Coopération dans le bassin méditerranéen
Recommandation 1249
(1994)
- Auteur(s) :
- Assemblée parlementaire
- Origine
- Discussion par l'Assemblée
le 7 octobre 1994 (31e séance) (voir Doc. 7153, rapport
de la commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire
et des pouvoirs locaux, rapporteur: M. Parisi; Doc. 7155, contribution de la commission
des questions politiques, par M. Kaspereit; Doc. 7157, contribution de la commission
des questions économiques et du développement, par M. Pavlides; Doc. 7147, contribution
de la commission de la culture et de l'éducation, par M. de Puig; Doc. 7160, contribution
de la commission de la science et de la technologie, par M. Inönu;
et Doc. 7136,
contribution de la commission des migrations, des réfugiés et de
la démographie, par M. Cucó). Texte adopté par l'Assemblée le 7
octobre 1994 (31e séance).
- Thesaurus
1. Centre névralgique d'échanges culturels
et économiques, de tensions et de dialogue politique, trait d'union
entre l'Orient et l'Occident, entre le Nord et le Sud, entre peuples
et territoires d'Europe, d'Afrique et d'Asie, la Méditerranée a
toujours été un point de référence pour l'Europe et un espace de
relations privilégiées pour les États riverains.
2. Aujourd'hui, la région méditerranéenne se caractérise notamment
par d'importants écarts de richesse entre les pays riverains. La
situation alimentaire des pays du sud et de l'est du Bassin méditerranéen
ne cesse de se dégrader. Cette situation est en partie imputable
à des politiques de développement centrées sur l'industrialisation
et limitant le rôle de l'agriculture à des fins d'exportation.
3. Par ailleurs, cette région se situe au centre des plus importants
flux migratoires en Europe, en raison notamment des déséquilibres
démographiques et économiques entre les pays de la rive nord et
ceux de la rive sud de la Méditerranée.
4. Tout en poursuivant l'effort d'élargissement du Conseil de
l'Europe et sa coopération avec les pays d'Europe centrale et orientale
-axe prioritaire d'action pour l'Organisation -l'Assemblée considère
le Bassin méditerranéen comme une région d'une importance capitale
pour l'Europe; et cela d'autant plus que cette région connaît aujourd'hui
une grande instabilité politique due notamment aux déficits démocratiques
et aux déséquilibres socio-économiques propres à certains pays méditerranéens.
5. L'Assemblée souhaite, en conséquence, pour contribuer à la
stabilité politique de la région méditerranéenne qu'elle s'est déjà
efforcée de promouvoir dans des prises de position antérieures,
que le Conseil de l'Europe (dont d'autres instances, telles que
le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux de l'Europe (CPLRE)
ou le Centre européen pour l'interdépendance et la solidarité mondiales,
s'intéressent également à la coopération méditerranéenne) consacre
une plus grande attention à cette région frontière.
6. La région méditerranéenne a un grand potentiel d'échanges
commerciaux, d'investissement et de prospérité. Pour les pays plus
pauvres, l'accès aux marchés européens est essentiel. Toutefois,
il est tout aussi important pour ces pays de parvenir à une plus
grande diversification de leurs économies nationales grâce à des
réformes structurelles et à des échanges plus intensifs entre eux.
7. Au niveau parlementaire, l'Assemblée soutient pleinement et
souhaite continuer à être associée à l'initiative de l'Union interparlementaire
visant à instituer un processus de coopération méditerranéenne par l'organisation
de conférences interparlementaires sur la sécurité et la coopération
en Méditerranée, à l'instar de la Conférence de Malaga (15-20 juin
1992).
8. Elle a également pris connaissance de la résolution, adoptée
par le Parlement européen le 6 mai 1994, sur la constitution d'une
assemblée méditerranéenne qui, en tant qu'instance de dialogue politique,
aurait pour vocation de rassembler des représentants des parlements
de l'Union européenne et des pays du sud et de l'est de la Méditerranée;
l'Assemblée se propose, à cet égard, de suivre les développements
éventuels de cette résolution et, le cas échéant, de formuler des
propositions concrètes.
9. L'Assemblée note par ailleurs que les ministres des Affaires
étrangères de pays méditerranéens se sont réunis à Alexandrie le
4 juillet 1994, à l'invitation du Président égyptien, M. Hosni Moubarak,
qu'ils se sont prononcés en faveur du développement d'un «Forum
de dialogue et de coopération méditerranéens» et qu'ils ont décidé
de créer des groupes de travail dans différents domaines (politique,
culturel, économique et social) qui concernent le champ d'action
du Conseil de l'Europe en vue de préparer la prochaine réunion ministérielle.
10. L'Assemblée souligne l'importance de la protection de l'environnement
et des ressources naturelles (eau, énergie, sols, forêts), ainsi
que des côtes et de la mer, par une gestion à long terme et selon
le principe d'un développement durable. Les collectivités territoriales
ont un rôle à jouer dans ce domaine, notamment les régions intéressées
aux multiples facettes de la coopération méditerranéenne.
11. En conséquence, l'Assemblée recommande au Comité des Ministres:
i d'inscrire la politique méditerranéenne
du Conseil de l'Europe à l'ordre du jour de sa prochaine session ministérielle
et de charger les Délégués des Ministres:
a de consacrer une réunion spéciale à une réflexion sur
le rôle et l'action du Conseil de l'Europe dans la région méditerranéenne;
b de créer un groupe de travail ad hoc des Délégués des
Ministres chargé du suivi et de la mise en œuvre des propositions
concernant la politique méditerranéenne du Conseil de l'Europe;
c d'identifier les activités existantes concernant la Méditerranée
dans les différents domaines du programme de travail et d'en proposer
de nouvelles portant sur des questions de première importance pour
cette région, telles que l'environnement et l'aménagement du territoire,
la démocratie et l'autonomie locale, la tolérance, la démographie
et les migrations, la jeunesse ou le patrimoine historique et culturel;
d d'encourager -dans l'esprit de la Déclaration finale du
Sommet de Vienne -la coopération dans le domaine des sciences sociales
entre la rive nord et la rive sud de la Méditerranée, afin de mieux pouvoir
combattre les différentes formes de xénophobie, d'intolérance et
de violence raciste ou religieuse;
e de consacrer une attention particulière à l'écosystème
méditerranéen et de mener des études scientifiques afin de mieux
évaluer les conséquences environnementales des phénomènes démographiques
pour la région;
ii de mettre en œuvre la
Recommandation 1221 (1993) relative
au processus de paix au Proche-Orient et de demander aux gouvernements
des États membres d'apporter leur contribution à l'établissement
d'un climat de confiance dans la région;
iii de veiller à ce que le Conseil de l'Europe soit associé
aux réflexions en cours concernant la région méditerranéenne, notamment
au sein de l'Union européenne, de la CSCE, des groupes de travail institués
par le «Forum de dialogue et de coopération méditerranéens» (qui
se réuniront au Portugal à la fin de l'année 1994) et de la prochaine
réunion ministérielle qui se tiendra en France en 1995;
iv d'envisager des modalités appropriées visant à associer
à certaines activités du Conseil de l'Europe les pays méditerranéens
non membres qui appliquent les principes de la démocratie parlementaire,
du respect des droits de l'homme et de la prééminence du droit;
v d'envisager la conclusion d'un accord partiel pour la
coopération méditerranéenne ouvert aux États méditerranéens non
membres du Conseil de l'Europe;
vi d'encourager, dans les domaines qui présenteraient un
intérêt mutuel pour le Conseil de l'Europe et les États méditerranéens
non membres, la signature par ces derniers des conventions ouvertes
(telle la Convention relative à la conservation de la vie sauvage
et du milieu naturel de l'Europe ou la Convention européenne pour
la protection du patrimoine archéologique) et, le cas échéant, de
prévoir l'ouverture d'autres conventions qui pourraient permettre
de faire progresser la coopération méditerranéenne;
vii de soutenir la proposition de la région de Sicile visant
à accueillir une fondation sur les migrations méditerranéennes (figurant
dans la déclaration finale de la 3e Conférence des régions méditerranéennes),
en inscrivant ce projet dans le cadre des activités «démographie»
du programme intergouvernemental, et en particulier du projet III.1
concernant les déséquilibres démographiques entre les pays du Bassin
méditerranéen;
viii de donner son plein appui à l'organisation d'une conférence
internationale sur les problèmes démographiques dans le Bassin méditerranéen,
proposée par le Comité européen sur la population (CDPO), qui devrait
se tenir en Espagne en 1996;
ix d'encourager la coopération des collectivités territoriales
dans le Bassin méditerranéen, de donner suite à cette fin à la proposition
du CPLRE, soutenue par l'Assemblée, d'adopter une convention européenne sur
la coopération interterritoriale ainsi que d'appuyer la rencontre
des villes de la Méditerranée qui aura lieu à Barcelone en mars
1995;
x de donner suite à la proposition faite lors du Symposium
international sur l'interdépendance et le partenariat transméditerranéens
(Rome, 17-19 janvier 1994) d'introduire une composante méditerranéenne
dans le cadre du programme du Centre européen pour l'interdépendance
et la solidarité mondiales;
xi d'inviter les gouvernements des États membres, et en particulier
ceux des pays méditerranéens:
a à
intensifier et à coordonner leur coopération avec les pays méditerranéens,
membres ou non du Conseil de l'Europe, pour contribuer à un développement
démocratique, social et économique durable de cette région, compatible
avec le respect de son environnement;
b à coordonner leurs politiques d'immigration et à accorder
aux immigrés en situation régulière les mêmes droits sociaux et
économiques qu'aux nationaux, voire certains droits politiques, conformément
à la Convention sur la participation des étrangers à la vie publique
au niveau local;
c à proposer au Fonds de développement social des projets
concrets en vue de résoudre les problèmes sociaux que pose la présence
d'immigrés ou de réfugiés sur leur territoire;
d à intensifier le transfert de technologies, surtout dans
le domaine des énergies alternatives, afin de réduire l'écart qui
existe entre les niveaux de développement de la rive nord et de
la rive sud de la Méditerranée;
e à stimuler la coopération entre les centres de recherche
et les universités et, en particulier, à soutenir le programme européen
de formation à la «science du danger: gestion des risques», dans
le cadre des activités de l'Accord partiel du Conseil de l'Europe
EUR-OPA risques majeurs, dont une opération pilote sera menée en
Méditerranée, coordonnée par le Réseau d'universités de la Méditerranée
(UNIMED), membre de la Fédération européenne des réseaux de coopération
scientifique.