C Exposé des motifs par la rapporteuse,
Mme Err
Chronologie des événements
1. La dernière fois que la commission
des questions juridiques et des droits de l’homme a tenté de modifier les
résolutions de l’Assemblée parlementaire qui régissent la composition
des listes de candidats à la Cour européenne des droits de l’homme
(ci-après: «la Cour»), ses propositions ont été fermement rejetées.
Compte tenu de l’avis de la commission exposé dans le
Doc. 11243 (2007), tel que présenté par le rapporteur de l’époque,
M. Mendes Bota, l’Assemblée a rejeté le projet de résolution proposé
par la commission des questions juridiques et des droits de l’homme
en avril 2007.
2. Par conséquent, la position de l’Assemblée sur la nécessité
pour les Etats de prévoir la présence d’au moins un membre du sexe
sous-représenté à la Cour (toujours des femmes à l’heure actuelle)
sur leur liste de trois candidats au poste de juge à la Cour reste
inchangée.
3. Ce qui a changé c’est que, à la suite de la mise en échec
du projet de résolution de la commission des questions juridiques
et des droits de l’homme lors de l’Assemblée plénière d’avril 2007,
sur la proposition de Malte (le seul pays qui ait – à deux reprises
– présenté des listes de candidats exclusivement masculins au mépris
du Règlement de l’Assemblée), le Comité des Ministres a demandé
à la Cour européenne des droits de l'homme de donner un avis consultatif
sur la question. Cet avis (le premier de la Cour) a été rendu le
12 février 2008 et peut être consulté sur le site Internet de la
Cour
Note. Je souhaiterais souligner que l'avis
a été adressé au Comité des Ministres et revêt un caractère consultatif.
De ce fait, il ne lie pas l'Assemblée
Note.
Position de la commission
4. Cette commission est, en principe,
opposée à toute tentative de diminuer les rares quotas par sexe
que l’Assemblée a mis en place au cours de ces dernières années.
5. Cependant, la commission ne souhaite pas mettre l’Assemblée
en position de conflit ouvert avec le Comité des Ministres, avec
l’un de ses Etats membres, et/ou avec la Cour européenne des droits
de l’homme.
6. Elle est donc disposée à accepter que, dans des cas vraiment
exceptionnels, les Etats soient autorisés à déroger à l’obligation
de prévoir la présence d’un membre du sexe sous-représenté sur leur
liste de candidats à la Cour, si l’Assemblée en décide ainsi.
7. Pour la commission, de tels cas exceptionnels ne peuvent se
présenter que si:
a «la partie contractante
a pris toutes les mesures nécessaires et adéquates en vue d’assurer
la présence du sexe sous-représenté sur sa liste»: en d’autres termes,
la partie contractante doit avoir suivi une procédure, ouverte et
transparente, de sélection des candidats au niveau national et les
deux sexes doivent être représentés de manière équilibrée au sein
de l'autorité/du comité de sélection afin de prévenir toute mesure
discriminatoire fondée sur le sexe;
b «la partie contractante n’a pas été en mesure de trouver
un candidat du sexe sous-représenté qui satisfasse aux exigences
du paragraphe 1 de l’article 21 de la Convention européenne des
droits de l’homme»: en d’autres termes, aucun candidat du sexe sous-représenté
de «haute moralité» et réunissant «les conditions requises pour
l'exercice de hautes fonctions judiciaires» ou étant un «jurisconsulte
possédant une compétence notoire» ne s’est présenté / n'a été trouvé;
c ces cas exceptionnels ont été dûment considérés en tant
que tels à la «double majorité» des membres de la sous-commission
sur l’élection des juges, de la commission des questions juridiques
et des droits de l’homme, et du Bureau de l’Assemblée, et cette
position a été ratifiée par l’Assemblée;
d la commission sur l’égalité des chances pour les femmes
et les hommes a été consultée par le Bureau, en tant que commission
spécialisée des questions d’égalité et donc d’organe le mieux placé
pour donner un avis sur l’existence réelle des cas exceptionnels
invoqués par la partie contractante.
8. La commission n’est pas disposée à accepter que le Bureau
de l’Assemblée, au sein duquel elle est représentée avec la commission
des questions juridiques et des droits de l'homme, ne soit plus
habilité à proposer le rejet d’une liste de candidats. La commission
propose un amendement visant à y remédier (amendement A).
9. Permettez‑moi d’expliquer la position de la commission sur
ce point: la commission des questions juridiques et des droits de
l’homme n’a eu jusqu’à présent aucun pouvoir décisionnel concernant
les listes de candidats à la Cour européenne des droits de l’homme.
C’est le Bureau qui dispose de ce pouvoir (sous réserve de ratification
par l’Assemblée
Note), la sous‑commission sur l’élection
des juges lui adressant directement des recommandations.
10. Cependant, la sous‑commission sur l’élection des juges – tout
en étant politiquement équilibrée – n’assure pas la parité hommes‑femmes.
Alors qu’il est encourageant que la rapporteuse de la commission
des questions juridiques et des droits de l’homme, Mme Bemelmans‑Videc,
suggère dans son exposé des motifs que la sous‑commission invite
le président ou la présidente de la commission sur l’égalité des
chances pour les femmes et les hommes (ou son représentant ou sa
représentante) à participer en qualité d’observateur/observatrice
(sans droit de vote) à un éventuel échange de vues avec le président
ou la présidente de la délégation nationale concernée auprès de
l’Assemblée, cela ne compense pas le fait que la sous‑commission sur
l’élection des juges n’a aucune compétence en matière d’égalité
des sexes. La sous‑commission – et, à ce titre, la commission plénière
– peut donc trouver fort difficile
Note d’évaluer
si oui ou non «la Partie contractante a pris toutes les mesures
nécessaires et adéquates en vue d’assurer la présence du sexe sous‑représenté
sur sa liste», et si oui ou non il est exact que la Partie contractante
«n’a pas été en mesure de trouver un candidat du sexe sous‑représenté
qui satisfasse aux exigences du paragraphe 1 de l’article 21 de
la Convention européenne des droits de l’homme».
11. La commission sur l’égalité des chances pour les femmes et
les hommes souhaiterait donc être formellement associée à la décision
concernant l’existence dans un pays donné de circonstances réellement exceptionnelles,
qui obligeraient ledit pays à présenter une liste de candidats comprenant
exclusivement des membres du sexe sur-représenté. (Cette requête
est reprise à l’amendement B). La commission ne s’oppose pas à ce
que la commission des questions juridiques et des droits de l’homme
prenne part à la procédure de validation, tant que le Bureau n’est
pas exclu de son rôle actuel consistant à proposer à l’Assemblée
le rejet de listes de candidats, et qu’il consulte la seule commission
spécialisée – la présente commission – avant de prendre ses décisions.
12. Je pense qu’il est nécessaire de souligner ici que le fait
d’évaluer si un pays ne peut véritablement pas trouver de ressortissante
suffisamment qualifiée pour être candidate au poste de juge à la
Cour européenne des droits de l’homme n’est pas une simple question
de procédure ou juridique: il s’agit d’une question politique et
d’une question sur l’égalité des sexes. Par conséquent, la commission
sur l’égalité des chances pour les femmes et les hommes (en tant
que commission spécialisée des questions sur l’égalité des sexes)
et le Bureau (en tant qu’organe de l’Assemblée en charge des questions
politiques) doivent être associés.
Conclusion
13. En conclusion, la commission
sur l’égalité des chances pour les femmes et les hommes est favorable au
projet de résolution à la condition que les amendements qu’elle
propose soient acceptés, afin de garantir que le Bureau de l’Assemblée
(où sont représentées à la fois la commission des questions juridiques
et des droits de l’homme et la commission sur l’égalité des chances
pour les femmes et les hommes) conserve ses pouvoirs décisionnels
lorsqu’il s’agit de proposer à l’Assemblée le rejet de listes de
candidats et afin de veiller à ce que la commission sur l’égalité
des chances pour les femmes et les hommes soit consultée avant que
le Bureau prenne position.
Commission saisie du rapport:
commission des questions juridiques et des droits de l’homme
Commission saisie pour avis:
commission sur l'égalité des chances pour les femmes et les hommes
Renvoi en commission: Doc. 11532, renvoi n° 3434 du 18 avril 2008
Avis adopté par la commission le 12 septembre 2008
Secrétariat de la commission: Mme Kleinsorge,
Mme Affholder, Mme Devaux.