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Interdiction des bombes à sous-munitions

Avis de commission | Doc. 11929 | 27 mai 2009

Commission
(Ancienne) Commission des migrations, des réfugiés et de la population
Rapporteure :
Mme Claire CURTIS-THOMAS, Royaume-Uni
Origine
Renvoi en commission: Doc. 11213, Renvoi n° 3364 du 25 juin 2007, modifié le 29 septembre 2008. 2009 - Commission permanente de mai

A Conclusions de la commission

1. La commission salue le rapport de la commission des questions politiques sur l’interdiction des bombes à sous-munitions.
2. La commission se réjouit qu’un grand nombre de ses principales préoccupations aient été prises en compte dans le rapport, le projet de résolution et le projet de recommandation, notamment les conséquences humanitaires de l’utilisation de bombes à sous-munitions dans les situations de conflit et d’après-conflit.
3. Cependant, la commission reste préoccupée par le fait que, pour les raisons indiquées par le rapporteur de la commission des questions politiques, la catégorie des victimes réelles ou potentielles causées par les bombes à sous-munitions dans les Etats en conflit ou ayant connu un conflit est très vaste. Les Etats devraient prendre des mesures d’urgence, non seulement pour interdire l’utilisation future de bombes à sous-munitions, mais aussi pour remédier aux violations des droits des victimes et à leurs souffrances.
4. Il est judicieux de considérer les conséquences humanitaires des bombes à sous-munitions comme un problème global (en particulier du fait de la prolifération ou du stockage de ces armes). Néanmoins, la commission appelle tous les Etats membres du Conseil de l’Europe à accepter pleinement les obligations qui leur incombent en tant que signataires de traités interdisant les bombes à sous-munitions, ainsi que leurs obligations découlant du droit international humanitaire et du droit international relatif aux droits de l’homme.
5. La commission reste également préoccupée par les rapports publiés par des organisationsNote et des ONGNote internationales faisant état d’un recours des forces russes et géorgiennes à des bombes à sous-munitions lors du conflit d’août 2008. Certains éléments de preuve ont été réunis, notamment des noms de victimes et le modèle précis de bombes à sous-munitionsNote. Les autorités doivent agir d’urgence en Russie et en Géorgie pour réduire l’ampleur de l’impact potentiel des bombes à sous-munitions qui auraient déjà été larguées. Pour cela, il faut que toutes les parties échangent des informations sur toutes les bombes utilisées et sur les zones concernées. La rapporteuse se réfère à ce sujet au paragraphe 24.11. de la Résolution 1648 (2009) de l’Assemblée parlementaire sur les conséquences humanitaires de la guerre entre la Géorgie et la Russie, dans lequel l’Assemblée demande instamment à la Géorgie, à la Russie et aux autorités de fait de l’Ossétie du Sud et de l’Abkhazie «d’échanger leurs informations sur les mines et autres munitions non explosées, et de retirer, avec l’aide de Halo Trust et des autres experts de la région, toutes les munitions non explosées restantes; de s’assurer que toutes les zones de danger sont répertoriées, clôturées et connues des populations locales, et que les programmes de sensibilisation aux dangers de ces restes de munitions se poursuivent à l’intention des personnes à risque, que ce soit des civils, des policiers, des membres des autorités ou autres».
6. La question de savoir qui a la responsabilité d’enlever les mines et les munitions n’ayant pas explosé à l’issue d’un conflit n’est pas toujours simple. Par exemple, en matière de déminage et d’assistance aux victimes, les mécanismes s’appliquant en cas de manquement des Etats qui agissent à titre individuel ou qui envoient des contingents dans le cadre d’organisations internationales doivent être examinés et clarifiés. Dans une affaire, en 2000, huit garçons qui jouaient dans les collines de Mitrovica avaient découvert plusieurs bombes à sous-munitions qui n’avaient pas explosé. Elles avaient été larguées par l’OTAN pendant les opérations de bombardement du Kosovo en 1999. Les enfants avaient commencé à jouer avec. Pensant qu’elles ne présentaient pas de danger, l’un des garçons en avait lancé une en l’air. Elle explosa; un garçon fût tué et son frère fût défiguré et perdit la vue. Les forces françaises de la MINUK avaient omis d’apporter son soutien aux activités de déminage et d’avertir la population locale, car cela n’était pas une «haute priorité». En 2007, la Cour européenne des droits de l’homme a estimé que l’omission litigieuse était attribuable à l’ONU, et non à l’Etat français. Il convient de définir clairement les responsabilités respectives des troupes sur le terrain, des Etats qui envoient des contingents et des organisations dont ils font partie (comme l’OTAN, la MINUK ou l’UNMACC).Note
7. L’exemple ci-dessus concernant les enfants Behrami illustre combien il est important d’informer les populations locales des zones dans lesquelles se trouvent les munitions et des risques courus (cette obligation est inscrite dans la Convention de 1980 sur certaines armes classiques). Les enfants représentent une proportion très élevée de l’ensemble des victimes causées par ces armes qui frappent sans discrimination. Ils sont attirés par les munitions, car elles ont la même forme que des objets du quotidien tels que des balles ou des boîtes. Ils auront par conséquent tendance à toucher et à ramasser des bombes à sous-munitions n’ayant pas explosé, mettant ainsi en danger leur propre vie et celle de tiers. Les personnes qui travaillent dans l’agriculture ou dans la nature sont elles aussi particulièrement exposées. De vastes campagnes de sensibilisation doivent être menées de manière continue, aussi bien à l’intention des adultes que des enfants, tant que la menace des mines et des engins non explosés n’aura pas disparu.Note
8. Le rapport évoque les règles du droit international humanitaire qui fixent des limites au sujet des méthodes et moyens de guerre acceptables, susceptibles d’être utilisés par les Etats. La Convention sur les armes à sous-munitions, qui interdit totalement l’utilisation directe et indirecte des bombes à sous-munitions, entrera en vigueur six mois après avoir été ratifiée par 30 Etats.Note Comme le souligne le rapporteur, elle a été ratifiée par six Etats à l’heure actuelle, dont trois des 47 Etats membres du Conseil de l’Europe.Note
9. La commission encourage les Etats à signer et ratifier la Convention sur les armes à sous-munitions et à réexaminer les raisons avancées pour ne pas le faire. Certains Etats affirment par exemple que leur sécurité nationale serait menacée s’ils ratifiaient la Convention, surtout si leurs ennemis ne l’ont pas fait, ou qu’une telle ratification fait peser une lourde charge sur les Etats possédant d’importants stocks d’armes ou ceux auxquels incombe la responsabilité finale de l’enlèvement des armes et de l’assistance aux victimes. En réponse à ces arguments, il faudrait insister sur le fait que des éléments factuels prouvent clairement la nature catastrophique des armes à sous-munitions et qu’il est également établi que ces armes sont d’un usage militaire limité dans la guerre moderne et constituent de piètres armes défensives. La Convention accorde aux Etats parties un délai de huit ans pour détruire leurs stocks d’armes à sous-munitions, délai qui peut être prolongé de quatre ans. Conformément aux normes internationales relatives aux droits de l’homme qui font obligation aux Etats de s’occuper de leur population, la responsabilité finale de l’enlèvement de ces armes incombe aux Etats affectés, dont la souveraineté est ainsi protégée. En vertu de la Convention, tous les Etats «en mesure de le faire» apportent un soutien technique, matériel et financier aux États touchés par ce problème, et le délai fixé pour le déminage dans un Etat affecté peut être prolongé de cinq ans si le territoire est trop contaminé pour pouvoir être débarrassé de ces armes dans le délai de dix ans.Note

B Propositions d’amendements

Tout en soulignant son soutien au projet de résolution présenté par la Commission des questions politiques, la commission des migrations, des réfugiés et de la population propose les amendements suivants:

Amendement A (au projet de résolution)

Au paragraphe 12, à la fin de l’avant-dernière phrase qui se termine par «ainsi qu’une insertion sociale et économique», ajouter ce qui suit:

«Ces victimes des bombes à sous-munitions incluent toutes les personnes qui ont été tuées ou qui ont subi des blessures physiques ou psychologiques, des pertes économiques, une marginalisation sociale ou des atteintes sensibles à leurs droits du fait de l’utilisation de bombes à sous-munitions. Elles incluent les personnes directement affectées par les bombes à sous-munitions ainsi que leur famille et leur entourage.»

Amendement B (au projet de résolution)

Supprimer la dernière phrase du paragraphe 12 et créer un nouveau paragraphe 13, comme suit:

«Dans le nouveau traité, il est demandé aux Etats parties qui sont en mesure de le faire d’apporter un soutien technique, matériel et financier pour aider les autres États parties touchés par le problème des bombes à sous-munitions à mettre en œuvre le traité.»

Amendement C (au projet de résolution)

Créer un nouveau paragraphe après le paragraphe 13, comme suit:

«Lorsque des forces internationales (par exemple l’OTAN ou des organes créés par le Conseil de sécurité de l’ONU ou agissant en vertu de pouvoirs délégués par ce dernier) entreprennent des activités de déminage ou des activités connexes, des règles claires doivent être élaborées en matière de commandement, de contrôle, de responsabilité et de transparence.»

Amendement D (au projet de résolution)

Au sous-paragraphe 14.5, après les mots «d’établir un relevé précis des endroits où elles ont été employées», ajouter ce qui suit:

«et de s’engager à apporter son soutien aux activités de déminage en marquant, en identifiant et en signalant l’emplacement des sites de bombes à sous-munitions, puis à échanger ces informations avec toutes les parties concernées»

Amendement E (au projet de résolution)

Au sous-paragraphe 14.7, après les mots «exposées au danger des bombes à sous-munitions», ajouter ce qui suit:

«et de mener de manière continue de vastes campagnes de sensibilisation, destinées aux enfants et aux autres victimes potentielles, jusqu’à ce que tout risque ait disparu»

***

Commission chargée du rapport: commission des questions politiques

Commission saisie pour avis: commission des migrations, des réfugiés et de la population

Renvoi en commission: Doc. 11213, Renvoi n° 3364 du 25 juin 2007, modifié le 29 septembre 2008

Avis approuvé par la commission le 27 mai 2009

Secrétariat de la commission: M. Neville, Mme Odrats, M. Ekström