont les agresseurs », ou nous, [nous pouvons] présenter les faits et la paix sera juste. Nous serons sûrs que nos enfants apprendront une histoire basée sur des faits.
Merci beaucoup et, s'il vous plaît, soutenez la résolution.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
11:18:09
Merci, Madame Kravchuk.
La parole est à Lord Leslie GRIFFITHS.
Madame la Présidente, chers amis et collègues,
L'un des principaux courants de l'historiographie actuelle s'appelle l'histoire post-coloniale et examine la manière dont les pays, souvent représentés dans cet hémicycle même, gèrent les affaires de pays lointains.
Si vous demandez à des historiens, même à des historiens, quelle a été la première défaite significative de NAPOLÉON, par exemple, ils débattront peut-être du retrait de Moscou en 1812 ou de la défaite de Waterloo en 1815. Peu d'entre eux parleraient du 1er janvier 1804, date à laquelle la grande armée de NAPOLÉON a été vaincue par les esclaves en Haïti, Saint Domingue à l'époque, donnant lieu à l'instauration d'une nouvelle république, la République d'Haïti, abandonnée par la France cela fait 200 ans cette année. La France imposa à Haïti le paiement d'une indemnité de plusieurs millions de francs de l'époque, équivalant aujourd'hui à des milliards, en échange de reconnaître l'existence d'Haïti comme État indépendant, ainsi et de recevoir de recevoir de la part d'Haïti trois fois par an une somme d'argent équivalente au total du produit national brut de l'Haïti indépendante. Je pourrais raconter l'histoire avec beaucoup plus de détails, mais cela suffit pour l'instant.
Mais nous pourrions aussi parler de l'humiliation d'Haïti par l'Allemagne avec sa diplomatie du bateau de guerre, qui a sali le drapeau haïtien, imposé des indemnités et des sanctions à Haïti, qui survivait à peine.
Ou d'un diplomate britannique écrivant un livre scandaleux qui a sali la réputation d'Haïti dans les années 1870 et tout cela sans en venir à l'occupation américaine qui a duré 20 ans et qui a tout simplement violé, violé Haïti de toutes ses ressources et lui a imposé des dettes qu'elle n'a jamais pu rembourser.
Vous trouvez étrange que je fasse entrer dans cette auguste Assemblée des récits d'un endroit qui n'a rien à voir avec l'Europe ? Cela a tout à voir avec l'Europe. Et j'ai passé toute ma vie à essayer d'exprimer les besoins de personnes qui n'avaient aucune chance de le faire elles-mêmes.
L'histoire appartient aux puissants, à ceux qui savent écrire, à ceux qui savent organiser. 500 000 esclaves n'avaient aucun de ces privilèges. Il faut apprendre l'histoire pour rendre justice, non seulement aux nations puissantes représentées ici, mais aussi à celles qui n'ont pas de voix, pas de place.
Si je demandais aux gens ici présents de me donner trois mots pour décrire mon Haïti bien-aimé, où j'ai vécu pendant dix ans, si je demandais à tout le monde ici présent de proposer trois mots, ils seraient tous scandaleux, si l'on en croit les ordures qui sont écrites sur Haïti, qui est un cas désespéré où vivent « les plus misérables de la terre », le pays le plus pauvre du monde occidental et tout ce qui résulte des nations représentées dans cet hémicycle.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
11:21:55
Merci, Lord Griffiths.
L'orateur suivant est M. Konur Alp KOÇAK.
Madame la Présidente,
Chers collègues,
Je tiens à remercier la rapporteure pour ce rapport bien conçu, qui souligne le rôle essentiel de l'enseignement de l'histoire dans la promotion de la citoyenneté démocratique. Dans l'Europe d'aujourd'hui, où les sociétés sont confrontées à une polarisation croissante et où nous assistons à la montée alarmante de la xénophobie, des crimes de haine et de la discrimination, il est essentiel que les jeunes s'intéressent au passé sans préjugés.
L'enseignement de l'histoire doit servir d'outil pour contrer ces tendances à la division, en promouvant la pensée critique, l'empathie et l'appréciation de la diversité. Comprendre les conséquences des préjugés et de l'intolérance est essentiel pour reconnaître les histoires non racontées des minorités opprimées, telles que les Turcs meskhètes, dont l'histoire tragique mérite une attention urgente. Je souhaite attirer l'attention sur les souffrances des Turcs meskhètes et vous rappeler que l'année dernière a marqué le 80e anniversaire de leur déplacement forcé dans le sud-ouest de la Géorgie par le régime soviétique. En 1944, ils ont subi un exil forcé dans des conditions insupportables, entraînant la perte de milliers de vies, des tragédies qui restent largement inconnues et insuffisamment reconnues dans de nombreuses parties du monde.
Aujourd'hui, la communauté meskhète reste dispersée dans plusieurs pays. Bien que des décennies se soient écoulées, les Meskhètes continuent d'être confrontés à des injustices systémiques et aux conséquences durables de leur déplacement forcé.
Je pense qu'il est de la responsabilité morale de cette Assemblée de reconnaître leurs souffrances et de prendre des mesures concrètes pour répondre à leurs doléances. La reconnaissance est une étape cruciale vers la justice et la réconciliation.
Je suis heureux de constater que cette Assemblée s'est déjà penchée sur le sort des Turcs meskhètes en 2005, avec la Résolution 1428, dans laquelle elle invitait les autorités géorgiennes et russes à supprimer les obstacles juridiques et pratiques qui les empêchaient de jouir de leurs droits civiques. Toutefois, ces efforts se sont avérés insuffisants.
C'est pourquoi j'appelle tous les membres de cette Assemblée à soutenir la déclaration écrite que j'ai déposée sur pace-apps, dans le but de rappeler l'un des chapitres les plus sombres de l'histoire. Une forte manifestation de soutien enverra un message clair de reconnaissance et de solidarité et, espérons-le, ouvrira la voie à de nouvelles actions pour remédier à la situation critique des Turcs meskhètes.
Nous vous remercions.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
11:25:09
Merci, Monsieur Koçak.
L'orateur suivant est M. Paweł JABŁOŃSKI.
Il semble qu'il ne soit pas présent, nous passons donc à Mme Esther PEÑA.
Je vous en prie, Madame Peña.
Bonjour à tous,
Félicitations à la rapporteure, car elle a vu juste : liberté, mémoire et responsabilité.
La vraie liberté est celle qui nous permet de voter, de manifester, d'exprimer nos idées et de vivre en accord avec elles, sans craindre la répression et la censure ou que quelqu'un nous tire de notre lit, nous licencie ou nous mette au ban de la société.
Elle nous permet de construire une société libre, une société sans haine, et de créer des alliances sur la base des droits de l'homme et de la coexistence. L'Europe est ce qu'elle est aujourd'hui grâce à une mémoire collective ancrée dans la tolérance, le respect et le souvenir de notre passé. En tant que démocrates convaincus, il est de notre responsabilité d'entretenir et de défendre la mémoire de la résistance contre les barbares.
L'éducation, la pédagogie et les politiques mémorielles sont absolument essentielles pour que les jeunes qui ont grandi dans la démocratie ne tombent pas dans le piège des discours de haine des héritiers de la terreur.
Cette connaissance ne doit pas être simplement transmise, mais nécessite une réflexion profonde dans les salles de classe afin d'apporter des réponses aux questions qui n'ont pas pu être données à l'époque.
Le gouvernement espagnol s'est clairement engagé auprès du système éducatif à diffuser des connaissances sur l'exil, la résistance et la lutte pour recouvrer les libertés et les valeurs démocratiques perdues pendant de nombreuses années. Cette année, cela fait cinquante ans que la dictature s'est effondrée en Espagne. Nous transmettons donc aux nouvelles générations la valeur de la vie en démocratie, en leur rappelant que rien n'est garanti et qu'elles doivent se protéger de ceux qui cherchent à restreindre la liberté en promettant l'ordre ou la richesse, par exemple.
Pourtant, tout le monde en Espagne ne partage pas cette fierté de la liberté démocratique, et je vous rappelle que l'Espagne est le deuxième pays au monde à posséder le plus grand nombre de fosses communes, par exemple celle de la Pedraja à Burgos, la tombe des 45 cerveaux et d'un cœur. Certains dans notre pays ont demandé que nous ne rendions pas hommage aux Espagnols qui ont souffert dans les camps d'extermination nazis.
Plus que jamais, l'éducation et les valeurs civiques sont essentielles pour créer une société pacifique et tolérante, capable de réfléchir de manière critique à un passé terrible, qui éliminera les extrêmes de la dégradation morale causés par la pensée humaine sous des idéologies déshumanisantes et intolérantes, et nous y parviendrons sans aucun doute par la vérité, la justice et la réparation.
Un grand merci.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
11:28:38
Merci, Madame Peña.
Je demande maintenant à Monsieur Damien COTTIER de prendre la parole.
Vous avez la parole Monsieur Cottier.
Merci, Madame la Présidente de séance.
Ce débat est important et il s'inscrit dans un contexte qui le rend d'autant plus important.
J'aimerais remercier la rapporteure pour le travail qu'elle a fait et le fait de mettre ce thème à l'ordre du jour de notre Assemblée une nouvelle fois, parce que notre Assemblée s'est déjà préoccupée de ces questions mais il est important d'y revenir régulièrement dans un contexte historique où ce débat prend une dimension toute particulière.
J'ai la chance d'avoir une formation d'historien et, je dois dire, il est frappant de voir à quel point, quand on travaille dans ce domaine, l'une des choses fondamentales que l'on apprend au tout début d'études d'histoire, c'est l'esprit critique, c'est d'analyser les sources, c'est d'analyser le fait que les sources, même si ce sont des documents véridiques, peuvent vous mentir.
Dans l'histoire du Moyen Âge, par exemple, le début de l'année civique n'était pas toujours le 1er janvier, et donc vous avez un document qui est daté de février d'une année, et puis vous imaginez que c'est l'année qui correspond à notre calendrier d'aujourd'hui ; et en fait, c'est l'année précédente ou l'année suivante. Donc il faut avoir une culture et une capacité d'analyser les choses dans leur contexte. C'est quelque chose qui prend du temps, qui est complexe, mais qui est essentiel dans la société d'aujourd'hui qui est inondée de fausses informations, qui est inondée de préjugés, évidemment, en particulier, sur les réseaux sociaux mais pas uniquement ; même dans la presse de qualité, il arrive que l'on lise des choses qui ne sont pas forcément remises dans leur contexte ou qui sont partiellement justes ou juste seulement avec une perspective.
Et en écoutant le très intéressant débat d'aujourd'hui, je remercie les collègues et les collègues qui se sont exprimés, je repensais en fait à ces deux formidables films du grand réalisateur américain qu'est Clint EASTWOOD, qui a fait ce film qui s'appelle Mémoire de nos pères en français, Flags of Our Fathers dans la version originale ; et Lettres d'Iwo Jima. Ces deux films racontent la même bataille historique, une bataille de la seconde guerre mondiale sur l'île japonaise d'Iwo Jima, une fois avec la perspective des soldats américains et une fois avec la perspective des soldats japonais. Il est fascinant de regarder ces deux films pour voir à quel point la perspective dans laquelle on lit un événement historique dramatique comme celui-là peut complètement changer notre interprétation des événements.
Ce sont donc des choses que l'on doit acquérir, que l'on doit absolument travailler. Il est essentiel, dans le monde très dangereux dans lequel nous vivons, avec cette diffusion voulue par certains autocrates ou par certains populistes, en particulier de fausses informations, que chacune et chacun, pour défendre la démocratie, sache lire, sache interpréter, sache replacer les choses dans son contexte, et l'enseignement de l'histoire y contribue de manière essentielle.
Merci, Madame, de l'avoir rappelé.
Je me réjouis que notre Assemblée le rappelle tout à l'heure de manière forte – avant une commémoration très importante, celle du 80e anniversaire de la libération d'Auschwitz que nous ferons tout à l'heure –, que nous le rappelions de manière forte dans quelques minutes.
Je vous remercie.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
11:31:49
Merci, Monsieur Cottier.
Je demande maintenant à M. Pedro Miguel HACES BARBA de prendre la parole.
Madame la Présidente,
Si vous me le permettez, je voudrais féliciter notre collègue Mme Luz MARTÍNEZ SEIJO pour le travail qu'elle accomplit en tant que rapporteure et vous adresser à tous les salutations respectueuses du Mexique.
Mesdames et Messieurs,
En tant que parlementaires du monde entier, dans le cadre de la récente commémoration de la Journée internationale de l'éducation, le 24 janvier, nous nous sommes exprimés pour défendre le pluralisme et la vérité, au-delà de l'ignorance, de la violence et des menaces, qui sont de plus en plus prégnantes dans le monde conflictuel d'aujourd'hui.
L'éducation devrait être le meilleur vecteur pour transformer la vie des gens dans le sens de l'équité, de l'égalité et du respect. Les voix et les perspectives d'un nouveau développement sont liées de manière à instaurer une paix durable dans un environnement de confiance, de paix et de bien-être pour les générations d'aujourd'hui et de demain.
L'éducation doit se fonder sur une idée pertinente de l'histoire pour construire un nouveau présent et un meilleur avenir. L'éducation doit donc être le pont qui unit les divisions et non un mur qui sépare les gens.
La mémoire historique ne devrait pas être quelque chose d'unilatéral, mais un espace pluriel qui reconnaît les diverses voix et expériences qui font partie de notre passé collectif.
L'histoire n'est pas un récit qui appartient à quelques-uns. C'est une construction sur laquelle chaque société a le droit d'avoir sa propre perspective, en reconnaissant à la fois les réussites et les erreurs qui ont été commises.
Au Mexique, le Gouvernement de notre Présidente, Claudia SHEINBAUM, met en place un modèle éducatif pour les écoles mexicaines, avec une vision historique des grandes transformations qui ont eu lieu dans notre pays. Une vision critique, humaniste et communautaire, basée sur les principes de la pleine autodétermination.
Et ce n'est pas une intervention et une persévérance de notre souveraineté nationale, mais un engagement dans le respect de la dignité humaine, de la culture, de la paix, de la participation et de la transformation de la société, ainsi que du respect de la nature et de l'environnement. Ce qui nous incite à envisager trois propositions : une révision complète de la nature humaniste, la formation continue des enseignants, la coopération internationale.
Tout cela afin de promouvoir la transnationalité, l'échange de matériel didactique et de ressources de recherche, ainsi que la promotion de l'innovation et de la technologie scientifique, à travers des plateformes numériques multilingues permettant aux étudiants d'accéder aux témoignages et autres documents qui enrichissent leur compréhension du passé commun.
À cette fin, il est important de noter les recommandations de l'UNESCO, qui suggèrent de garantir l'intégration de l'intelligence artificielle et de l'apprentissage humain, afin que les étudiants puissent développer les compétences nécessaires pour naviguer dans les complexités de ce monde technologique, en respectant les principes éthiques et en garantissant un accès équitable à ces technologies.
La mémoire historique peut être manipulée par des discours de haine et des récits discursifs. Nous construisons la société non seulement dans l'isoloir, mais aussi dans les salles de classe.
Faisons en sorte que cela devienne une réalité.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
11:35:27
Je vous remercie.
L'orateur suivant est M. Christophe CHAILLOU.
Vous avez la parole.
Madame la Présidente,
Mes chers collègues,
Je veux tout d’abord, à mon tour, féliciter notre collègue Luz MARTINEZ SEIJO pour son rapport qui témoigne du lien tout particulier qui existe entre l’enseignement de l’histoire et la préservation des valeurs démocratiques.
À l’heure où nous commémorons le 80ème anniversaire de la libération du camp d’Auschwitz-Birkenau et où les témoins de cette époque sont de moins en moins nombreux, il est indispensable que nous nous interrogions sur la manière d’entretenir le souvenir de cette tragédie, la Shoah, qui a profondément marqué l’Europe.
Lundi, je participais, dans ma circonscription, à Orléans, dans le Loiret, à une cérémonie de commémoration au Centre d’étude et de recherche sur les camps d’internement dans le Loiret – il y en avait effectivement avec Beaune-la-Rolande et la gare de Pithiviers d'où sont partis des convois avec de nombreux enfants pour Auschwitz –, donc l’un des deux mémoriaux de la Shoah de mon département, en présence de Joseph WEISMANN, qui est l'un des rares enfants survivants de ces déportations de Beaune-la-Rolande, à la suite de la rafle du Vél' d’Hiv en 1942. Des collégiens y participaient, nombreux, et je suis convaincu de l’importance pour les plus jeunes de se rendre sur les lieux de mémoire, d’échanger lorsque c’est encore possible avec les témoins d’événements tragiques mais structurants dans l’histoire de nos nations, de notre continent européen.
Je suis donc très sensible à l’accent mis par notre collègue MARTINEZ SEIJO sur les synergies à développer entre éducation formelle et non formelle, sur la nécessité de partenariats entre les écoles et les institutions culturelles, notamment les musées et lieux de mémoire.
Cette notion même de lieux de mémoire nous invite à mener une réflexion sur la « multiperspectivité », pour reprendre le thème de notre débat. L’historien français Pierre NORA, qui a dirigé d’importants travaux sur les lieux de mémoire, écrivait que « l’histoire s’écrit désormais sous la pression des mémoires collectives », qui cherchent à « compenser le déracinement historique du social et l’angoisse de l’avenir par la valorisation d’un passé qui n’était pas jusque-là vécu comme tel ».
Il expliquait qu’un objet « devient lieu de mémoire quand il échappe à l'oubli, par exemple avec l'apposition de plaques commémoratives, et quand une collectivité le réinvestit de son affect et de ses émotions ».
Le rapport à l’histoire porte ainsi en lui les tensions qui traversent nos sociétés, ce qui est un enjeu à une époque de polarisation accrue dans l’ensemble de nos pays. Il révèle aussi la manière dont nous revisitons notre passé au regard de notre perception des enjeux contemporains. J’en veux pour preuve les débats qui peuvent surgir dans nos communes, villes ou villages sur l’opportunité de maintenir une statue ou le nom d'une rue.
Je partage donc pleinement les orientations de ce rapport, qui invite nos États à développer la prise en compte de perspectives multiples de l'histoire, car cela fait pleinement partie à mes yeux de l’éducation civique, de la construction d’une citoyenneté éclairée, capable d’une analyse critique permettant de comprendre la portée et les conséquences de certains discours, notamment les discours populistes et xénophobes.
Je voterai donc résolument ce projet de texte et le projet de recommandation qui nous sont proposés.
Je vous remercie pour votre attention.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
11:38:47
Merci, Monsieur Chaillou.
L'orateur suivant est Mme Mira NIEMINEN.
Je vous en prie, Madame.
Merci, Madame la Présidente.
Chères et chers collègues,
L'histoire est un sujet extrêmement important. Il ne s'agit pas simplement d'une liste de dates ou d'événements, mais d'une histoire qui raconte d'où nous venons, où nous sommes et où nous allons. L'histoire joue un rôle central dans la construction de l'avenir car, sans compréhension du passé, nous ne pouvons pas prendre de décisions durables et sages pour l'avenir.
L'étude de l'histoire nous permet de comprendre le passé et d'apprendre des erreurs commises par les générations précédentes. L'histoire fournit des exemples de réussites et d'échecs, et ces exemples sont cruciaux pour la construction des sociétés et des nouvelles générations. En sachant pourquoi certains événements ont abouti à des résultats spécifiques, nous pouvons éviter de répéter les mêmes erreurs. L'histoire sert donc à la fois de guide et d'avertissement.
La transmission des connaissances d'une génération à l'autre est essentielle. Si cette chaîne se rompt, nous perdons le lien avec nos racines et nos origines. L'enseignement de l'histoire est un moyen de s'assurer que notre culture et nos valeurs restent vivantes pour les générations futures. Sans cette continuité, nous ne pouvons pas comprendre notre identité commune et notre place dans le monde.
En outre, l'étude de l'histoire nous aide à comprendre les différentes cultures et leurs valeurs. En apprenant l'histoire d'autres pays et d'autres peuples, nous pouvons mieux apprécier leurs points de vue et comprendre pourquoi ils pensent et agissent d'une certaine manière.
L'enseignement de l'histoire ne consiste pas seulement à mémoriser des faits, mais aussi à développer l'esprit critique et les capacités de jugement. Grâce à l'histoire, nous apprenons à poser des questions, à analyser des événements et à comprendre les relations de cause à effet. Ces compétences sont nécessaires dans tous les domaines de la vie.
Par conséquent, l'enseignement de l'histoire ne consiste pas seulement à préserver le passé, c'est un investissement dans l'avenir.
Je vous remercie.
Discours non prononcé (Règlement, Art. 31.2), disponible uniquement en anglais
Discours non prononcé (Règlement, Art. 31.2), disponible uniquement en anglais
(Discours non prononcé, Règlement Art. 31.2)
Merci Mme la Rapporteure pour la qualité de votre travail et de porter ce sujet.
Je crois qu’il va de pair avec l’essence même de notre assemblée : apprendre des erreurs et douleurs du passé afin de ne plus jamais les reproduire et protéger les droits de l’homme. La multiperspectivité est un sujet que je porte dans un combat en France et que je souhaite vous partager.
Vous êtes ici en Alsace, une région qui a souffert de plusieurs guerres et tout singulièrement au cours du XXe siècle. Ici, pendant des décennies, nous avons passé sous silence, un crime de guerre qui s’est déroulé au cours au cours de la Seconde Guerre mondiale en Alsace et dans le département voisin, en Moselle.
Il s’agit du drame de l’incorporation de force des alsaciens et Mosellans dans la Wehrmacht.
Cela a concerné 130 000 hommes. Après la guerre, nous avons collectivement voulu oublier - au nom de bonnes raisons - l’amitié franco-allemande, la construction européenne - mais aussi parce que c’était une douleur tout à fait singulière de porter un uniforme qui n’était pas le vôtre et de combattre contre votre patrie. Comment mettre des mots sur cela ? Comment expliquer que vous n’aviez pas le choix ? Comment aussi être entendu tout simplement ?
Or cette douleur n’a jamais été oubliée par celles et ceux qui l’ont vécu, ni par leurs familles et je voudrais devant les représentants des 46 pays membres du Conseil de l’Europe avoir une pensée pour ces hommes. C’est la première fois que ce drame est évoqué ici.
Si je vous parle de ce conflit, c’est parce qu’il a fallu attendre le mois de novembre 2024, pour que la France reconnaisse ce crime de guerre, et demande à ce qu’il soit enseigné dans les écoles de notre pays.
Notre histoire est complexe il faut la mettre à plat sans tabou, parce que si nous ne le faisons pas alors nous ne rendons pas à tous les citoyens du Conseil de l’Europe leur dignité.
Madame la Rapporteure je souscris ainsi pleinement à votre résolution et notamment son point 3 « traiter de la mémoire et des périodes difficiles et sensibles du passé ». Cela nous permettra de mieux comprendre les épisodes de l’histoire et au-delà d’œuvrer à l’éducation à la citoyenneté démocratique.
(Discours non prononcé, Règlement Art. 31.2)
Monsieur le Président,
Chers collègues,
Selon la deuxième enquête menée en 2018 par l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne : « partout dans l’UE, les personnes d’ascendance africaine doivent faire face à des préjugés largement répandus et fermement ancrés ainsi qu’à l’exclusion. La discrimination et le harcèlement à caractère racial sont monnaie courante. Le taux d’expériences de violence raciste varie, mais atteint jusqu’à 14 %. Le profilage discriminatoire par la police est une réalité commune. Les obstacles à l’inclusion prennent de multiples formes, particulièrement lorsqu’il s’agit de chercher un emploi et un logement. »
Et cela malgré les actes législatifs adoptés en vue de lutter contre la discrimination raciale et les crimes racistes, et malgré divers efforts stratégiques visant à combattre le racisme au niveau de l’UE.
Les sociétés européennes sont actuellement confrontées à une érosion démocratique et à une droitisation accrue. Pour lutter contre ces phénomènes, les jeunes devraient apprendre à explorer le passé sans préjugés et à le relier aux défis contemporains.
Pour moi, l'enseignement de l'histoire est une clé de voûte pour l’éducation à la citoyenneté démocratique.
L’inclusion de parties sensibles et controversées de l’histoire dans les programmes scolaires, dont l’histoire colonial de nos pays, peut jouer un rôle clé dans l’encouragement du respect des opinions différentes, du pluralisme et de la diversité.
Cela renforcerait également la capacité des jeunes à faire la distinction entre les faits, les souvenirs, les interprétations et les perspectives, et à détecter et analyser les distorsions et la propagande.
De la question de l’immigration aux relations internationales, le passé colonial s’impose aujourd’hui dans les débats publics comme un prisme pour appréhender l’actualité. L’école s’y trouve souvent épinglée comme complice d’une histoire au mieux mal enseignée, au pire, occultée.
Le rapport de ma collègue Lopez Seijo est, en ce sens, très éclairant. L’enseignement de l’histoire et son importance pour l’éducation à la citoyenneté démocratique sont au cœur de celui-ci et insiste sur la nécessité d’actualiser le contenu enseigné au sein des États membres du Conseil de l’Europe.
Je salue également le Service de l’Éducation de la Direction générale de la démocratie et de la dignité humaine du Conseil de l’Europe (DGII) et du Comité de direction de l’Observatoire de l’enseignement de l’histoire en Europe, qui ont lancé un processus de consultation sur les défis de l’enseignement de l’histoire ainsi qu’un examen de la situation dans les États membres afin de préparer une nouvelle recommandation du Comité des Ministres au cours de la période 2025-2026.
Discours non prononcé (Règlement, Art. 31.2), disponible uniquement en anglais
(Discours non prononcé, Règlement Art. 31.2)
Monsieur le Président,
Chers Collègues,
Avant d’aborder notre sujet, je tiens à rendre hommage aux victimes des camps de concentration et d'extermination d'Auschwitz. Le 27 janvier dernier marquait le 80ᵉ anniversaire de leur libération. Cette Journée internationale nous rappelle l'importance de préserver l'histoire et de lutter contre l'oubli et la déformation des faits.
Aujourd'hui, nos sociétés européennes sont confrontées à des défis majeurs, tels que l’érosion démocratique et la montée du populisme. Face à ces phénomènes, l'enseignement de l'histoire devienne un outil fondamental dans l'éducation à la citoyenneté des jeunes.
En ce sens, je salue l’engagement du Conseil de l'Europe pour mettre à contribution l'ensemble de ses instances compétentes afin d’accompagner les États membres dans l'amélioration de leurs politiques éducatives.
La tâche est particulièrement déterminante dans les Balkans occidentaux, où les différentes interprétations de l’histoire se heurtent, exacerbant les tensions et entravant la réconciliation.
L’approche multiperspective de l’histoire et la convergence des mémoires plurielles sont essentielles pour construire un avenir apaisé et prévenir la répétition des erreurs du passé. Plus que jamais, les pays des Balkans occidentaux ont besoin d’un accompagnement renforcé pour surmonter les divisions mémorielles et favoriser la réconciliation.
Je m’engage depuis des années, en tant que parlementaire, en faveur de la réconciliation des histoires plurielles dans les Balkans. En tant que corapporteure d’une mission d’information sur l’avancée des négociations européennes dans cette région, j’ai souligné, dans l’une de mes recommandations, l’importance de doter l’Observatoire de l’enseignement de l’histoire en Europe d’outils efficaces. Ces outils permettront d’accompagner les pays des Balkans sur le chemin de la réconciliation.
Dans cette perspective, cette proposition de résolution va dans la bonne direction, celle d’une compréhension mutuelle de l’histoire, essentielle pour bâtir un avenir harmonieux et éviter que les tragédies du passé ne se reproduisent.
Je vous remercie.
(Discours non prononcé, Règlement Art. 31.2)
Monsieur le Président,
Mes chers collègues,
Le rapport qui nous est présenté aujourd’hui par notre collègue Luz Martinez Seijo montre l’intérêt que porte notre organisation à l’enseignement de l’histoire et je m’en félicite.
Traiter de la mémoire et des périodes difficiles du passé, parfois troubles, est toujours délicat. D’autant plus délicat que nous réinterprétons sans cesse ce passé avec nos yeux contemporains.
L’exemple du Mémorial de Srebrenica, que les autorités de Bosnie-Herzégovine demandent obligatoirement aux élèves de l’enseignement secondaire et aux étudiants de visiter, ce que refusent d’organiser les autorités de la République serbe de Bosnie-Herzégovine qui ne reconnaissent pas ce génocide, est une illustration très symbolique de cette tension qui peut traverser nos pays.
Je veux ici rendre hommage aux professeurs d’histoire qui inculquent à nos enfants une culture et un regard critique indispensable pour assurer l’avenir de nos démocraties.
Le Conseil de l’Europe a mis en place plusieurs outils ou démarches utiles et je veux en particulier souligner l’intérêt de l’Observatoire de l’enseignement de l’histoire en Europe. Cet accord élargi du Conseil de l’Europe compte aujourd’hui 18 États membres et deux États observateurs. Il est ouvert à tous les États parties à la Convention culturelle européenne. J’invite les États qui ne l’ont pas encore fait à adhérer à cet accord. Créé en 2020, l’Observatoire fournit un panorama de l’état de l’enseignement de l’histoire dans ses États membres, basé sur des données et des faits fiables. Il ne s’agit pas de créer une histoire officielle, mais bien de faire apparaître nos choix, nos structurations de programmes scolaires et ainsi de nous donner la capacité à nous interroger sur les priorités que nous mettons en avant, mais aussi sur les impasses que nous faisons.
Dans un contexte où la société se polarise davantage et où la démocratie est soumise à de nombreuses pressions, l’enseignement de l’histoire sous différentes perspectives me semble de nature à renforcer la cohésion nationale. Mais la fréquentation des musées et des lieux de mémoire est aussi un élément essentiel pour mieux comprendre notre histoire comme l’a mis en évidence le premier forum annuel sur l’éducation historique, organisé par le Conseil de l’Europe en 2022 sur la place des lieux de mémoire.
Ces démarches, cette compréhension historique m’apparaissent indispensables pour promouvoir les valeurs de démocratie et de respect que nous défendons au sein de cette assemblée.
Je voterai donc le texte qui nous est proposé.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
11:41:29
Je vous remercie, Madame.
Chères et chers collègues,
Je dois maintenant interrompre la liste des orateurs.
Les interventions des membres inscrits sur la liste des orateurs qui ont assisté au débat mais n'ont pu s'exprimer peuvent être remises au Service de la séance pour publication au compte rendu.
Je rappelle aux collègues que les textes dactylographiés peuvent être remis, si possible, par voie électronique, au plus tard 4 heures après l'interruption de la liste des orateurs.
La parole est à Mme Luz MARTINEZ SEIJO, rapporteure.
Vous disposez de 3 minutes.
Merci, Madame la Présidente,
Merci beaucoup.
En tant qu'éducatrice et femme politique, je pense profondément à ce soutien unanime de pratiquement chacun d'entre vous concernant mon rapport.
Ce rapport montre des aspects très importants de l'avenir de notre société. Il est clair que nous devons commémorer la liberté et la démocratie, qui ne sont pas gratuites. En Espagne, nous le savons très bien. Alors qu'elle se situait au bas de l'échelle des classements internationaux en matière de qualité démocratique, l'Espagne est aujourd'hui l'une des démocraties les plus complètes de ce même classement.
Ce qui est important, c'est de pouvoir transmettre à nos jeunes l'importance de vivre en démocratie, car si l'on a vécu toute sa vie en démocratie, il est facile d'oublier les énormes forces d'un tel système. Cela doit être renforcé par des messages et des choses concernant la sécurité, échangés contre une restriction des droits. C'est une menace que l'on retrouve dans toutes nos sociétés aujourd'hui.
L'histoire nous montre cependant que la liberté n'est jamais acquise pour toujours. On peut l'avoir pendant un siècle, puis voir une situation où les démocraties se transforment en dictatures et où les droits d'un Européen sur trois sont supprimés. Cela s'est déjà produit par le passé, mais cela ne doit plus jamais se reproduire.
Ce rapport contient toute une série de recommandations détaillées visant à améliorer l'enseignement de l'histoire et à promouvoir la citoyenneté démocratique. Des programmes plus flexibles qui donnent la priorité aux compétences de développement, en se concentrant sur les besoins des élèves ; l'intégration de l'éducation à la citoyenneté démocratique…
[Le micro de l'oratrice s'éteint momentanément]
… en tant que matière obligatoire et renforçant les compétences pour la citoyenneté démocratique à tous les niveaux de l'éducation, comme nous l'avons mentionné précédemment.
Il est nécessaire d'intégrer la formation des enseignants dans le cadre de référence des compétences pour la culture démocratique. La formation initiale et continue des enseignants avec des méthodologies et des ressources innovantes. Des formes de coopération qui facilitent les alliances entre les écoles, les musées, les institutions, les ONG et les artistes, afin de créer des unités éducatives et d'élaborer des formes d'enseignement de l'histoire plus significatives et plus dynamiques.
Des méthodes informelles pour garantir les ressources et le financement des lieux de mémoire et des musées, et s'assurer qu'ils sont des espaces sûrs pour l'apprentissage de la démocratie. C'est le contraire de ce qui s'est passé au Musée d'histoire du Goulag en Russie, qui a reçu notre prix et dont le directeur a été licencié pour avoir refusé de modifier les textes sur les erreurs de M. Joseph STALINE.
Enfin, je pense au rôle des lieux de mémoire comme espaces de vérité, de réconciliation et de droits humains.
Le rapport tente de fournir un cadre général pour repenser l'enseignement de l'histoire comme un moyen de renforcer la cohésion sociale, d'encourager la diversité sociale et de préparer les générations futures à affronter les défis démocratiques du XXIème siècle.
Je vous remercie.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
11:45:58
Merci, Madame.
Je dois maintenant demander à M. Yunus EMRE s'il souhaite s'exprimer au nom de la commission.
Vous avez la parole.
Türkiye, SOC, Vice-Chairperson of the Committee on Culture, Science, Education and Media
11:46:12
L'enseignement de l'histoire devrait être un élément clé de l'éducation aux droits de l'homme et une base pour que les jeunes développent une citoyenneté démocratique, fondée sur le respect des opinions différentes, le pluralisme, la tolérance et la diversité.
Au sein de notre commission, nous sommes fermement convaincus que la multiperspectivité et le traitement approprié des questions controversées et sensibles dans les cours d'histoire peuvent constituer un outil puissant pour soutenir la paix et la réconciliation dans nos sociétés.
Cependant, dispenser un enseignement de qualité de l'histoire dans les écoles peut s'avérer très difficile en raison de programmes surchargés, de pratiques d'enseignement traditionnelles et, dans de nombreux cas, de systèmes éducatifs très centralisés.
Les systèmes éducatifs doivent donc s'adapter aux changements sociaux et à la diversité croissante de nos sociétés et y répondre de manière adéquate par de nouveaux programmes et des méthodologies interactives.
En septembre 2023, la Conférence permanente des ministres de l'éducation a donné une impulsion politique au renouvellement de la mission civique de l'éducation dans le cadre de la nouvelle stratégie du Conseil de l'Europe pour l'éducation 2024-2030 « Priorité aux apprenants d'abord – L'éducation pour les sociétés démocratiques d'aujourd'hui et de demain ».
Les principes directeurs du Conseil de l'Europe pour un enseignement de l'histoire de qualité et le Cadre de référence des compétences pour la culture démocratique (CRCCD) sont en effet d'excellents outils à promouvoir et à mettre en œuvre à grande échelle dans nos États membres.
Nous proposons dans le projet de résolution que l'éducation à la citoyenneté démocratique soit incluse dans les programmes scolaires, à la fois en tant que matière obligatoire distincte et en tant que partie intégrante d'autres matières pertinentes telles que l'enseignement de l'histoire. Cela devrait se faire à tous les stades de l'éducation formelle (primaire, secondaire et supérieur). Elle devrait également faire partie intégrante de la formation professionnelle et de l'éducation non formelle.
Dans le projet de recommandation, nous demandons au Comité des Ministres d'apporter son soutien et son assistance aux États membres pour qu'ils revoient leurs politiques éducatives et intègrent dans les programmes nationaux d'enseignement les principes directeurs du Conseil de l'Europe pour l'enseignement de l'histoire et le Cadre de référence des compétences pour la culture démocratique.
Pour mener à bien cette importante mission, il est nécessaire de continuer à soutenir financièrement les différentes activités du Conseil de l'Europe relatives à l'enseignement de l'histoire et d'assurer des synergies entre les différents volets du programme intergouvernemental et l'Observatoire sur l'enseignement de l'histoire en Europe.
Nous proposons également d'encourager la création de liens et de transversalités entre les activités du Conseil de l'Europe dans les domaines de la culture, du patrimoine, de l'éducation et de la jeunesse.
Enfin, tous les États membres sont encouragés à adhérer à l'Accord partiel et à participer aux activités de l'Observatoire.
Au nom de la commission de la culture, de la science, de l'éducation et des médias, je vous invite à soutenir les propositions présentées dans les projets de résolution et de recommandation en votant aujourd'hui et demain dans vos parlements.
Je vous remercie de votre soutien.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
11:49:35
Merci, Monsieur Emre.
Chères et chers collègues,
Notre débat est clos et nous allons passer au vote.
La commission de la culture, de la science, de l'éducation et des médias a présenté un projet de résolution sur lequel sept amendements et deux sous-amendements ont été déposés et un projet de recommandation sur lequel aucun amendement n'a été déposé.
Nous allons commencer par examiner le projet de résolution.
Tout amendement approuvé à l'unanimité par la commission saisie au fond n'est pas mis aux voix en séance plénière et est déclaré définitivement approuvé, sauf si dix membres ou plus de l'Assemblée parlementaire s'y opposent.
Je crois comprendre que le président de la commission souhaite proposer à l'Assemblée parlementaire que les Amendements 3 et 4 soient déclarés approuvés.
L' Amendement 1 a également été approuvé à l'unanimité, mais il a été sous-amendé et devra donc être examiné séparément. Je le répète, l'Amendement 1 doit être mis aux voix séparément car nous devons traiter le sous-amendement.
Est-ce bien cela, Monsieur Emre ?
Türkiye, SOC, Vice-Chairperson of the Committee on Culture, Science, Education and Media
11:50:45
Oui, il est approuvé à l'unanimité.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
11:50:49
Je vous remercie.
Si personne ne s’y oppose, je considère ces amendements comme adoptés définitivement. S’il y a une objection, nous devrons vérifier qu’elle a le soutien requis de 10 personnes. Y a-t-il une objection ?
Je ne vois pas d’objection.
Les Amendements 3 et 4 déposés sur le projet de résolution sont donc adoptés définitivement.
J'ai également été informé que la présidente de la commission de la culture, de la science, de l’éducation et des médias souhaite proposer à l’Assemblée de considérer les Amendements 2 et 7 au projet de résolution qui ont été rejetés par la commission à une majorité des deux tiers des suffrages exprimés, comme rejetés par l’Assemblée. L’Amendement 5 a également été rejeté aux deux tiers mais, comme il fait l’objet d’un sous-amendement, nous serons obligés de le prendre séparément.
Est-ce bien le cas, Monsieur le vice-président ?
Türkiye, SOC, Vice-Chairperson of the Committee on Culture, Science, Education and Media
11:52:09
Oui, Madame, c'est vrai.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
11:52:11
Je vous remercie. Si personne ne s'y oppose, je considérerai que les amendements sont rejetés.
Y a-t-il une objection ? Si c'est le cas, nous devrons vérifier que l'objection a le soutien requis de dix personnes. S'il vous plaît, ceux qui s'y opposent peuvent-ils lever la main ? Je ne vois pas d'objection.
Les Amendements 2 et 7 au projet de résolution sont donc rejetés et ne seront pas mis aux voix.
La parole est à Mme Yevheniia KRAVCHUK pour soutenir l' Amendement 1. Vous avez 30 secondes.
Je vous remercie.
L'amendement porte sur la façon dont la Fédération de Russie déforme l'histoire et l'utilise pour justifier l'agression. Il souligne également le rôle de l'histoire fondée sur des preuves pour lutter contre la désinformation, les campagnes que la Fédération de Russie mène contre l'Ukraine et d'autres pays.
Je vous remercie.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
11:53:08
Merci, Madame Kravchuk.
La parole est à Mme Luz MARTINEZ SEIJO, au nom de la commission, pour soutenir le sous-amendement.
Oui, Madame la Présidente,
Nous nous sommes mis d'accord sur un texte en tant que sous-amendement qui est inclus dans le texte proposé par l'amendement, qui rappelle sa Résolution 2558/2024 et sa Recommandation 2280/2024 sur la lutte contre l'identité raciale et culturelle en temps de guerre et de paix.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
11:53:43
Chers collègues,
Quelqu'un souhaite-t-il s'exprimer contre le sous-amendement ? Oui ? Non, personne.
Mme Yevheniia KRAVCHUK souhaite-t-elle donner son avis sur le sous-amendement ?
Je vous en prie.
Je suis d'accord, Madame la Présidente.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
11:54:05
Merci, Madame Kravchuk.
La commission est donc manifestement favorable au sous-amendement.
Je vais maintenant mettre le sous-amendement aux voix.
Le sous-amendement est adopté.
Nous en venons maintenant à l'Amendement principal 1 tel que sous-amendé.
Quelqu'un souhaite-t-il s'exprimer contre l'amendement ? Je ne vois personne.
La commission a accepté à l'unanimité cet amendement et soutient le sous-amendement.
Je mets maintenant l'amendement aux voix, tel que sous-amendé.
L'amendement est adopté.
Chères et chers collègues,
J'ai cru comprendre que M. Pablo HISPÁN souhaitait retirer l'Amendement 6. C'est bien cela ?
Oui.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
11:55:55
D'accord, merci, Monsieur Hispán.
Quelqu'un d'autre souhaite-t-il le reprendre ? Je ne vois personne.
L'Amendement 6 est retiré.
La parole est à M. Pablo HISPÁN pour soutenir l'Amendement 5. Vous avez 30 secondes. Avez-vous inséré votre badge ?
Merci, Madame la Présidente.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
11:57:14
Nous en venons au sous-amendement.
La parole est à Mme Luz MARTINEZ SEIJO pour le soutenir, au nom de la commission.
Vous disposez de 30 secondes.
Oui, nous avons parlé de ne pas changer le terme qu'ils suggèrent, mais plutôt d'ajouter après le texte original de l'amendement, les paroles « victimes de groupes terroristes ».
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
11:57:45
Je vous remercie, Madame.
Quelqu'un veut-il s'exprimer contre le sous-amendement ? Je ne vois personne.
M. Pablo HISPÁN souhaite-t-il donner son avis ?
J'accepte le sous-amendement.
Armenia, EPP/CD, President of the Assembly
11:58:04
Je vous remercie.
La commission est évidemment favorable au sous-amendement.
Je vais maintenant mettre le sous-amendement aux voix.
Le vote est ouvert.
Le Sous-amendement 1 à l'Amendement 5 est adopté.
Nous pouvons maintenant passer à l'Amendement 5 principal tel que sous-amendé.
Quelqu'un souhaite-t-il s'exprimer contre l'amendement ? Je ne vois personne.
La commission a accepté à l'unanimité l'amendement avec le sous-amendement. Je vais maintenant mettre aux voix l'amendement tel que sous-amendé.
L'Amendement 5 tel que sous-amendé est adopté.
Nous allons maintenant procéder au vote sur le projet de résolution contenu dans le Doc. 16090 tel qu'amendé. Une majorité simple est requise.
Le vote est ouvert, chers collègues.
Le projet de résolution figurant dans le Doc. 16090, tel qu'amendé, est adopté.
[Applaudissements]
Nous allons maintenant procéder au vote sur le projet de recommandation figurant dans le Doc. 16090. Une majorité des deux tiers est requise.
Le vote est ouvert.
Le projet de recommandation figurant dans le Doc. 16019 est adopté.
[Applaudissements]
Chers collègues, j'ai proposé que le débat d'urgence intitulé « Engagement européen en faveur d'une paix juste et durable en Ukraine », actuellement prévu à la séance de l'après-midi du jeudi 30 janvier, soit déplacé à la séance du matin.
Quelqu'un s'oppose-t-il à cette proposition ? Personne.
La proposition est donc adoptée.
Je vous remercie, chers collègues.
Greece, EPP/CD, President of the Assembly
12:07:33
Chères et chers collègues,
Bonjour à tous,
Comme prévu à l'ordre du jour, nous allons maintenant nous pencher sur la commémoration du quatre-vingtième anniversaire de la libération du camp d'Auschwitz-Birkenau et entendre plusieurs discours.
Cher Grand Rabbin Meir Lau,
Monsieur le Secrétaire Général,
Chères et chers collègues,
Mesdames et messieurs,
Nous sommes réunis aujourd'hui dans notre hémicycle pour commémorer le quatre-vingtième anniversaire de la libération du camp d'Auschwitz-Birkenau. La présence du Grand Rabbin Yisrael MEIR LAU sous la voûte de cet hémicycle est profondément symbolique. Je décrirais cette salle comme un temple de la démocratie, un lieu central pour vénérer les valeurs partagées de la démocratie européenne. La démocratie européenne, telle que nous la connaissons, serait inimaginable sans un engagement en faveur du souvenir.
Grand Rabbin Meir Lau, je vous exprime ma profonde gratitude pour avoir parcouru une si grande distance afin de partager votre précieux témoignage, la voix vivante de ceux qui ont enduré les horreurs inimaginables de l'Holocauste. Nous écoutons vos paroles avec révérence, nous les enregistrons et nous nous engageons à les transmettre aux générations futures.
« Plus jamais ça »
« Never again »
« Nie wieder »
Malheureusement, la mémoire de la Shoah n'a pas encore transformé ces mots en une réalité durable. Proclamé pour la première fois par les pacifistes après la première guerre mondiale, ce slogan n'a pas empêché la dévastation de la seconde guerre mondiale. La réactivé au lendemain de l'Holocauste et des horreurs des camps de la mort comme Auschwitz n'a pas pu empêché les génocides (au Rwanda et à Srebrenica par exemple).
Même dans le monde d'aujourd'hui, façonné par le progrès et la transformation, le « plus jamais ça » ne nous met pas à l'abri de l'exclusion, de la désignation de boucs émissaires et de l'éruption de la haine à l'égard de certains groupes. Alors que nous nous réunissons pour célébrer le quatre-vingtième anniversaire de la libération d'Auschwitz, nous nous souvenons d'une tragédie si profonde qu'elle défie notre compréhension. L'Holocauste, une attaque dévastatrice contre l'humanité et l'esprit humain, continue d'exiger une réflexion sur la manière dont une telle noirceur a pu émerger.
Nous savons ce qui s'est passé, mais comprenons-nous vraiment pourquoi ? Cette incompréhension ne doit pas nous empêcher de remplir notre devoir de mémoire et d'action. C'est vital pour notre Assemblée, qui doit montrer l'exemple et donner le ton. Elle est tout aussi cruciale pour le soutien et le développement des lieux de mémoire et la nécessité d'intégrer leur histoire dans les programmes d'enseignement. Ce matin même, nous avons débattu et adopté une résolution sur ce sujet crucial.
Même si nous ne comprendrons peut-être jamais totalement l'Holocauste, votre témoignage, Grand Rabbin Meir Lau, ainsi que nos efforts collectifs pour préserver et transmettre la mémoire, porteront leurs fruits.
Votre héritage contribuera à construire et à soutenir une communauté de justes, une communauté qui perdure aujourd'hui et qui continue à s'opposer à la tyrannie et à l'injustice où qu'elles apparaissent. Ils agissent pour nous aujourd'hui et nous donnent l'espoir pour l'avenir.
Je veux y croire de tout mon cœur.
Merci encore, Grand Rabbin Meir Lau, de vous être joint à nous aujourd'hui.
La parole est à M. Alain BERSET, Secrétaire Général du Conseil de l'Europe, pour une déclaration.
Secretary General of the Council of Europe
12:11:52
Cher Grand Rabbin Meir Lau,
Monsieur le Président,
Excellences,
Chères et chers invités,
« Il y a de l'espoir pour votre avenir », dit le livre de Jérémie, et « vos enfants rentreront chez eux. »
C'est par ce passage que le Grand Rabbin Yisrael MEIR LAU, notre orateur principal d'aujourd'hui, commence ses mémoires. Il y a de l'espoir pour votre avenir et vos enfants reviendront à la maison.
Mais trop d'enfants ne sont jamais revenus des camps de concentration et d'extermination nazis. Trop de mères et de pères, de frères et de sœurs, d'oncles et de tantes ont disparu. Des familles entières ont été détruites. C'est pourquoi nous sommes ici aujourd'hui, dans cette salle du Conseil de l'Europe, centre d'action de la démocratie européenne.
Pour rendre hommage aux victimes de l'Holocauste. Pour écouter les survivants qui sont encore parmi nous. Et pour répondre à leur appel à rester vigilants, à ne pas laisser l'histoire se répéter. Ce n'est pas seulement notre devoir, c'est une obligation sacrée.
En ce jour, quatre-vingt ans après la libération d'Auschwitz-Birkenau, nous nous élevons contre la montée de l'antisémitisme. Nous nous souvenons que les crimes de la Shoah ont été commis en Europe, par des Européens. Et nous nous engageons en faveur de nos jeunes et de leur avenir. Je le dis en tant que Secrétaire Général de notre Organisation et en tant que père de trois enfants.
Une nouvelle enquête de la Claims Conference a révélé que de nombreux jeunes Européens n'ont jamais entendu parler de l'Holocauste, dont 46 % ici en France. Ces chiffres choquants sont un signal d'alarme. Que dirait Mme Simone VEIL, survivante française de l'Holocauste et première femme présidente du Parlement européen, à propos de ce moment ?
Elle disait : « Lorsque nous étions au camp, c'était important d'espérer que certaines rentreraient, qu'on sache comment ça s'est passé. »
Il faut savoir ce qui s'est passé à Auschwitz, Birkenau, Buchenwald et dans tous les autres camps de concentration et d'extermination nazis. Et agir pour que cela ne se reproduise plus jamais.
Mesdames et messieurs,
C'est le test qui nous attend, l'une des raisons pour lesquelles nos fondateurs ont créé le Conseil de l'Europe. Parce que lorsque nous laissons l'impunité se perpétuer, nous donnons du pouvoir aux ennemis de la démocratie. Parce que la haine n'a pas sa place sur notre continent.
Et parce que, comme l'a dit lundi M. Marian TURSKI, 98 ans, survivant d'Auschwitz : « N'ayons pas peur de nous convaincre que les problèmes peuvent être résolus entre voisins. »
Je vous remercie.
Greece, EPP/CD, President of the Assembly
12:16:01
Merci, Monsieur le Secrétaire Général.
Chères et chers collègues,
Le Grand Rabbin MEIR LAU va maintenant écouter les interventions des chefs des cinq groupes politiques de cette Assemblée parlementaire.
La parole est à M. Frank SCHWABE, président du Groupe des socialistes, démocrates et verts. Frank.
Monsieur le Président,
Chers invités,
Je m'exprime aujourd'hui non seulement en tant que chef de groupe, mais aussi en tant que président de la délégation allemande. C'est un honneur pour moi.
L'Holocauste est un crime contre l'humanité qui dépasse aujourd'hui encore mon imagination. Il a brutalement coûté la vie à divers groupes de population, dont les LGBTIQ, la communauté des Roms et des gens du voyage, et six millions de Juifs. Il y a tant d'images terribles qui sont gravées dans la mémoire, et il n'y a pas d'images de beaucoup d'autres événements aussi terribles que celui-là.
Cette maison, le Conseil de l'Europe, est construite sur les ruines de la seconde guerre mondiale et de l'Holocauste.
Je me souviens de rencontres avec mon ami M. Emanuelis ZINGERIS, de l'histoire de sa famille, de l'histoire de sa mère, survivante de l'Holocauste à Struthof, près de Danzig. L'histoire du théâtre de Vilnius, qui est aujourd'hui un musée. J'ai eu l'honneur de visiter le musée l'année dernière à l'invitation d'Emanuelis. Merci beaucoup pour cette confiance.
Je me souviens aussi tout particulièrement des histoires des enfants victimes de la folie des nationaux-socialistes allemands ; des petits enfants innocents. Et ce sont les œuvres d'art de Samuel BAK, un artiste impressionnant qui a créé des images qui expriment l'incompréhensibilité de ce génocide et la lutte des Juifs pour leur propre identité que les nazis voulaient effacer. Je vous invite à regarder ces images.
Nous commémorons aujourd'hui la libération du camp de concentration d'Auschwitz-Birkenau. Ces images représentent des prisonniers complètement décharnés, des cadavres, des objets tels que des lunettes et des chaussures, qui sont également gravés dans notre mémoire. La libération, c'était un soulagement. Et avec lui, l'espoir qu'une telle chose ne se reproduira plus jamais. Mais nous devons rester vigilants. Rien n'est fini. Ça continue encore.
C'est pourquoi je voudrais conclure en citant Mme Margot FRIEDLÄENDER, survivante de l'Holocauste, âgée de 103 ans : « Soyez des gens. Soyez prudents. Pensez à vous. Pensez à ce qui s'est passé, ne l'oubliez pas. N'oubliez pas qu'il s'agissait de personnes. Des êtres humains. Nous avons tous le même sang. Pas de sang chrétien, juif ou musulman. Du sang humain. »
Greece, EPP/CD, President of the Assembly
12:19:01
La parole est à M. Pablo HISPÁN, chef du Groupe du Parti populaire européen
Pablo, vous avez la parole.
Merci, Monsieur le Président.
Monsieur le Secrétaire Général,
Mesdames et messieurs,
Monsieur le Grand Rabbin LAU,
Mesdames et messieurs les représentants des familles des défunts et des survivants de la Shoah,
Dans ce temple de la démocratie, comme le Président de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe a appelé cette salle, nous sommes réunis aujourd'hui pour marquer de manière solennelle l'une des périodes les plus noires, voire la plus noire de l'humanité.
Nous pouvons estimer qu'il est de notre devoir de nous réunir pour marquer cet anniversaire. Mais, mes amis, c'est une honte éternelle que les événements que nous nous réunissons pour commémorer aient pu avoir lieu. Cela ne doit pas se reproduire, nous l'avons entendu à maintes reprises. Malheureusement, cela s'est produit sous la forme d'antisémitisme ou de terrorisme, comme nous l'avons vu le 7 octobre.
Au cours de cette semaine, nos médias ont diffusé des images des événements qui se sont déroulés cette semaine à Auschwitz. Un commentateur a déclaré que son regard ne se posait pas sur les dirigeants mondiaux, mais sur les visages des quelques survivants du camp, dont certains reviennent à Auschwitz pour la première fois depuis sa libération.
Ici, dans cette Assemblée, nous avons des parents de victimes de l'Holocauste qui sont membres de cette chambre, comme Frank l'a dit, il y a notre collègue du Groupe du Parti populaire européen, M. Emanuelis ZINGERIS.
Aucun d'entre nous qui n'a pas vécu cette horreur ne peut connaître la douleur des camps, la perte, le tourment émotionnel des familles et des communautés déchirées, l'ignorance et la culpabilité des survivants que portent tant de personnes.
Comme beaucoup nous l'ont rappelé aujourd'hui, ne pas connaître notre histoire nous condamne à répéter les erreurs de notre passé.
C'est pourquoi je remercie tout particulièrement les autorités de l'Assemblée parlementaire et du Conseil de l'Europe d'avoir invité un groupe d'écoliers à cet événement. J'ai hâte d'entendre leur point de vue sur ces événements.
Il est de notre devoir de témoigner des événements du passé et de transmettre cette mémoire aux générations futures.
Au nom des membres du Groupe du Parti populaire européen de l'Assemblée parlementaire, je témoigne du passé. Je m'engage à m'en souvenir et à le partager avec les générations futures.
Je vous remercie.
Greece, EPP/CD, President of the Assembly
12:21:42
Merci, Pablo.
La parole est à M. Iulian BULAI, chef de file de l'Alliance des démocrates et des libéraux pour l'Europe.
Monsieur le Président,
Monsieur le Secrétaire Général,
Cher Grand Rabbin Meir Lau,
Permettez-moi de commencer par citer un extrait de votre remarquable mémoire intitulé Out of the Depths, que je trouve très frappant.
« Aujourd'hui, en repensant aux six années de cette guerre, je me rends compte que la pire chose que j'ai endurée pendant l'Holocauste n'était pas la faim, le froid ou les coups ; c'était l'humiliation. Il était presque impossible de supporter l'impuissance d'une humiliation injustifiée. L'impuissance est liée au déshonneur ».
Auschwitz-Birkenau est un symbole de l'abominable projet politique nazi fondé sur le déshonneur et la déshumanisation de manière méthodique et radicale, transformant les gens en numéros. Notre Organisation a été fondée pour lutter contre l'aberration mise en pratique par cette idéologie extrême.
Aujourd'hui, bien sûr, il n'y a plus de camps de la mort en Europe, mais nous voyons toujours la déshumanisation, le mépris flagrant de la vie humaine, de la liberté, des droits, des sentiments que l'agresseur russe apporte à l'Ukraine, où une fois de plus la mort d'innombrables personnes est considérée non pas comme une tragédie acceptable, mais comme des statistiques.
Pendant trop longtemps, nous avons cru qu'il suffisait de croire que notre sombre histoire ne se répéterait pas. Mais nous voyons que ce n'est pas suffisant. Nous devons faire plus que croire, plus qu'espérer. Nous devons être extrêmement vigilants et nous battre sans relâche pour défendre nos valeurs en matière de droits de l'homme et de libertés individuelles. Aucune idéologie, aucune raison, aucune considération budgétaire ne doit l'emporter.
Nous n'avons aucune excuse.
Mais l'histoire d'Auschwitz-Birkenau a une autre dimension qui résonne avec l'actualité et les débats. Car c'était aussi une leçon cruelle, amère et monstrueuse de la façon dont le progrès technologique peut devenir une source de douleur, de souffrance et cela, s'il n'est pas accompagné d'une perspective humaniste fondée sur les valeurs des droits de l'homme.
Les promesses de l'intelligence artificielle, du big data, des réseaux sociaux et des systèmes automatisés peuvent apporter progrès et prospérité, mais notre quête de progrès technologique ne doit pas être incontrôlée. Elle doit obéir aux idéaux humanistes d'une société juste et libre, fondée sur les principes de la liberté individuelle. Sinon, nous risquons de créer de nouvelles horreurs, comme notre civilisation l'a déjà fait à maintes reprises.
Enfin, aujourd'hui, nous ne pouvons pas éviter la question du populisme d'extrême droite, qui continue de ronger et de corrompre nos sociétés.
Nous espérions que les atrocités de la seconde guerre mondiale seraient un antidote à l'antisémitisme, à la xénophobie et à l'homophobie. Mais aujourd'hui, nous constatons que ce n'est pas le cas. Ce qui est encore plus frappant, c'est que le déni de l'Holocauste, la haine homophobe et xénophobe sont largement répandus et se développent, y compris sur les réseaux sociaux.
C'est pourquoi la commémoration de la libération du camp d'Auschwitz-Birkenau doit rester l'occasion de renouveler notre engagement à lutter contre les discours de haine et les idées d'extrême droite.
Je vous remercie.
Greece, EPP/CD, President of the Assembly
12:25:21
Merci, Iulian.
Au nom du Groupe des conservateurs européens, je donne la parole à la vice-présidente du groupe, Mme Elisabetta GARDINI.
Elisabetta.
Italy, EC/DA, Spokesperson for the group
12:25:36
Merci, Monsieur le Président,
Chères et chers invités,
Chères et chers collègues,
La Shoah est l'un des chapitres les plus sombres de l'histoire de l'humanité, un rappel effrayant de ce qui peut arriver lorsque la haine n'est pas maîtrisée. Mais n'oublions pas ceci : la Shoah n'a pas commencé par des chambres à gaz. Elle a commencé par des mots. Elle a commencé par la propagande, la déshumanisation et l'érosion lente et insidieuse de l'empathie. Elle a commencé par l'étiquetage des Juifs comme l'autre, par une rhétorique haineuse, par la discrimination et par une normalisation du sectarisme qui a ouvert la voie à la violence.
C'est une leçon essentielle pour nous aujourd'hui. Le génocide et l'oppression ne sont pas soudains, ils sont le résultat d'étapes graduelles, chacune érodant les frontières morales. Les mots que nous utilisons sont importants. Le silence face à la haine permet à celle-ci de se développer.
Pourtant, l'antisémitisme, le même poison qui a alimenté la Shoah, est toujours vivant. Il se cache non seulement dans les idéologies extrémistes, mais aussi sous des formes plus subtiles – dans les théories du complot, les stéréotypes désinvoltes et le déni de la souffrance juive. Il est alarmant de constater qu'il est de plus en plus visible dans certaines communautés de migrants en Occident, où les croyances antisémites, souvent importées de régions en conflit, sont laissées à l'abandon. Ce n'est pas une vérité confortable, mais c'est une réalité à laquelle nous devons faire face.
Il est de notre responsabilité de nous opposer à cette haine, d'où qu'elle vienne. L'éducation, le dialogue et le courage sont nos outils. Nous devons enseigner à la prochaine génération que la tolérance n'est pas une faiblesse, mais le fondement d'une société juste. Et nous devons nous opposer ensemble à l'antisémitisme sous toutes ses formes, que ce soit dans la rue, en politique ou en ligne.
La Shoah nous a appris ce que coûte l'indifférence. Ne l'oublions jamais et engageons-nous à être vigilants, à défendre la vérité et l'humanité, afin que « plus jamais ça » ne soit pas une simple phrase, mais une promesse que nous tenons.
Je vous remercie.
Greece, EPP/CD, President of the Assembly
12:28:29
Merci, Elisabetta.
Au nom du Groupe pour la gauche unitaire européenne, M. George LOUCAIDES.
George.
Cyprus, UEL, Spokesperson for the group
12:28:39
Merci, Monsieur le Président,
Chères et chers collègues,
Chères et chers invités, survivants,
Cher Grand Rabbin Meir Lau,
Aujourd'hui, quatre-vingt ans après la libération d'Auschwitz-Birkenau par l'Armée rouge, nous remémorons les souffrances inimaginables endurées par des millions de Juifs, mais aussi par des milliers de communistes, d'antifascistes, de syndicalistes, de Roms, de personnes handicapées, de prisonniers politiques et d'homosexuels qui ont été brutalisés par le IIIe Reich. Nous rendons hommage à toutes les victimes.
Cependant, Auschwitz-Birkenau n'est pas seulement un symbole de souffrance. C'est aussi un témoignage de la force de l'esprit humain, de la résilience de ceux qui ont survécu et des leçons profondes que nous devons retenir pour que l'histoire ne se répète pas.
À l'occasion de la journée internationale de commémoration de l'Holocauste, il est important de rappeler les dangereuses idéologies de haine qui ont donné lieu à de telles horreurs et de prendre la mesure de leur importance historique, car ces atrocités ne sont pas nées dans le vide, mais sont plutôt le résultat de systèmes d'oppression, de discrimination et de déshumanisation profondément enracinés.
En tant que Groupe pour la gauche unitaire européenne, nous soulignons que notre engagement en faveur des droits humains est indissociable de notre lutte contre les systèmes d'inégalité et d'injustice qui imprègnent encore nos sociétés. L'intolérance, le racisme, l'antisémitisme, le fascisme, l'islamophobie et la xénophobie ne sont pas simplement des questions du passé, mais des questions urgentes du présent que nous devons condamner et éradiquer par des actions concrètes.
Chères et chers collègues,
Nous ne devons pas ignorer la montée de l'extrême droite et des mouvements néo-fascistes en Europe, aux États-Unis et ailleurs, qui cherchent souvent à ressusciter les idéologies nazies. Le fascisme du XXIe siècle est une menace non seulement pour la communauté juive, mais aussi pour nos valeurs et principes démocratiques.
Le Groupe pour la gauche unitaire européenne sera solidaire de tous les peuples vulnérables, marginalisés et opprimés, quelle que soit leur origine, et embrassera la diversité.
Je vous remercie.
Greece, EPP/CD, President of the Assembly
12:31:06
Merci, George.
La parole est à Mme Georgina LABODA, qui s'exprimera au nom de la communauté des Roms et des Gens du voyage.
Pouvez-vous, s'il vous plaît, appuyer sur le bouton ?
Un instant, un instant.
Cher Iulian, pouvez-vous lui donner votre badge, s'il vous plaît ? Merci.
Pouvez-vous venir à la tribune ? S'il vous plaît, venez à la tribune. Oui, oui, ici. Merci.
on behalf of the community of Roma and Travellers
12:32:43
Monsieur le Secrétaire Général Berset,
Monsieur le Président de l'Assemblée parlementaire Rousopoulos,
Chères Excellences,
Chers tous,
« Je crains que l'Europe n'oublie son passé et qu'Auschwitz ne fasse que dormir ».
Ce sont les mots poignants de Ceija STOJKA, une survivante rom autrichienne.
En regardant l'Europe et le monde d'aujourd'hui, nous ne pourrions être plus d'accord avec elle. Bientôt, nous entrerons dans une ère sans survivants.
Les témoignages personnels des Roms et des Sintis, et les efforts qu'ils déploient depuis des décennies pour faire la lumière sur les horreurs qu'ils ont endurées pendant l'Holocauste, révèlent non seulement les atrocités, mais aussi la résilience et la force de notre peuple.
L'histoire du peuple rom fait partie de l'histoire européenne. Elle doit être traitée comme telle. Pourtant, aujourd'hui encore, la vérité et la pleine dimension du génocide des Roms pendant l'Holocauste restent insuffisamment reconnues, trop souvent ignorées. C'est le « génocide oublié » du peuple rom.
En tant que jeune Rom, je lance aujourd'hui l'appel suivant : continuez à vous battre dans votre propre pays pour que, dans chaque cours d'histoire, chaque enfant d'Europe apprenne l'Holocauste des Roms et les siècles de discrimination et d'intolérance endurés par les Roms.
Chaque année, le 2 août, l'initiative Dikh He Na Bister rassemble des centaines de jeunes Roms et non-Roms à Auschwitz pour la Journée commémorative de l'Holocauste des Roms.
Nous voulons nous assurer que la mémoire des victimes atteigne les nouvelles générations et crée une alliance pour un avenir inclusif.
Cher Président Rousopoulos, en 2024, pour la première fois, vous avez dirigé une importante délégation de cette Assemblée pour rendre hommage aux victimes roms. Ce fut un message très fort pour les jeunes présents à Auschwitz.
Nous comptons sur le Conseil de l'Europe pour respecter son mandat, pour continuer à plaider en faveur d'une éducation et d'une recherche appropriées sur l'histoire et pour la justice sociale pour les Roms dans toute l'Europe.
Je vous remercie.
Greece, EPP/CD, President of the Assembly
12:35:23
Merci, Madame Laboda.
La parole est à M. Tim STEFANIEK, au nom de la communauté LGBTI.
Je vous invite à vous rendre à la tribune.
Monsieur le Président de l'Assemblée parlementaire,
Monsieur le Secrétaire Général,
Monsieur le Grand Rabbin,
Chers membres du Parlement,
Aujourd'hui, 80 ans après la libération du camp de concentration d'Auschwitz-Birkenau, nous nous souvenons de l'un des chapitres les plus sombres de l'histoire de l'Allemagne et de l'Europe. Nous nous souvenons de toutes les personnes et de tous les groupes sociaux qui ont été persécutés par les nationaux-socialistes de l'Allemagne. Nous nous souvenons également de leur courage, de leur résistance et de leur solidarité.
Je voudrais aujourd'hui me concentrer sur la persécution des personnes homosexuelles, transgenres et intersexuées, qui ont été criminalisées, dénoncées, emprisonnées, torturées et assassinées.
Le triangle rose représente les hommes bisexuels et homosexuels détenus dans les camps de concentration, ainsi que les femmes transgenres qui étaient considérées comme des hommes par le régime et poursuivies en vertu du paragraphe 175.
Ils se sont souvent retrouvés au bas de l'échelle hiérarchique du camp et n'ont reçu que peu de solidarité de la part de leurs codétenus.
Après la libération des camps de concentration, nombre d'entre elles sont restées en prison.
Il a fallu une longue lutte, tant en Allemagne qu'en Europe, pour que leurs persécutions et leurs souffrances soient officiellement reconnues.
Leurs histoires doivent faire partie de notre mémoire collective afin de tirer les leçons du passé pour notre présent et notre avenir politiques.
Dans de nombreuses régions du monde, plusieurs personnes sont toujours criminalisées et, presque partout, elles continuent de subir la discrimination sociale, l'exclusion et la violence, y compris ici en Europe.
Il est de notre responsabilité commune de mettre fin à ces discriminations et de veiller à ce que les personnes queer aient les mêmes possibilités que tous les autres de vivre dans la liberté et la sécurité.
Surtout en ce moment dangereux, où les forces antidémocratiques gagnent en puissance et se frayent un chemin dans les parlements démocratiques d'Europe.
Aujourd'hui et chaque jour, ne nous contentons pas de nous souvenir, agissons.
Travaillons ensemble sans relâche pour une Europe et un monde dans lesquels aucune personne n'est marginalisée ou persécutée en raison de son identité.
Je vous remercie.
Greece, EPP/CD, President of the Assembly
12:38:17
Merci, Monsieur Stefaniak.
Je donne maintenant la parole au Grand Rabbin d'Israël, MEIR LAU, président du Conseil de Yad Vashem et survivant de l'Holocauste.
Grand Rabbin Lau.
(Applaudissements)
Chairman of the Yad Vashem Council
12:38:41
Monsieur le Président de l'Assemblée du Conseil de l'Europe,
Monsieur le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe,
Membres du Conseil de l'Europe venus de tout le Continent,
Invités, dirigeants et amis,
je commencerai par quelque chose de très, très personnel. J'avais six ans lorsque mon père a été tué à Treblinka, avec mon frère, qui n'avait que 13 ans. Ma mère est restée avec nous jusqu'à ce qu'elle meure à Ravensbrück, en Allemagne, à l'âge de 42 ans, alors que j'avais sept ans et demi. À l'âge de sept ans et demi, j'avais donc perdu mon père et ma mère et un frère. Un frère aîné – de 11 ans mon aîné – a sauvé la vie, pendant les trois dernières années où nous sommes restés pendant la guerre, la seconde guerre mondiale, à Piotrków Trybunalski, puis à Częstochowa en Pologne, et enfin à Buchenwald, en Allemagne, où nous avons été libérés par les troupes américaines.
Lorsque j'ai été libéré de Buchenwald, j'avais moins de huit ans. J'étais persuadé que c'était la fin du monde. À la fin, mon frère était très malade, avec plus de 42 degrés de fièvre, avant de se séparer de moi à Buchenwald. Il ne croyait pas qu'il continuerait à exister. Il m'a dit : « Lulek » – c'est mon surnom polonais – « Lulek, ils m'emmènent et nous ne nous reverrons plus jamais ». Je veux te parler très ouvertement – tu es assez adulte pour comprendre – je pense que c'est la fin de tout le peuple juif. Et tu es juif. Tu sais que ton père était le rabbin de Piotrków. Nous sommes juifs. Je ne parlais que le polonais à l'époque. « Je ne crois pas que vous vivrez. Mais au cas où – et il se peut qu'un miracle se produise et que tu restes en vie – tout le monde voudra t'emmener avec eux. J'avais un bon ami en Russie. J'avais un bon ami en France. J'avais des amis partout à Buchenwald, des survivants juifs et non juifs. Ne pars avec aucun d'entre eux. Ne vas jamais avec l'un d'entre eux. Dis-leur gentiment : « Merci, mais je ne viens pas avec vous. »
Je lui ai donc demandé : « Tulek », Tulek c'est Naphtali. « Où dois-je aller ? Dis-moi, où dois-je aller ? » Il m'a dit : « Il y a un endroit pour toi – pour nous. Répète avec moi le nom de ce lieu. Dis-le. '`Ereṣ Yīsraʾel' – la terre d'Israël. » Je l'ai regardé et je n'ai pas compris. Je ne connaissais pas un seul mot d'hébreu. Il m'a dit : « Répète : 'ʾEreṣ Yīsraʾel'. Et si vous survivez, rappelez-vous que c'est votre place – seulement là. Derrière mon manteau, je lui ai demandé : « Tulek, mais pourquoi ʾEreṣ Yīsraʾel ? » Il a répondu : « C'est notre patrie. »
J'ai dit : « Je suis né en Pologne, à Piotrków Trybunalski. En quoi ʾEreṣ Yīsraʾel est-elle ma patrie ? » Il a répondu : « C'est la patrie historique. Et c'est le seul endroit sur Terre où l'on ne tue pas les Juifs. C'est l'endroit pour toi, l'endroit où ils ne tuent pas les Juifs. Souviens-toi, tu iras à ʾEreṣ Yīsraʾel. »
Par miracle, il a vaincu la maladie et nous sommes allés à ʾEreṣ Yīsraʾel avant la création de l'État d'Israël en 1945, nous étions les premiers nouveaux arrivants sur la terre d'Israël après la seconde guerre mondiale. Nous n'étions que des garçons, des enfants, des orphelins, et nous sommes allés là-bas.
Moins de trois ans plus tard, les Nations Unies ont décidé de créer un État juif sur une partie de la terre historique d'Israël – l'État d'Israël. En novembre 1947, l'État d'Israël a été créé. Nous avons dansé dans les rues. Je me souviens de cette nuit-là. J'avais environ 10 ans. Personne n'allait dormir. Toute la population juive – plus d'un demi-million à l'époque – dansait dans les rues toute la nuit. « Nous avons une terre ! Nous avons une maison ! Qu'est-ce qu'une maison ? Personne ne nous tuera plus. Plus de camps de concentration, plus de ghettos. Nous sommes chez nous. » Nous étions si heureux.
Mais au même moment, en 1947 et 1948, sept pays voisins – un peu plus loin, des pays arabes – ont disparu. Ils n'étaient pas d'accord avec la décision des Nations Unies. Et ils nous ont combattus. C'était notre guerre d'indépendance, qui a duré un an et demi. Un an et demi. L'armée était très pauvre. Nous n'avions pas un seul avion à l'époque. Pas même un seul hélicoptère ou quoi que ce soit d'autre. Quelques chars et des héros à pied. Certains d'entre eux portaient des numéros sur leurs bras – des survivants de l'Holocauste, qui se battaient pour eux-mêmes et pour les nouveaux.
Sept pays arabes se sont battus contre nous. Mais récemment, au cours de l'histoire, deux pays très importants, nos voisins les plus proches, ont fait la paix avec nous : l'Égypte et la Jordanie. Jusqu'à ce jour. Nous avons des ambassadeurs à Tel Aviv, à Jérusalem, de tous ces pays, y compris l'Égypte. Et maintenant, nous avons des relations avec d'autres peuples, des peuples arabes – l'Arabie Saoudite, le Bahreïn – qui ont fait la paix avec nous ces dernières années – seulement ces 5 ou 10 dernières années. Nous avons de bonnes relations. J'ai un ami, German, comment s'appelle-t-il ? German ZACHARYAYEV. Il m'a parlé d'un État arabe où tous les habitants parlent l'arabe et sont des islamistes. L'Azerbaïdjan. Ce n'est pas au Moyen-Orient, mais quelque part en Europe, dans l'ancienne Europe. L'Azerbaïdjan. Des amis très proches d'Israël, qui acceptent notre existence, notre indépendance et notre liberté. L'Azerbaïdjan. Souvenez-vous du nom ZACHARYAYEV.
Mais ce n'est pas l'image du monde entier. Dans le monde d'aujourd'hui, certaines personnes – de très nombreuses personnes – ont oublié l'Holocauste, ne connaissent pas la seconde guerre mondiale. Ils ne sont pas dans cette Assemblée aujourd'hui. Ils nient l'avenir et l'existence même du peuple juif jusqu'à ce dernier jour. Ils appellent cela de l'antisémitisme. L'antisémitisme. Qui croirait qu'il y a 80 ans – j'étais à Auschwitz avant-hier, où nous avons parlé des 80 ans de la libération d'Auschwitz. Plus de guerre, plus d'effusion de sang. C'est ce que nous voulions, c'est ce que nous espérions. Mais aujourd'hui, nous parlons à nouveau de liquidation, de guerre, d'effusion de sang.
Je dois vous raconter un petit souvenir qui me vient d'il y a 40 ans. L'Australie, le bout du monde pour nous en Europe. L'Australie. Melbourne, une ville très juive. Melbourne. Après Sydney, Melbourne. J'y étais il y a 40 ans pour une conférence. C'était un samedi, Shabbat. J'y suis allé avec un ami qui m'a suivi de la maison à l'hôtel. Il était presque minuit, vendredi soir. Nous nous sommes arrêtés au feu rouge dans la rue, tous les deux. J'étais habillé comme ici, comme maintenant, avec l'uniforme juif d'un rabbin. Mon ami était habillé presque de la même façon. Une voiture s'est arrêtée. Dans la voiture – une belle voiture – étaient assis deux jeunes gens d'environ 40 ans. Le conducteur a arrêté la voiture. Il avait le feu vert. Mais il s'est arrêté, nous a regardés tous les deux et a crié. Je ne l'oublierai jamais, même si c'était il y a 40 ans. « Juifs ! Avez-vous payé la facture du gaz que vous avez utilisé dans les chambres ? » J'ai regardé mon ami. Il était australien. Peut-être que mon anglais n'était pas assez bon ? Peut-être n'ai-je pas compris ? Si nous avons payé pour le gaz utilisé dans les chambres à Auschwitz, à Majdanek, dans six endroits où le gaz a été utilisé par les nazis pour liquider le peuple juif ? Et nous avons dû payer pour le gaz et nous n'avons pas payé 40 ans après la guerre. « Tu as payé la facture ? »
J'ai demandé à mon ami : « Tu es australien, né ici à Melbourne. As-tu l'habitude d'entendre ce genre d'expressions ? » J'ai dit : « L'Australie ne sait-elle pas ce qu'est la guerre ? L'Australie n'est pas au courant de la seconde guerre mondiale qui s'est déroulée au bout du monde ? » Il m'a répondu : « Malheureusement, j'entends très souvent des mots comme ça. » Aujourd'hui, l'antisémitisme... Vous pouvez parler des mouvements clandestins d'aujourd'hui, qui parlent de la liquidation d'Israël, du peuple juif.
Croyez-moi, je vis en Israël depuis près de 80 ans. Juste après la guerre, comme je vous l'ai dit, les premiers jeunes qui sont venus en Israël après la seconde guerre mondiale. Nous n'avons jamais commencé une guerre. Nous n'avons jamais commencé à nous battre avec aucun de nos voisins. Même les Nations Unies nous ont donné en 1947 un petit pays très étroit. Tel Aviv a été divisée, selon les Nations Unies, entre Jaffa et Tel Aviv, la station arabe et la station juive.
Le seul aéroport d'Israël à l'époque n'était pas entre nos mains – l'aéroport international. Jérusalem n'appartenait pas au peuple juif, selon les Nations Unies en 1947. Jérusalem ne nous appartenait pas. Et malgré cela, nous étions heureux. Comme je vous l'ai dit, nous dansions dans les rues. Et nous n'avons jamais commencé la guerre. Ni la guerre d'indépendance, ni dans les années 1940, ni dans les années 1990 – cinq guerres. Aucune d'entre elles n'a été déclenchée par nous. Croyez-moi, nous voulons la paix. Nous ne paierons pas la facture des chambres à gaz. Nous ne comprenons pas ce que sont les chambres à gaz pour les êtres humains. Est-ce ainsi que les êtres humains se comportent ? Tuer des innocents ? 1 200 000 enfants plus jeunes que moi à l'époque ont été tués par les nazis lors de l'Holocauste et les partenaires.
Nous ne déclencherons jamais de guerre. Nous aimons la paix, nous aimons l'amitié, nous aimons les gens. Et nous avons la Bible, nous avons notre histoire, nous avons notre tradition, celle d'Abraham, d'Isaac, de Jacob, de Moïse, du roi Salomon et de tous les autres dirigeants du peuple juif au cours des 4 000 ans d'existence du peuple juif. Malgré tous les exils et toutes les difficultés. Nous aimons les gens. Nous aimons la liberté. Nous aimons nous aimer les uns les autres, nous respecter les uns les autres.
C'est pourquoi je suis si heureux que vous m'ayez invité à dire ces mots chaleureux, ce que je ressens dans mon cœur. Non, s'il vous plaît. En Europe et dans le monde entier. Nous aimons l'humanité. Nous aimons les gens et nous voulons grandir. Nous voulons que nos enfants connaissent la liberté, la paix et jamais de guerre. Plus jamais. Seulement la paix, l'amitié et l'amour.
Merci beaucoup.
Greece, EPP/CD, President of the Assembly
12:54:52
Merci, Grand Rabbin Meir Lau.
Je vous remercie.
Le Grand Rabbin MEIR LAU a accepté ma proposition d'inviter dans notre hémicycle six élèves de l'enseignement secondaire qui s'adresseront à lui en posant chacun une question. Nous écouterons d'abord la question, puis le Grand Rabbin MEIR LAU répondra à toutes les questions.
Je vous demande donc d'écouter les questions des enfants et d'y répondre ensuite. Je vais maintenant prendre toutes les questions et vous aurez ensuite le temps d'y répondre.
Je demande maintenant à Mme Roubine ASHOR de prendre la parole en premier.
Je suis désolé que nous n'ayons pas pu vous écouter. Rapprochez-vous du micro, s'il vous plaît.
Bonjour.
Qu'est-ce que cette expérience a changé dans votre vision de l'humanité et de la vie en général ?
Greece, EPP/CD, President of the Assembly
12:56:19
Nous passerons ensuite à Mme Salsabil BENSACI.
Bonjour Monsieur,
Quel a été l'événement le plus marquant pendant votre déportation ?
Greece, EPP/CD, President of the Assembly
12:56:36
Merci, Salsabil.
La parole est à M. Zouhir DAHMANI.
Bonjour Monsieur,
Pouvez-vous nous raconter comment s'est passée votre libération du camp de Buchenwald ?
Merci.
Greece, EPP/CD, President of the Assembly
12:56:52
Je vous remercie.
Le suivant est Mme Hoang Phuong Thao HUYNH. J'espère que je l'ai prononcé de la manière la plus appropriée.
Bonjour Monsieur,
Y a-t-il des souvenirs que vous n'avez jamais racontés ?
Greece, EPP/CD, President of the Assembly
12:57:12
Je vous remercie.
Mme Yvette KWADWO.
Bonjour Monsieur.
Était-il possible de se faire des amis dans le camp ?
Greece, EPP/CD, President of the Assembly
12:57:21
Je vous remercie.
Nous accueillons maintenant Mme Lina WANDHAMMER - BENDOU.
Bonjour.
Qu'est-ce qui a été le plus dur quand vous êtes revenu à une vie normale ?
Greece, EPP/CD, President of the Assembly
12:57:34
Je vous remercie donc.
Je tiens à remercier les élèves d'être avec nous.
Grand Rabbin Meir Lau, souhaitez-vous répondre aux enfants ? Oui.
Chairman of the Yad Vashem Council
12:57:46
Je vous remercie pour vos questions.
Je ne suis pas sûr de les avoir toutes saisies mais je vais essayer de répondre à certaines d'entre elles, au moins, dans ce court laps de temps.
Greece, EPP/CD, President of the Assembly
12:58:01
(Rires) Oui. Nous avons cinq minutes.
Chairman of the Yad Vashem Council
12:58:06
Je vais commencer avec la dernière question. Comment était-ce de se faire des amis pendant l'Holocauste ?
Oui. Dès Buchenwald, j'ai été adopté par un jeune homme russe, également présent dans le camp, Feodor MIKHAILICHENKO, de Rostov. Il cuisinait des pommes de terre tous les jours pour moi. Il m'a fait une couverture de laine pour que mes oreilles ne gèlent pas. Il était plus âgé que moi de 10 ans. Il était russe, j'étais juif. Il savait que j'étais juif. Il m'a sauvé la vie et s'est mis en danger pour moi. J'ai rencontré ses filles et son fils, et il est lui-même décédé, comme cela a été mentionné, à Yad Vashem, sur le mont de Yad Vashem, comme l'un des Justes de la guerre.
Oui, nous avions donc pu nous faire des amis pendant la guerre.
Greece, EPP/CD, President of the Assembly
12:59:24
Si vous le souhaitez, je peux vous aider en répétant les questions une par une. Cela vous aiderait-il ?
Chairman of the Yad Vashem Council
12:59:36
Les questions ?
Non, pas toutes les questions.
On m'a demandé quel avait été le moment le plus difficile pendant la guerre.
Un moment que je n'oublierai jamais est, je pense que c'est le plus… pas quand j'ai vu des gens, des enfants, des femmes, des personnes âgées se faire tuer. Nous sommes habitués à voir cela.
Mais il y a un moment et un geste que je n'oublierai jamais, lorsque les Russes se sont approchés de la Pologne, de Piotrków, où je suis né : les Allemands nous ont poussés dans le train pour nous emmener loin de la ville, pour que nous ne soyons pas libres. Nous ne savions pas où ils nous emmenaient. Je suis parti avec ma mère. J'avais sept ans et demi. Mon frère avait déjà 18 ans. Il y avait deux groupes à la gare. Ils nous ont divisés en deux groupes : les hommes et les femmes. Et je suis parti avec ma mère : avec les femmes.
Ma mère était très intelligente. Elle a compris que si les nazis trouvaient le temps de faire deux groupes, nous n'allions pas dans la même direction ; dans le même train, mais pas dans le même wagon. Et les femmes ont été poussées en premier. Les femmes avec des bébés et les hommes pas encore. Elle m'a poussé vers mon frère. Elle a compris que les hommes avaient plus de chance de vivre, de survivre, parce que ce sont des travailleurs ; pas les femmes ni les bébés.
Alors, pour me sauver la vie, elle m'a séparé d'elle. Elle m'a poussé vers mon frère en lui criant : « Tulek ! Naphtali ! Prends l'enfant. Prends le dziecko. Prends l'enfant ! »
On l'a poussée avec les dames vers le wagon. Je criais : « Maman, je veux venir avec toi ! Maman ! »
Et la seule chose que j'ai vue d'elle, c'est sa main. Pour mon frère et moi-même, ça a été le dernier geste que nous avons vu. Le dernier moment où nous l'avons vue dans notre vie.
Ce n'est que bien plus tard, après la guerre, qu'on nous a dit qu'elle avait été tuée à Ravensbrück, dans cette ville allemande, dans le camp avec les femmes. Et nous ne l'avons plus revue.
C'était ce mouvement avec la main, inoubliable pour moi, plus que toutes les six années de guerre. Voilà pour votre question.
Je pense que cela suffira.
Puis-je partir ?
Greece, EPP/CD, President of the Assembly
13:03:24
Grand Rabbin Lau,
Chers participants, invités et collègues,
Je tiens à vous remercier tous d'avoir participé à cette commémoration du 80ème anniversaire de la libération du camp d'Auschwitz-Birkenau.
Mes chers collègues, je vous invite désormais à nous accompagner sur le parvis du Palais de l’Europe pour la suite de la cérémonie.
La prochaine séance publique aura lieu cet après-midi, à 15 h 30, conformément à l’ordre du jour de la présente partie de session.
La séance est levée.