C Exposé des motifs par Lord Don Touhig,
rapporteur pour avis
1. Permettez-moi tout d’abord
de féliciter Mme Serap Yaşar (Turquie,
NI) du rapport qu’elle a établi en temps utile pour la commission
des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées. Malgré
les nombreuses réalisations accomplies en Europe ces dernières années
pour remédier aux disparitions d’enfants migrants ou réfugiés, la
situation reste extrêmement grave et les États membres du Conseil
de l’Europe doivent en prendre conscience et redoubler d’efforts
à ce sujet.
2. Les États membres du Conseil de l’Europe ont tous ratifiés
la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant
et se sont engagés à «respecter les droits qui sont énoncés dans
la présente Convention et à les garantir a tout enfant relevant
de leur juridiction, sans distinction aucune, indépendamment de
toute considération de race, de couleur, de sexe, de langue, de
religion, d’opinion politique ou autre de l’enfant ou de ses parents
ou représentants légaux, de leur origine nationale, ethnique ou
sociale, de leur situation de fortune, de leur incapacité, de leur
naissance ou de toute autre situation». Les enfants n’ont pas seulement besoin
d’une protection particulière, ils y ont droit, indépendamment du
fait qu’ils soient accompagnés ou non, qu’ils possèdent des documents
en bonne et due forme ou en soient dépourvus et qu’ils soient dûment enregistrés
ou non (Amendement A). La
Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant fait également
obligation aux États de «rechercher les père et mère ou autres membres
de la famille de tout enfant réfugié en vue d'obtenir les renseignements
nécessaires pour le réunir à sa famille». Ces initiatives devraient bien
entendu être également étendues aux enfants migrants (Amendement B).
3. Afin de remédier au problème des disparitions d’enfants réfugiés
ou migrants, en particulier lorsqu’ils disparaissent de leur famille
d’accueil, vis-à-vis de leur tuteur, des établissements scolaires,
des centres d’accueil ou d’autres structures, il importe de comprendre
les raisons de ces disparitions et de lutter contre les problèmes
concernés en fonction de leur urgence et de leur pertinence. Il
importe également de prendre note des observations des personnes
concernées. Bien que ces personnes soient en situation d’extrême vulnérabilité,
ces observations devraient être recueillies avec l’aide des ONG,
des associations et des autres acteurs qui sont en contact direct
avec les migrants et les réfugiés et doivent être dûment formés
aux approches et aux garanties pertinentes (Amendement
C).
4. Les disparitions d’enfants réfugiés et migrants sont autant
de tragédies humaines. Le fait de ne pas agir pour remédier à ces
disparitions est incompatible avec l’engagement pris par les États
membres du Conseil de l’Europe de défendre les valeurs de la démocratie
et des droits de l’homme. En outre, ce manque d’action représente
également une menace pour le bien-être et la sécurité de nos sociétés.
Les conditions inhumaines d’accueil entraînent des vies brisées
et un gâchis de «capital social». Nous perdons ainsi la possibilité
de contribuer positivement au bien-être des pays d’origine et des
pays de destination. Au lieu de faire naître un sentiment d’appartenance
et de loyauté à l’égard des pays d’accueil, cette situation nourrit
la frustration et le ressentiment. Le fait d’investir des ressources
suffisantes pour remédier à ce problème n’est pas un geste de charité.
C’est à la fois un acte de bon sens et une nécessité. Si nous avons
sérieusement la volonté de remédier à ce problème, nous devons y
consacrer d’urgence des ressources suffisantes (Amendement D).
5. Bien que les données biométriques puissent être utiles pour
identifier les enfants migrants qui ne possèdent pas de pièce d’identité,
leur utilisation suscite de graves préoccupations. Les enfants n’ont
pas toujours connaissance de la procédure de prise des empreintes
digitales et de leur utilité, et il arrive qu’ils redoutent qu’elle
conduise à leur expulsion. En outre, certains enfants présentent
des empreintes digitales endommagées par le travail qu’ils ont exercé
ou le voyage périlleux qu’ils ont entrepris ou parce qu’ils se sont automutilés
délibérément pour éviter qu’on puisse les identifier
Note. D’après les informations dont nous disposons,
des mesures coercitives ou des menaces ont accompagné le processus
de prise des empreintes digitales. L’Agence des droits fondamentaux
de l’Union européenne insiste sur le fait que «la prise de données biométriques
des enfants doit se dérouler dans le respect de la dignité humaine
et être adaptée à leur âge, à leur sexe et à leur maturité». L’Agence
a élaboré des garanties pertinentes pour les enfants lors de la
prise de leurs données biométriques, qui s’ajoutent à la Convention
sur la protection des données (qui prévoit ces garanties)
Note (
Amendement
E et F).
6. Des soins médicaux et psychologiques particuliers et individualisés
doivent être dispensés selon le cas à tous les enfants migrants
sans-papiers, et pas seulement aux enfants qui présentent des besoins
spéciaux (Amendement G).
Il convient toutefois, bien entendu, d’accorder une attention particulière
aux enfants qui présentent des besoins spéciaux.
7. Selon le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés
(HCR), «bien que certains enfants séparés s’avèrent être «accompagnés»
lorsqu’ils arrivent en Europe, les adultes qui les accompagnent
ne sont pas nécessairement capables ou les mieux à même d’assumer
la responsabilité de leur prise en charge. Une «protection internationale»
est indispensable, car les enfants séparés ont quitté la communauté
à laquelle ils appartenaient dans leur pays d’origine»
Note. Il convient d’admettre que les enfants
séparés sont souvent considérés comme étant confrontés aux mêmes
difficultés que celles auxquelles se heurtent les enfants réfugiés
ou migrants non accompagnés (
Amendement
H).
8. L’article 22 de la Convention des Nations Unies relative aux
droits de l'enfant fait obligation aux États de «rechercher les
père et mère ou autres membres de la famille de tout enfant réfugié
en vue d'obtenir les renseignements nécessaires pour le réunir à
sa famille» (Amendement I).
9. Les normes juridiques internationales prévoient la désignation
d’un tuteur dans la procédure dans les meilleurs délais, idéalement
une fois établi que l’enfant est non accompagné ou séparé (la Convention
des Nations Unies relative aux droits de l'enfant préconise d’effectuer
cette désignation avant même de procéder à l’évaluation de l’âge
de l’enfant), et non uniquement à l’arrivée de l’enfant dans le
centre d’accueil ou dans d’autres structures. Un enfant peut toutefois
avoir un autre tuteur ultérieurement, en fonction de l’emplacement du
centre d’accueil, pour des raisons de proximité géographique. Bien
qu’il soit important de veiller à ce que la procédure d’obtention
du statut de migrant soit engagée rapidement, cette rapidité ne
doit pas s’apparenter à une négation de garanties (temps insuffisant
pour préparer le dossier, pour demander une aide juridictionnelle,
pour déposer un recours, etc.) (Amendement
J).
10. Bien que filles et garçons soient tous les deux exposés à
un risque de violence sexuelle, les filles sont particulièrement
vulnérables, étant donné les risques de grossesses non désirées
et les dégâts physiques et psychologiques que cela entraine. La
plupart de la violence sexuelle reste non documentée, pour cause
de peur, honte, désœuvrement, soucis de discrimination et stigmatisation.
Des établissements séparés pour les enfants migrants ou réfugiés
non accompagnés font défaut. Dans beaucoup de cas, ils sont mal
éclairés et les installations sanitaires de base sont loin ou ne
peuvent pas être fermées à clé. Même se baigner le jour peut être
dangereux
Note. Plus généralement, il faut des approches
incluant la dimension de genre dans les procédures concernées, y
compris les procédures de demande d’asile. Il devrait y avoir plus
d’agents et d’interprètes femmes travaillant dans ce contexte
Note. Toutes ces questions devraient être
prises en compte dans le développement de politiques connexes et
l’attribution d’hébergement (
Amendement
K).