L’immunité parlementaire, sous ses deux formes – l’irresponsabilité et l’inviolabilité – est une garantie démocratique, née de la nécessité de préserver l’intégrité des parlements, leur fonctionnement et leurs actions, et de protéger l’indépendance de leurs membres dans l’exercice de leurs fonctions. Les règles relatives à l'immunité parlementaire varient considérablement d'un pays européen à l'autre en fonction de leurs traditions et de leur culture politique.
En outre, et indépendamment des immunités nationales dont ils peuvent bénéficier, les membres de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe sont couverts par des règles spéciales sur l'immunité au niveau européen, établies par l'Accord général sur les privilèges et immunités du Conseil de l'Europe de 1949 (AGPI) et son Protocole additionnel de 1952 (STE nos 2 et 10). Ces règles établissent le même double principe d’irresponsabilité et d'inviolabilité parlementaire et prévoient en outre la libre circulation des membres de l'Assemblée sur le territoire des États membres.
Les dispositions relatives à cette immunité au niveau européen ont ainsi introduit un nouvel élément dans le domaine des privilèges et immunités : « un régime d’immunités particulier, qui répondît aux mêmes exigences que celui des immunités parlementaires traditionnelles, tout en revêtant un caractère international », comme l'indiquent les travaux préparatoires de l’AGPI.
Le Règlement de l’Assemblée précise la procédure à suivre pour lever l’immunité d’un membre de l’APCE, à la demande d’une autorité nationale compétente, ainsi que le rôle du Président dans la défense de l’immunité d’un membre de l’Assemblée qui a été arrêté ou privé de sa liberté de circulation.
Ce dossier présente le cadre réglementaire pertinent ainsi qu'une liste de documents publiés par l'Assemblée parlementaire et d'autres organes du Conseil de l'Europe concernant la portée de l'immunité des membres de l'Assemblée parlementaire.
Le 16 juillet 2024, à la suite de l’arrestation de M. Marcin Romanowski (Pologne, CE/DA), le Président de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE) a adressé une lettre au Président du Sejm polonais, précisant que, en tant que membre de l’Assemblée, M. Romanowski bénéficiait de l’immunité parlementaire conformément aux règles spéciales sur l'immunité au niveau européen. Le même jour, le tribunal de district de Varsovie a confirmé que M. Romanowski ne pouvait pas être détenu, en raison de son immunité européenne, et a ordonné sa libération. Cette décision a été confirmée par une cour d’appel le 27 septembre 2024.
À la suite d'une demande adressée au Président de l'Assemblée par le ministre de la Justice et procureur général de la République de Pologne, M. Adam Bodnar, le 29 septembre 2024, l'Assemblée a décidé, trois jours plus tard, le 2 octobre 2024, de lever l'immunité de M. Romanowski « afin de permettre à la justice de suivre son cours ».
Après avoir examiné la validité de la demande – à savoir qu'elle ne soit pas motivée par des raisons autres que la justice – l'Assemblée, sur la base d’un rapport de sa Commission du Règlement, des Immunités et des Affaires institutionnelles, rédigé par Mme Heike Engelhardt (Allemagne, SOC), a conclu qu'« il n'existe pas de raisons suffisantes pour douter de la sincérité de l'intention de la poursuite » à l'encontre de M. Romanowski, visant uniquement la bonne administration de la justice.
Le Président de l’Assemblée a communiqué cette décision au ministre Bodnar le jour même.
En 1994, Paolo Caccia, membre de la délégation italienne auprès de l'APCE, a été arrêté après avoir perdu son siège parlementaire à la suite de la dissolution du parlement italien.
Le Président de l'Assemblée de l'époque a rappelé aux autorités italiennes que M. Caccia continuait de bénéficier de ses immunités de l'APCE et il a été libéré par décision judiciaire en mai 1994.
Comme l'illustre cet exemple, l'immunité n'est pas un privilège conféré à une personne, mais vise plutôt à préserver le bon fonctionnement d'une institution démocratique. Personne ne peut l'invoquer pour commettre un crime, mais personne ne peut l'ignorer non plus. Lorsque les procédures judiciaires nationales ne sont pas inspirées par d'autres raisons que celle de rendre la justice, l'immunité devrait être levée.
Résolution 2572 (2024) Demande de levée de l'immunité de M. Marcin Romanowski
Avis au Bureau de l’Assemblée parlementaire sur le statut de Mme Nadiia Savchenko au regard de l’immunité du Conseil de l'Europe
Extraits pertinents
Résolution 2392 (2021) et Doc. 15364 sur les Lignes directrices sur la portée des immunités parlementaires dont bénéficient les membres de l'Assemblée parlementaire
Résolution 2127 (2016), Recommandation 2095 (2016) et Doc. 14076 sur L’immunité parlementaire: remise en cause du périmètre des privilèges et immunités des membres de l’Assemblée parlementaire
Extraits pertinents
Résolution 2087 (2016), Recommandation 2083 (2016) et Doc. 13944 sur Les sanctions prises à l’encontre de parlementaires
Résolution 1490 (2006) et Doc. 10840 sur l’Interprétation de l’article 15.a. de l’Accord général sur les Privilèges et Immunités du Conseil de l’Europe
Extraits pertinents
Résolution 1325 (2003), Recommendation 1602 (2003) et Doc. 9718 (révisé) Doc. 9718 (révisé) sur les Immunités des Membres de l’Assemblée parlementaire
Réponse du Comité des Ministres
Extraits pertinents
Extraits pertinents (texte seulement disponible en anglais)