Les conséquences de la pandémie de covid-19 sur les droits de l’homme et l’État de droit
Réponse à Recommandation
| Doc. 15398
| 10 novembre 2021
- Auteur(s) :
- Comité des Ministres
- Origine
- Adoptée lors de la
1416e réunion des Délégués des Ministres
(3 novembre 2021). 2022 - Première partie de session
- Réponse à Recommandation
- : Recommandation 2180
(2020)
1. Le Comité des Ministres
a examiné avec attention la
Recommandation 2180 (2020) de l’Assemblée parlementaire intitulée «Les conséquences
de la pandémie de covid-19 sur les droits de l’homme et l’État de droit»
et l’a communiquée au Comité directeur pour les droits de l’homme
(CDDH), au Comité directeur sur l’anti-discrimination, la diversité
et l’inclusion (CDADI), au Comité des conseillers juridiques sur
le droit international public (CAHDI) et au Comité européen des
Droits sociaux (CEDS) pour information et commentaires éventuels.
2. Le Comité reconnaît qu’un nombre sans précédent d’États membres
ont dérogé à leur obligation de garantir certains droits et libertés
au titre de la Convention européenne des droits de l’homme (STE no 5)
en raison des mesures prises pour faire face à la pandémie de covid-19.
Neuf de ces États ont depuis lors retiré leurs notifications, estimant
qu’elles n’étaient plus nécessaires. Tout en reconnaissant la préoccupation
de l’Assemblée parlementaire quant au fait que les dérogations peuvent
représenter un risque pour le maintien de normes communes en matière
de droits de l’homme dans l’ensemble de l’Europe, le Comité des
Ministres rappelle que le droit de déroger aux obligations prévues
par la Convention en vertu de son article 15 est une caractéristique
importante du système de la Convention, permettant l’application
continue de celle-ci et de son mécanisme de contrôle, même dans
les situations les plus critiques. Les décisions d’exercer ce droit
de déroger peuvent être contestées devant les tribunaux nationaux,
et l’ont été, et toute dérogation à la Convention est soumise à
des exigences de forme et au contrôle de la Cour européenne des
droits de l’homme.
3. En ce qui concerne les paragraphes 3 et 4 de la recommandation,
le Comité des Ministres rappelle que des efforts considérables ont
déjà été mis en œuvre pour fournir des orientations aux États membres, notamment
grâce à la publication, par la Cour européenne des droits de l’homme,
du «Guide sur l’article 15 de la Convention européenne des droits
de l’homme – Dérogation en cas d’état d’urgence» et de la fiche thématique
«Dérogation en cas d’état d’urgence», qui renvoient tous deux à
la jurisprudence de la Cour en la matière. Des orientations ont
également été données par la Secrétaire Générale dans les premiers
jours de la crise dans son document d’information intitulé «Respecter
la démocratie, l’État de droit et les droits de l’homme dans le
cadre de la crise sanitaire du COVID-19: Une boîte à outils pour
les États membres», dont la première partie est consacrée à la «Dérogation
en cas d’état d’urgence (article 15, Convention européenne des droits de
l’homme)». La Commission de Venise a également contribué à éclaircir
cette question en adoptant une Liste des critères de l’État de droit,
en réalisant une compilation de ses travaux relatifs à l’état d’urgence,
en lançant un Observatoire sur la mise en œuvre des déclarations
d’état d’urgence et de la législation sur l’état d’urgence dans
les États membres de la Commission de Venise et en publiant un document
intitulé «Respect de la démocratie, des droits de l’homme et de
l’État de droit en situation d’état d’urgence – Réflexions».
4. Pour ce qui est du paragraphe 5 de la recommandation, le Comité
rappelle qu’un travail important a été fourni par différents secteurs
de l’Organisation pour examiner les expériences nationales de réaction
à la pandémie et recenser les bonnes pratiques en la matière, tel
que souligné dans les rapports annuels 2020 et 2021 de la Secrétaire
Générale. Au niveau intergouvernemental, en première étape, des
échanges d’expériences nationales de réactions à la pandémie de
covid-19 ont déjà eu lieu. En particulier, dans le cadre du Comité
directeur sur l’anti-discrimination, la diversité et l’inclusion
(CDADI), les mesures prises par les États membres pour atténuer
l’impact de la pandémie sur les groupes vulnérables ont été compilées
et ont donné lieu à une étude sur laquelle se sont basées les Lignes
directrices du Comité des Ministressur
la défense de l’égalité et la protection contre la discrimination
et la haine pendant la pandémie de covid-19 et d’autres crises similaires
à venir, adoptées le 5 mai 2021. Le Comité met également en avant
les déclarations du Comité de bioéthique (DH-BIO) sur
covid-19
et vaccins: assurer l'équité d'accès à la vaccination pendant la
pandémie actuelle et les pandémies futures, publiées le 22 janvier 2021, et sur les considérations
relatives aux droits de l'homme concernant le «pass vaccinal» et
les documents similaires, publiées le 4 mai 2021; l'avis du Comité des
Parties de la Convention MEDICRIME sur l'application de la Convention
MEDICRIME dans le contexte du covid-19, publié le 8 avril 2020;
et l’observation interprétative sur le droit à la protection de
la santé en temps de pandémie, adoptée par le CEDS le 21 avril 2020,
ainsi que les travaux actuellement menés par le CEDS pour élaborer
des orientations relatives à un large éventail de droits sociaux,
ces droits étant affectés par la pandémie. Dans ce dernier contexte,
le Comité souligne qu’aucun État membre n’a fait usage de la faculté
de déroger à ses obligations au titre de la Charte sociale européenne,
comme le prévoit l’article F de la Charte sociale révisée (article 30
de la Charte sociale de 1961). Le Comité souligne en particulier
la nécessité d’un accès équitable et non discriminatoire à la vaccination,
ainsi que de fournir des informations précises et fiables sur les
vaccins disponibles.
5. Dans le même temps, le Comité des Ministres informe l’Assemblée
parlementaire qu’il prendra dûment en considération sa recommandation
de donner un mandat au ou aux comités intergouvernementaux appropriés
afin d'examiner l'expérience nationale en matière de réponse à la
pandémie de covid-19, en vue de mettre en commun les connaissances
et l'expérience et d'identifier les bonnes pratiques sur la manière d'assurer
une réponse efficace aux urgences de santé publique dans le respect
des droits de l'homme et de l'Etat de droit. De tels travaux relatifs
à la pandémie pourraient être proposés dans le cadre du Programme
et Budget 2022-2025, comprenant éventuellement un rapport sur la
pratique des États membres en matière de dérogations à la Convention
en cas de risques majeurs et l’élaboration d’une boîte à outils
pour l’évaluation des effets, sur les droits de l’homme, des mesures
prises par l’État dans ce type de situation, qui conduiront potentiellement
à l’élaboration d’un instrument non contraignant visant à aider
les États membres à respecter pleinement les droits de l’homme,
la démocratie et l’État de droit en cas de risques majeurs tels
que la crise actuelle liée à la covid-19. A cet égard, le Comité
rappelle sa réponse, adoptée le 17 février 2021, à la
Recommandation 2174 (2020) de l'Assemblée «Enseignements à tirer pour l’avenir
d’une réponse efficace et fondée sur les droits à la pandémie de
covid-19».