Les élections en temps de crise: défis et opportunités
Rapport de synthèse et conclusions de la conférence de Berne (9 et 10 mai 2023)
Rapport d’activité
| Doc. 15791 Add. 1
| 16 juin 2023
1 Introduction
1. Des élections démocratiques
sont les fondements de nos démocraties. Or, des pressions dramatiques se
font jour, qui vont des pandémies sanitaires au retour d’une guerre
à grande échelle en Europe, en passant par les attentats terroristes,
l’ingérence d’États étrangers dans les élections ou encore les catastrophes naturelles.
Si les technologies de l’information et de la communication (TIC)
modernes promettent de nouveaux modes de scrutin, elles sont aussi
synonymes de dangers, car les nouveaux outils de l’intelligence
artificielle (IA) et les cyberoutils élargissent le champ de la
désinformation et de la manipulation avant le scrutin.
2. Ces défis et opportunités ont été examinés lors de la conférence
parlementaire sur «Les élections en temps de crise» (ci-après la
«conférence de Berne»
Note) organisée par l’Assemblée parlementaire
en coopération avec le Parlement suisse les 9 et 10 mai 2023 au
Conseil national suisse à Berne à l’occasion du 60e anniversaire
de l’adhésion de la Suisse au Conseil de l’Europe. L’événement a
rassemblé environ 130 responsables politiques, partenaires institutionnels
du Conseil de l’Europe (Commission de Venise, Congrès des pouvoirs
locaux et régionaux et Direction générale de la démocratie et de
la dignité humaine (DG II), Comité sur l’intelligence artificielle
– CAI), ainsi que des représentants d’administrations électorales, d’organisations
internationales, du monde universitaire et de la société civile,
pour un échange de points de vue sur la manière d’assurer des élections
démocratiques, malgré une période difficile découlant de crises multiples
(voir le programme en annexe 1).
3. La conférence visait à réaffirmer le rôle de premier plan
du Conseil de l’Europe dans le domaine des élections en Europe,
depuis l’élaboration de normes, à commencer par le droit à des élections
libres, garanti par l’article 3 du Protocole n° 1 à la Convention
européenne des droits de l’homme, jusqu’à l’expertise juridique, la
surveillance, l’observation des élections et la coopération technique
dans un large éventail de domaines. Elle a constitué le premier
forum international public permettant de mettre en lumière les travaux
menés par les différentes institutions de l’Organisation dans le
cadre du
cycle
électoral du Conseil de l’Europe lancé à l’automne 2022.
4. Afin d'encourager une participation politique active aux discussions
entre les États membres, une commission ad hoc de 30 membres a été
créée par le Bureau de l’Assemblée en janvier 2023 pour participer à
cette conférence (voir annexe 2), aux côtés de parlementaires suisses,
d’autres membres de l’Assemblée parlementaire et des secrétariats
des délégations nationales. Les discussions ont été retransmises
en direct afin de pouvoir être suivies en ligne. Au terme des deux
journées de conférence, les participant·e·s ont adopté une Déclaration
finale (ci-après la «Déclaration de Berne») jointe au présent rapport
(voir annexe 3).
5. La conférence de Berne a eu lieu une semaine avant le Sommet
des chefs d’État et de gouvernement de Reykjavik et a offert une
occasion supplémentaire d’approuver les «Principes de Reykjavik
pour la démocratie» en amont du Sommet. Les participant·e·s à la
conférence ont souligné la nécessité d’éviter le recul de la démocratie
et d’y résister, y compris dans les situations d’urgence, de crises
et de conflits armés, et ont appelé tous les États membres à s’opposer
fermement aux tendances autoritaires, à permettre et encourager
activement la participation démocratique par l’intermédiaire d’élections
libres et équitables, à respecter les normes pertinentes en matière
de droits humains et à prendre toutes les mesures adéquates pour prévenir
toute ingérence dans les processus électoraux. Dans le même temps,
ils se sont accordés à dire que, si les crises majeures mettent
la démocratie à l’épreuve, elles offrent aussi aux États membres
l’occasion d’apprendre les uns des autres et de s’adapter plus rapidement
aux défis et aux changements.
6. Comme l’a souligné M. Martin Candinas, Président du Conseil
national suisse, dans son allocution de bienvenue, «aucune élection
ne peut garantir à elle seule qu’une démocratie fonctionne bien,
mais une démocratie n’est pas légitime sans élections. Des élections
libres et équitables sont indispensables pour que les citoyens puissent
exprimer leur opinion et prendre des décisions. Les crises, les
catastrophes et les guerres placent les organisateurs œuvrant à
tous les niveaux face à des questions pour lesquelles il n’y a parfois
pas encore de réponses claires. Les innovations, notamment technologiques,
promettent des réponses. Elles promettent de nouveaux modes de scrutin
plus représentatifs. Mais peuvent-elles tenir leurs promesses à
plus long terme?».
7. C'est ce que cette conférence, tombée à point nommé, s'est
attachée à discuter:
- de quelle
manière les crises consécutives, allant d'une pandémie mondiale
à une guerre au cœur de l'Europe, ont-elles eu un impact sur le
fonctionnement des institutions démocratiques, y compris sur le déroulement
correct et périodique des processus électoraux;
- comment les institutions démocratiques se sont-elles efforcées
de trouver un juste équilibre entre les situations d'urgence et
le respect des droits fondamentaux, notamment la liberté d'expression
et de la presse, la liberté de réunion et d'association à des fins
politiques;
- comment définir des mesures susceptibles de renforcer
la résilience des institutions démocratiques lorsqu'elles sont confrontées
à des situations d'urgence ou à des menaces générées par les nouvelles technologies;
- comment assurer la tenue d'élections démocratiques en
temps de crise, dans le plein respect des principes cardinaux du
patrimoine électoral européen, à savoir le suffrage universel, égal,
libre, secret et direct.
8. L’Assemblée parlementaire souhaite remercier ses partenaires
institutionnels, le Parlement suisse, le modérateur David Eades
et tous les intervenants pour leur contribution au succès de cette
conférence historique. Elle remercie tout particulièrement M. Rast’o
Kužel, Rapporteur général de la conférence, d’avoir rédigé la déclaration
finale et d’avoir élaboré le présent rapport.
2 L’impact de la pandémie de covid-19
sur les élections
9. La pandémie de covid-19 a mis
à mal les droits fondamentaux et les normes électorales, ainsi que
les pratiques qui étaient en place avant la pandémie de covid-19,
et elle a conduit à en instaurer de nouvelles. Elle a mis en évidence
de graves lacunes dans les cadres juridiques et a incité de nombreux
pays à repenser la manière de mener des élections sûres, techniquement
fiables et crédibles, tout en s’efforçant de maintenir un équilibre
entre les droits démocratiques et les questions de santé. Malgré
ces défis et la question de savoir s'il faut adapter les élections
prévues ou les reporter, la pandémie a également offert des possibilités
de changements positifs, de partage d'informations sans précédent
et d'innovation.
10. La conférence a rappelé les problématiques qui ont émergé
en lien avec l’état d’urgence, dont la mise en place est soumise
à certaines conditions telles que le respect de l’État de droit,
la nécessité, la proportionnalité, le caractère temporaire, un contrôle
parlementaire et judiciaire efficace, la prévisibilité de la législation
sur les situations d’urgence et une coopération loyale entre les
institutions de l’État. Le domaine des élections ne déroge pas à
ces principes. Les principes fondamentaux du droit électoral, énoncés
à l’article 3 du Protocole n° 1 à la Convention européenne des droits
de l’homme
Note et développés dans le Code de bonne conduite
en matière électorale de la Commission de Venise
Note, doivent être respectés même en cas
d'état d'urgence. Quand bien même l’état d’urgence est proclamé
dans des situations exceptionnelles, il comporte un risque pour
l’équilibre des institutions démocratiques et peut faire pencher
la balance en faveur de l’exécutif. Il importe donc de veiller à
ce que les normes et les valeurs démocratiques soient toujours respectées,
quelles que soient les circonstances.
11. De nombreux pays n’autorisent pas la tenue d’élections pendant
l’état d’urgence. Toutefois, des élections devraient avoir lieu
dès que l’ensemble du processus électoral peut satisfaire aux principes
de base. L’expérience des pays ayant organisé des élections pendant
la pandémie a été étudiée afin d’en tirer des enseignements et de
mettre en lumière les difficultés. Les participant·e·s se sont plus
précisément penchés sur les conclusions et les constats formulés
dans un nouveau rapport publié par International IDEA, intitulé “Elections
during Emergency and Crises: Lessons for Electoral Integrity from
the Covid-19 Pandemic”
Note, qui procède à une analyse thématique
de l’intégrité des processus électoraux pendant la pandémie à l'aide
de 26 études de cas nationales, ainsi qu'un certain nombre de recommandations
utiles.
12. Les pays qui étaient déjà confrontés à une vulnérabilité de
leur système électoral ont eu plus de mal à faire face à ces nouvelles
difficultés, la pandémie aggravant les problèmes existants et en
créant de nouveaux. D’autres pays ont été en mesure d’affronter
la tourmente, soit parce qu’ils n’étaient pas confrontés à une vulnérabilité
préexistante, soit parce que les organismes compétents ont rapidement
pris des mesures, collaboré et communiqué clairement. Certains pays
ont fait preuve d'inventivité en introduisant des méthodes de vote
alternatives. L’utilisation plus large des TIC ou d’autres modes
de scrutin, tels que le vote par correspondance, nécessite toutefois
une réflexion approfondie sur la capacité des États et des organes d'administration
des élections à les mettre en œuvre correctement dans le contexte
donné, tout en garantissant le respect de tous les principes des
élections et des référendums démocratiques.
13. Les participant·e·s ont également discuté de la tentation
des pouvoirs exécutifs d’abuser de leurs pouvoirs à des fins politiques
dans le cadre de l’état d’urgence, ainsi que du rôle important des
médias qui doivent garder une juste mesure, même dans ce type de
situations dans lesquelles les personnes au pouvoir attirent naturellement
davantage l’attention des médias.
14. Les participant·e·s ont souligné que les organes d'administration
des élections devraient procéder à des examens systématiques des
règles et des procédures en mettant l'accent sur la résilience,
l'agilité et l'adaptabilité. Ces processus devraient associer toutes
les parties prenantes concernées, en particulier les pouvoirs publics,
les partis politiques et les organisations de la société civile,
et être transparents pour les médias et le grand public. Les participant·e·s
de la conférence ont abordé la nécessité d’établir un dialogue non
partisan et pluripartite et d’apporter des changements aux échelons
inférieurs, notamment de prendre des décisions opérationnelles concernant
les bureaux de vote. En centrant le débat sur les questions opérationnelles,
on évite la polarisation et on réduit l’impact des grandes politiques.
Il importe de noter que, dans la perspective des futures crises,
il est nécessaire de disposer d’institutions qui fonctionnent correctement,
qui sont flexibles et qui ont tiré les leçons de la pandémie de
covid-19.
15. L’observation des élections fait partie intégrante de la transparence
des processus électoraux, qui a beaucoup pâti de l’absence physique
des observateurs lors des élections organisées pendant la pandémie
de covid-19, pour des raisons de santé ou de sécurité. Toutefois,
la pandémie a également donné lieu à des innovations telles que
la surveillance à distance et en ligne, qui ont été mises en place
pour compenser la présence limitée sur le terrain, et qui ont souligné
la nécessité d’élaborer un cadre commun sur la manière dont les
missions d’observation des élections devraient aborder les situations
d’urgence.
16. La nécessité d’une meilleure coordination entre les observateurs
internationaux a été évoquée, certains pays ayant tenté de limiter
le nombre d’observateurs et d’autres aspects de leur mission d’observation
en invoquant des raisons de santé ou de sécurité, alors qu’il s’agissait
plutôt d’empêcher les observateurs de mener leur mission conformément
à leur mandat et à leur méthodologie.
3 L’impact
des catastrophes naturelles sur les élections
17. La planète subit les effets
négatifs de la crise climatique qui accroît la fréquence de certaines catastrophes
naturelles et aggrave leurs conséquences, comme l’ont démontré les
récents tremblements de terre en Türkiye et en Syrie. Les réglementations
doivent être modifiées pour s’adapter à ces crises. En ce qui concerne
leur impact sur la stabilité politique, il convient d’adopter des
stratégies pour gérer les risques avant les catastrophes et pour
gérer les crises une fois qu’elles se sont produites.
18. De tout temps, les administrations électorales ont dû faire
face aux catastrophes naturelles, mais la menace que représentent
ces phénomènes est devenue plus manifeste ces dernières années.
Selon un rapport de l’Institut pour l’économie et la paix (IEP)
Note, le nombre de catastrophes naturelles
– notamment les inondations et les cyclones – a triplé en quarante
ans. Cette évolution correspond aux prévisions des climatologues
et il est donc très probable que les élections nationales et infranationales
seront à l’avenir plus souvent affectées par les catastrophes naturelles.
Par conséquent, il importe de développer une approche fondée sur
les risques en ce qui concerne la crise climatique et de gérer et
d’atténuer efficacement l’impact de ces événements extrêmes sur
les communautés et les sociétés. Les gouvernements doivent identifier
les risques externes susceptibles d’affecter les processus électoraux.
Il est important de déterminer les organismes publics appropriés
et les administrations locales et régionales qui auront le mandat,
les compétences et les ressources pour agir pendant une crise.
19. À cet égard a été évoquée la
Résolution 2493 (2023) de l’Assemblée sur les « Stratégies politiques permettant
de prévenir les catastrophes naturelles, de s’y préparer et d’y
faire face »
Note qui appelle les États membres à concrétiser
le droit à un environnement sûr, propre, sain et durable en élaborant
un protocole additionnel à la Convention européenne des droits de
l’homme ou à la Charte sociale européenne, ou encore une convention
autonome. Elle demande notamment aux États membres de protéger les
personnes vulnérables et de renforcer la résilience des populations
face à tous les événements extrêmes et à leurs conséquences à court,
moyen et long terme, y compris migratoires. Les États membres pourraient
également envisager de créer un comité intergouvernemental chargé
de partager les bonnes pratiques et les modèles existants en matière
de protection du climat, appelé Comité de Reykjavik.
20. Les participant·e·s ont abordé différents cas de pays touchés
par des catastrophes naturelles, notamment la Türkiye, la Syrie,
le Pakistan, Haïti, le Japon, les États-Unis (La Nouvelle-Orléans)
et d’autres. Pour protéger l’intégrité des processus électoraux,
certains pays ont décidé de reporter les élections, tandis que d’autres
ont pu tenir les élections comme prévu. Il est toujours nécessaire
d'examiner attentivement la question de savoir s'il faut poursuivre
ou reporter les élections, et une telle décision ne doit pas être
prise à la hâte tout en tenant compte d'une situation d'urgence,
de l'accès et de l'universalité du vote, et de la continuité des
institutions.
21. Les participant·e·s ont également fait part de leur expérience
en matière d’appui reçu de la part d’organisations internationales
dans les domaines de la gestion des crises, du renforcement des
capacités et de la planification de la gestion stratégique, point
essentiel en raison de leur manque d’expérience et de ressources
dans ce domaine. Il a été souligné que la question du calendrier
était essentielle et que la gestion des risques et les plans appropriés
devaient être mis en place avant toute catastrophe naturelle future.
Il s’agit par exemple d’adopter une législation pour faire face
aux situations d’urgence, notamment des dispositifs permettant de
mettre en œuvre d’autres modes de scrutin, tels que le vote anticipé
ou le vote par correspondance, qui peuvent accroître l’accès des
électeurs aux bureaux de vote, en particulier dans les endroits
exposés aux effets de catastrophes et d’évènements climatiques extrêmes.
22. Les participant·e·s à la conférence ont abordé plus particulièrement
le cas de la récente catastrophe en Türkiye, qui a eu lieu trois
mois seulement avant les élections présidentielle et législatives
du 14 mai 2023. Elle a touché 13 millions de personnes dans les
provinces frappées par le tremblement de terre (environ 9 millions
d’électeurs), fait 50 000 morts (selon les statistiques officielles),
détruit plus de 100 000 bâtiments et causé des dommages estimés
à long terme à plus de 100 milliards de dollars. Les autorités ont
immédiatement dû faire face à au moins cinq problématiques majeures:
les restrictions constitutionnelles qui n’autorisent le report des
élections qu’en cas de guerre, l’inscription sur les listes électorales
des 3 millions de personnes déplacées à l’intérieur du pays, la
reconfiguration des circonscriptions électorales due à la réinstallation
des personnes, les mesures de sécurité à prendre pour mener des
élections dans les zones touchées, et l’organisation de campagnes
électorales dans ces provinces. Les participant.e.s ont fait observer
que, si les administrations électorales turques ont immédiatement
mis en place un système électronique d’inscription des personnes
déplacées sur les listes électorales de leur nouveau lieu de résidence,
dans une situation où les personnes rencontraient des difficultés
d’accès à leurs données en ligne, seule la moitié des personnes
ont pu s’inscrire. Malgré leur apparente efficacité, les solutions
électroniques ne sont pas les mieux adaptées aux situations d’urgence
de grande ampleur. De même, le transport des électeurs et des électrices
par autocar jusqu’à leur lieu de vote d’origine pourrait mettre
en péril l’intégrité des processus électoraux.
23. Les participant.e.s ont donc identifié, au premier rang des
nécessités, l’élaboration d’un cadre unique regroupant les bonnes
pratiques en matière de gestion des risques, de renforcement de
la résilience et de gestion des crises, qui serait soumis aux parlements
en amont de catastrophes naturelles imprévues, et qui viendrait
renforcer l’approche consistant à impliquer l’ensemble de la société
dans la tenue des élections pendant ou après une situation d’urgence.
Un tel cadre contribuerait à renforcer la capacité des administrations électorales
et des autres institutions concernées à faire face à ces problématiques.
Il a également été indiqué que les organisations internationales
devaient aider les administrations électorales dans leur planification stratégique,
en particulier celles qui manquent de compétences et de ressources.
24. Il importe que les administrations électorales disposent de
lignes directrices spécifiques fondées sur une évaluation des risques
et une analyse d’experts adéquates. Il conviendrait notamment d’élaborer
un plan concernant les modalités d’inscription sur les listes électorales,
qui devrait être approuvé avant que survienne une catastrophe. La
désignation, au sein des administrations électorales, d’agents chargés
de la gestion des risques aiderait les administrations électorales
à être mieux préparées. Les participant.e.s ont également recommandé
que les agents des bureaux de vote à tous les niveaux de l’administration
électorale reçoivent une formation appropriée.
25. De leur côté, les parlements nationaux devraient adopter une
législation en période normale pour faire face aux situations d’urgence
et anticiper d’autres modes de scrutin tels que le vote anticipé,
le vote par correspondance et le vote en ligne.
4 L’impact
des conflits militaires, de la guerre et du terrorisme sur les élections
26. La tenue d’élections en temps
de conflit armé est rare, car il est quasiment impossible de respecter
les normes démocratiques internationales dans de telles circonstances.
Les conflits armés engendrent des restrictions à la liberté de mouvement
et des déplacements de populations, tant à l’intérieur qu’en dehors
des pays concernés. Même si toutes les normes électorales ne peuvent
pas être appliquées en cas de crise majeure, les principes électoraux
fondamentaux doivent être respectés afin que les élections soient
dignes de ce nom et bénéficient de la confiance des électeurs. À
cet égard, le rapport du Congrès de 2020 sur les «Elections locales
et régionales lors de crises majeures»
Note a été mis en évidence; il décrit
les difficultés rencontrées par les États et les autorités électorales
en matière d'élections, à tous les niveaux de gouvernement, face
aux risques pour la vie, la santé et la sécurité de la population.
27. Si elles sont organisées dans un véritable esprit de démocratie,
les élections peuvent réduire les tensions, résoudre les conflits
et conférer à un gouvernement la légitimité nécessaire pour gouverner efficacement.
Mais elles peuvent aussi exacerber les conflits existants et en
déclencher de nouveaux, voire des guerres civiles. Beaucoup de choses
dépendent du système électoral et de la conception de la loi électorale.
Un système électoral majoritaire où le gagnant rafle tout tend à
conduire à des élections à fort enjeu, tandis que la représentation
proportionnelle ou au moins un système électoral mixte tend à être
moins enclin à la violence post-électorale. Les modèles de partage
du pouvoir peuvent être une solution. La légitimité des processus
électoraux est également essentielle, tout comme la perception de
la sécurité. En période de conflit, la sécurité devient la première
préoccupation des gens. Lorsque les enjeux sont élevés, les organes d'administration
des élections s'efforcent de respecter les normes internationales.
28. Il est donc important de disposer d’une liste de critères,
qui devrait faire l’objet d’un contrôle permanent, définissant les
conditions minimales à respecter pour la tenue d’élections après
la levée de l’état d’urgence ou de la loi martiale, ainsi que les
actions à mettre en œuvre pour veiller à ce que les élections restent
aussi démocratiques que possible. Il n’existe pas de solution unique
et chaque cas doit être examiné individuellement. Les impératifs
de sécurité et les mesures visant à protéger les droits à la vie,
à la santé et à la sécurité doivent être soigneusement mis en balance
avec le droit à la participation politique et l’intégrité du processus
électoral. Une telle feuille de route contribuerait à générer un
consensus politique plus large sur le calendrier et les conditions
à remplir pour la tenue d’élections après un conflit.
29. En ce qui concerne l’Ukraine, les participant·e·s à la conférence
ont fait front commun contre la guerre d’agression russe contre
l’Ukraine et ont appelé leurs gouvernements à continuer d’apporter
un soutien sans réserve à ce pays. Il a été convenu qu’une fois
que les armes se seront tues, il importera de préserver l’intégrité des
élections qui se tiendront en Ukraine à tous les niveaux de fonctions
électives et de soutenir le pays en lui fournissant les ressources
qui seront nécessaires pour atténuer les effets colossaux de la
guerre. Ces élections seront particulièrement visées par la campagne
de diffamation continue de la propagande russe, l’ingérence malveillante,
les cyberattaques et la désinformation. Pour sa part, le Conseil
de l’Europe, en coopération avec la communauté internationale, a
indiqué qu’il était prêt à servir de plateforme internationale clé
pour aider son État membre, l’Ukraine, à faire en sorte que, dans
la période de l’après-guerre, les conditions préalables nécessaires
à la tenue d’élections soient réunies.
30. Les participant·e·s ont discuté de la nécessité d’une feuille
de route assortie d’un calendrier pour les premières élections qui
auront lieu après la fin de la guerre en Ukraine, et d’un accord
entre les partis politiques, éventuellement sous la forme d’un code
de conduite, sur les conditions minimales nécessaires à la tenue
de ces élections. En termes de préparation, le pays est aujourd’hui
divisé en trois types de territoires: le centre et l’ouest de l’Ukraine,
qui continuent de fonctionner presque normalement sans menace majeure
pour la démocratie, les territoires ayant connu une courte période
d’occupation ou touchées par des actes de guerre, et les territoires
qui sont sous occupation depuis des années. Les normes internationales
en matière d’élections et de fonctionnement des institutions démocratiques
pourraient devoir s’appliquer de manière variable. Les participant·e·ss
ont pris connaissance d’expériences concrètes de pays ayant organisé
des élections après un conflit; ces exemples soulignent la nécessité
de ne pas précipiter les élections, mais d’assurer d’abord une sécurité
suffisante, des ressources humaines et financières, ainsi qu’une
assistance internationale adéquate.
31. Il est nécessaire, comme condition préalable à la tenue d’élections
démocratiques, de disposer d’une loi électorale stable et que les
règles en la matière ne soient pas fréquemment changées peu de temps
avant les élections. L’Ukraine devra également parvenir à un consensus
parmi ses forces politiques, tant au niveau central que local, sur
le système électoral qu’elle souhaite mettre en place après la guerre.
Comme indiqué plus haut, l'introduction d'un système de représentation
proportionnelle intégrale ou au moins d'un système électoral mixte
serait moins sujette à des tensions post-électorales. L’importance
d’un dialogue politique constructif a été soulignée afin de garantir
la confiance des électeurs et des électrices et d’éviter l’approche
du «vainqueur qui rafle tout», qui s’est avérée être un facteur
de déstabilisation dans d’autres pays lorsque des élections étaient
organisées pour la première fois après un conflit.
32. Les questions de suffrage actif et passif nécessitent une
législation complémentaire. Si les restrictions au suffrage peuvent
être dictées par des considérations de sécurité et par les attentes
de la population, elles doivent être fondées en droit et respecter
strictement les principes de légitimité, d’équité et de transparence, conformément
aux normes internationales.
33. La discussion a également porté sur les personnes déplacées
à l’extérieur et à l’intérieur du pays et sur la nécessité de veiller
à ce qu’elles soient inscrites sur les listes électorales et puissent
exercer leur droit de vote lors des premières élections de l’après-guerre.
Étant donné qu’il n’existe pas d’obligations internationales ou
de normes universellement reconnues concernant le vote à l’étranger
en temps de paix, sans parler des situations de (l’après-)guerre,
le président de la Commission électorale centrale d’Ukraine a demandé
aux institutions du Conseil de l’Europe d’élaborer des lignes directrices
générales sur le vote à l’étranger.
34. Il sera également important d’assurer la sécurité du processus
électoral tout en veillant à ce que le rôle des forces de sécurité
soit correctement défini et limité, conformément aux normes internationales
et aux bonnes pratiques. L’évaluation de la sécurité devrait être
effectuée sur la base de critères clairs. Plusieurs participant·e·s
ont souligné que les premières élections de l’après-guerre en Ukraine
devaient être exemplaires sur le plan démocratique.
35. Il est également important d’inclure les administrations électorales
dans tous les processus de planification, compte tenu de leur expertise
dans l’organisation des élections. La nécessité de procéder à un vote
test avant les élections a aussi été mentionnée.
36. Les participant·e·s ont souligné la nécessité de mettre en
place des garanties suffisantes contre l’ingérence étrangère dans
les élections ukrainiennes et de soutenir l’environnement médiatique
de manière à ce que les électeurs reçoivent suffisamment d’informations
qui leur permettent de faire des choix éclairés lors des premières
élections organisées après la fin de la guerre.
5 L'impact
de l'ingérence étrangère, de l'IA et des TIC sur les élections
37. À l'heure actuelle, les élections
sont menacées non seulement par des guerres physiques, mais aussi par
des guerres hybrides. Autrefois, les élections portaient essentiellement
sur des questions nationales, mais aujourd'hui, elles sont devenues
des moments forts dans des sociétés complexes et de plus en plus
polarisées. En outre, elles portent de plus en plus sur l'orientation
internationale des pays (par exemple, l'unité de l'Union européenne
autour des sanctions, vis-à-vis de la Russie dans le cadre de la
guerre en Ukraine, etc. L'ingérence est peu coûteuse, elle ne nécessite
pas d'équipement spécial, elle permet de former rapidement des agents
et les résultats sont visibles rapidement. L'objectif principal
de cette interférence est d'alimenter la polarisation et de diffuser
des contenus nuisibles, plus précisément la désinformation, la mésinformation,
les discours de haine, les «fake news» et les «deep fakes», qui
jettent des doutes sur l'intégrité du vote et brouillent les frontières
entre la réalité et la fiction.
38. Malgré les nombreux acteurs dans ce domaine qui travaillent
à la normalisation et à la systématisation des connaissances sur
les questions d'ingérence étrangère et nationale, les participant·e·s
ont admis qu'il y avait encore une très faible reconnaissance politique
et sociétale de la nocivité et de l'impact de l'ingérence étrangère,
ainsi que de son caractère systématique, sophistiqué et structurellement
ancré dans les mécanismes de politique étrangère des «mauvais acteurs».
39. Le recul de nos propres démocraties est également à blâmer,
ce qui rend les réponses à de telles attaques moins solides. Ainsi,
s'il est important de faire face aux menaces extérieures, il faut
aussi se pencher sur le fonctionnement des médias et de la société
civile, sur l'éducation civique et la maîtrise des médias sociaux
dans nos pays. Toutes ces questions seront abordées dans le prochain
rapport de l'Assemblée intitulé «L'ingérence étrangère: une menace
pour la sécurité démocratique en Europe »
Note.
40. En raison de l’utilisation croissante des TIC et de la dépendance
à leur égard, les risques de manipulation des élections augmentent.
À l’instar de n’importe quel outil, l’IA et les cyber technologies
peuvent être utilisées à des fins bonnes ou mauvaises. Les cyberattaques
peuvent saper la légitimité et l’équité des élections et les mécanismes
visant à les protéger. Dans ce contexte, les participant·e·s ont
rappelé l’importance de la Convention du Conseil de l’Europe sur
la cybercriminalité (Convention de Budapest) et de ses protocoles,
en particulier le deuxième Protocole additionnel relatif au renforcement
de la coopération, qui sont des instruments essentiels pour garantir
l’intégrité des processus électoraux. Le deuxième protocole, ouvert
à la ratification, vise à fournir des outils supplémentaires et
accélérés pour une coopération renforcée et la divulgation de preuves
électroniques, tels que la coopération directe avec les fournisseurs
de services au-delà des frontières ou la coopération dans les situations
d'urgence
Note.
41. La propagation de contenus préjudiciables est devenue un problème
majeur car elle ébranle la confiance des citoyens dans les institutions
démocratiques et les médias, tout en ayant un impact négatif sur l’exactitude
et la fiabilité des informations qui alimentent l’opinion publique.
En conséquence, les citoyens peinent à discerner le vrai du faux.
Les opinions extrêmes, les théories du complot et le populisme se répandent,
et les vérités et les institutions autrefois acceptées sont remises
en question.
42. Si ces contenus doivent être combattus, toute restriction
aux droits fondamentaux, notamment dans ce cas la liberté d'expression,
doit être conforme à la Convention européenne des droits de l'homme
et, plus généralement, à l'exigence d'une base légale, de l'intérêt
général et du respect du principe de proportionnalité.
43. Cela dit, au cours de l'histoire, tout au long de l’histoire,
les personnes en quête de pouvoir ont toujours essayé de gagner
de l’influence et de manipuler les populations pour obtenir leur
soutien. Les nouvelles technologies du passé ont également présenté
des risques et des opportunités. Il y a plusieurs siècles déjà,
la presse à imprimer créait de fausses nouvelles et incitait les
gens à se faire la guerre sur la base de fausses informations. L'introduction
de chaque nouvelle technologie (radio, télévision) a été suivie
d'un système sophistiqué de lois de régulation, de lois sur les
médias et de lois électorales, ainsi que d'un consensus sociétal qui
va au-delà des simples lois et normes techniques. L'introduction
de l'IA a donné lieu à de nouvelles formes de manipulation du processus
électoral, qui n'est pas encore suffisamment réglementé. Par conséquent,
la population ne sait pas comment s'y prendre ni à qui faire confiance.
Il est nécessaire de trouver de nouveaux moyens pour :
- établir la transparence des
sources de données et des algorithmes;
- aider les gens à reconnaître quand ils sont exposés à
du contenu généré par l'IA;
- préserver le contrôle humain ultime dans les prises de
décision essentielles; et
- assurer la conformité des systèmes pilotés par l'IA avec
les droits et normes électoraux/démocratiques/humains.
44. Les participant·e·s ont recommandé aux gouvernements d'intensifier
la lutte contre la désinformation et la propagande visant à saper
les institutions démocratiques. La coopération interinstitutionnelle
a été soulignée comme une condition préalable à la lutte contre
ce type d'ingérence. D'autres recommandations à l'intention des
organes d'administration des élections et d'autres acteurs concernés
portent sur le renforcement de leur propre capacité à suivre, analyser
et anticiper les cyber-attaques et la désinformation. Les organes d'administration
des élections devraient également disposer des moyens nécessaires
pour améliorer leurs stratégies de communication et d'éducation
des électeurs en matière d'intégrité de l'information et travailler
en étroite collaboration avec la société civile, les établissements
d'enseignement et les acteurs des médias.
45. Les participant·e·s ont également recommandé que les organes
d'administration des élections et les autres acteurs publics et
privés concernés renforcent la cybersécurité et protègent les infrastructures essentielles
aux élections, les systèmes connectés à Internet, les réseaux, les
logiciels et les données contre toute exploitation non autorisée,
y compris la sécurité des technologies électorales hors ligne. Ils
ont souligné la nécessité de repenser le système de surveillance
et de garde-fous qui favorise la responsabilisation et la transparence
et incite à la fois ceux qui détiennent ou cherchent à détenir le
pouvoir à se comporter correctement, et les populations à faire
confiance au système. La convention sur l’IA sur laquelle travaille actuellement
le Comité du Conseil de l’Europe sur l’intelligence artificielle
(CAI) est un instrument de ce type, s’inscrivant dans un ensemble
plus large d’instruments qui pourraient être nécessaires pour rétablir
des règles qui sont applicables, qui créent la confiance et auxquelles
les populations adhèrent, afin que les démocraties puissent continuer
de fonctionner au 21e siècle.
46. Il est également nécessaire de définir les rôles et les responsabilités
des nouveaux contrôleurs d’accès – les plateformes des réseaux sociaux
– afin de garantir l’équilibre des pouvoirs. Les participant·e·s
ont convenu de la nécessité d’améliorer l’éducation, la sensibilisation
et la formation aux médias numériques.
47. Une autre question soulevée a été celle de la relation public-privé
dans le contexte de la fourniture de services électoraux. En raison
des technologies et des capacités requises pour les maîtriser, le
nombre et les profils des acteurs impliqués dans la gouvernance
électorale augmentent. Il est primordial que les technologies électorales
soient conçues et exploitées de manière sécurisée et que les administrations
électorales gardent le contrôle des processus électoraux et non
les fournisseurs. Les services privés qui fournissent les technologies
devraient donc être tenus de respecter au moins le même niveau de
normes de sécurité que les agents électoraux. Au lieu de laisser
les fournisseurs leur dire ce dont les électeurs ont besoin, les administrations
électorales doivent avoir la capacité d’examiner les technologies
mises en œuvre et de demander des comptes à leurs fournisseurs.
Elles devraient également être en mesure de conserver le code source
et, pour des raisons de transparence, de le rendre public à des
fins d’audit.
48. Soulignant les aspects positifs des TIC, les participant·e·s
ont mis en avant les capacités de la numérisation à conduire au
réexamen et à l'analyse des processus existants, ce qui permettrait
d'améliorer les processus déjà établis et d'accroître leur précision
et leur sécurité. Elle peut également contribuer à développer une
nouvelle approche de la gestion des crises et des risques. Les participant·e·s
ont convenu que l'optimisation de la transparence, dans tous les
aspects du processus électoral, y compris l'acquisition et la certification
de tout équipement, est essentielle pour développer la confiance
de la société dans l'utilisation des TIC.
49. Néanmoins, si l'IA contribue à l'automatisation de l'analyse
des données et a le potentiel d'améliorer et de soutenir le maintien
des valeurs et des processus démocratiques, y compris les élections,
son utilisation, en raison des algorithmes appliqués dans les médias
sociaux, peut également contribuer à la polarisation sociale, entraînant
la formation de groupes distincts qui ne se comprennent plus et
se trouvent de plus en plus en conflit les uns avec les autres.
La compréhension de cette dynamique est fondamentale pour les organes d'administration
des élections et les praticiens afin de préserver l'intégrité et
la crédibilité des processus électoraux.
51. L'expérience suisse a été citée pour montrer à quel point
il est important d'introduire progressivement des méthodes de vote
alternatives, afin qu'elles finissent par être bien établies et,
surtout, par inspirer confiance. Alors que les processus de vote
non numériques, notamment le système de vote par correspondance,
sont reconnus et utilisés par 90 % des électeurs et électrices en
Suisse, l'introduction de processus numériques a été controversée.
Le vote électronique a été introduit précédemment, puis suspendu pendant
quatre ans. Après cette période de quatre ans, qui a été mise à
profit pour améliorer la précision et la sécurité des processus
établis, la Suisse reprendra les essais de vote électronique lors
d'une votation populaire qui aura lieu le 18 juin. Il est important
de souligner que les nouvelles procédures numériques doivent être
bien préparées, qu'elles doivent être encadrées juridiquement et
qu'il faut prendre le temps nécessaire pour les mettre en œuvre.
Ainsi, la sécurité doit primer sur la rapidité.
52. Les participant·e·s ont également discuté de l'utilisation
des TIC à différents stades du processus électoral, comme les machines
de vote électronique ou les systèmes de tabulation électronique
pour accélérer le processus de tabulation des votes. Dans ce contexte,
les efforts récents de la Géorgie et de l'Albanie pour introduire
le vote électronique ont été discutés. En décembre 2022, les législateurs
géorgiens ont modifié la loi selon laquelle les prochaines élections
parlementaires de 2024, selon laquelle 90 % des électeurs géorgiens feront
l'expérience de la vérification des électeurs, de l'enregistrement
des électeurs et des machines à compter les votes. Le système a
été testé avec succès lors des élections de mi-mandat dans 10 municipalités. Toutefois,
en raison du risque élevé d'ingérence étrangère dans le processus,
des inquiétudes subsistent quant à l'utilisation du vote électronique
pour les électeurs résidant à l'étranger.
53. L'Albanie a testé le vote électronique pour la première fois
en 2021, en utilisant des machines à compter les bulletins de vote
dans l'une des circonscriptions de Tirana, mais une application
plus large a été impossible en raison de la pandémie. Le pays est
maintenant prêt à utiliser un millier de nouveaux appareils électroniques lors
des élections locales du 14 mai qui ont notamment été observées
par le Congrès, l’OSCE/BIDDH et le Parlement européen
Note.
Toutefois, comme en Géorgie, les capacités de la technologie n'ont
pas été pleinement exploitées, car les machines fonctionnaient hors
ligne. Cependant, la population adopte la technologie et les autorités
de l'État cherchent à offrir une alternative.
54. Concernant le vote par Internet, l’Estonie est le seul pays
qui utilise le vote électronique / en ligne à l’échelle nationale
pour tous les niveaux d’élections; plus de la moitié des électeurs
ont voté en ligne lors des récentes élections législatives nationales
du 5 mars 2023. Son succès peut être attribué en partie au niveau très
élevé de confiance dans le processus électoral et dans l'impartialité
de l'administration électorale apolitique, mais aussi au partenariat
symbiotique que le secteur public, y compris l'organe d'administration
des élections, a réussi à établir avec le secteur privé. Ensemble,
ils ont développé le système de vote par Internet qui est utilisé
depuis plus de 15 ans et qui est amélioré d'une élection à l'autre.
6 Conclusions
55. La conférence s'est conclue
sur une note positive, encourageant les organes d'administration
des élections à s'adapter aux temps modernes et à améliorer leurs
capacités à exploiter l'IA et les TIC de diverses manières, à tirer
les leçons des expériences passées des crises récentes et à réévaluer
les procédures et pratiques électorales établies de longue date
afin de soutenir les progrès et les innovations lors des prochains cycles
électoraux.
56. Chacune des crises évoquées a accéléré des tendances déjà
en cours: vers des formes multiples de vote, l'attente de voter
à l'avance, de disposer de plusieurs flux de vote et d'obtenir des
résultats rapides. Même avant l'exode massif de l'Ukraine ou les
tremblements de terre dévastateurs en Türkiye, on s'attendait à
ce que les élections prennent en compte les mouvements de population,
en s'éloignant de l'environnement contrôlé qui relie les personnes
à une adresse et cette adresse à un bureau de vote. Trois tendances
émergentes obligeront les organes de gestion des élections à adapter
leur fonctionnement:
- la demande
d'efficacité et de résilience des institutions pour faire face à
la multiplicité des défis et à la multiplicité des types de vote;
- l'exigence d'une transparence radicale dans toutes les
procédures;
- une indépendance sans craintes des organes d'administration
des élections qui utiliseraient toutes les plateformes pour protéger
les valeurs des élections.
57. Le défi majeur est que dans l'environnement électoral, les
principes s'opposent: la transparence s'oppose au secret, le secret
s'oppose à la sécurité, l'inclusion s'oppose à l'intégrité, etc.
Plus il y a de groupes d'électeurs et d’électrices à inclure, plus
les élections doivent s'éloigner de l'environnement contrôlé qu'est
le bureau de vote. Les fonctionnaires électoraux seront en première
ligne pour naviguer entre ces principes contradictoires en temps
réel. Il est donc urgent de les doter d'un ensemble de paramètres
adaptés au monde moderne qui fait la part belle à l'innovation et
qui contribue à construire et à renforcer des systèmes résilients, flexibles,
ouverts et transparents, capables de faire face aux crises et aux
défis à venir.
58. De même, l'observation électorale devrait renforcer ses capacités
en passant de l'extension de ses pratiques d'observation traditionnelles
dans le monde des bulletins de vote papier à de multiples espaces
et cadres temporels, ce qui pourrait nécessiter un recours accru
à des observateurs recrutés localement et une mise à jour de la
Déclaration de principes, du Code de bonnes pratiques en matière
électorale de la Commission de Venise et d'autres normes de bonnes
pratiques sur l'observation électorale pour les élections en situation
d'urgence et les élections en ligne et hors ligne.
7 Recommandation
et perspectives d’avenir
59. La Déclaration de Berne, adoptée
à l’issue de deux jours de discussions interactives, établit une
feuille de route à l’intention des gouvernements, des administrations
électorales et des organisations internationales concernées afin
qu’ils soutiennent les actions visant à renforcer les capacités
d’évaluation, d’amélioration et de maintien de l’intégrité des élections
à l’ère des crises multiples. Elle décrit également les moyens de
faire face aux nouveaux risques et défis liés à l’expansion des
TIC et des technologies de l’IA, et comment exploiter ces technologies
à des fins d’application positive et d’innovation susceptibles de
revigorer la confiance du public dans les institutions démocratiques.
60. Les participant·e·s à la conférence ont recommandé aux États
membres de réviser leur législation électorale afin de préciser
les circonstances dans lesquelles le report des élections est autorisé
en cas d’urgence et d’éviter de modifier la loi électorale à la
dernière minute. Ils ont également recommandé de veiller à ce que
des ressources financières suffisantes soient disponibles pour de
telles situations d’urgence, et à ce que les technologies soient
utilisées de manière appropriée. Les décisions relatives à la tenue
d’élections en situation d’urgence doivent être prises par l’intermédiaire
de processus consensuels dans un espace politique incluant toutes
les parties prenantes concernées.
61. Les États membres devraient également envisager de mener des
évaluations exhaustives des risques afin de vérifier si leurs processus
électoraux sont suffisamment solides pour surmonter les conditions «normales»
et «d’urgence», tout en garantissant le respect de l’ensemble des
principes relatifs aux élections et aux référendums démocratiques.
À cet égard, les participant·e·s à la conférence ont souligné que l'observation
des élections faisait partie intégrante de la transparence et de
l'intégrité des processus électoraux. Les participant·e·s ont appelé
les gouvernements à adresser une invitation permanente à toutes les
organisations internationales ayant un mandat d'observation d’élections
pour rendre l'observation électorale possible et plus systématique
dans leurs États membres respectifs à tous les niveaux, et ainsi assurer
une meilleure mise en œuvre des normes électorales et un enracinement
plus profond de la démocratie.
62. L’agression de grande envergure de la Fédération de Russie
contre l’Ukraine et son caractère hybride ont mis en évidence l’urgence
pour les États membres du Conseil de l’Europe de mettre à jour leurs
concepts de sécurité nationale et de poursuivre les travaux visant
à améliorer la sécurité des élections et à lutter contre les contenus
préjudiciables.
63. Il est nécessaire que les administrations électorales et les
autres organes de l’État envisagent des modalités de vote spéciales,
telles que le vote anticipé ou le vote par correspondance, et notamment
que les personnes déplacées aient davantage accès aux bureaux de
vote, en particulier dans les endroits vulnérables aux effets des
catastrophes et des phénomènes météorologiques violents.
64. La Conférence a soutenu les principes de Reykjavik pour la
démocratie et le lancement du «processus de Reykjavik» pour la reconnaissance
politique du droit à un environnement propre, sain et durable, afin
de renforcer les capacités de résilience et de gestion des risques
des États membres, dans un contexte de réduction des effets de la
crise climatique. Elle a salué le rôle normatif important du Conseil
de l’Europe dans plusieurs domaines: la lutte contre la cybercriminalité,
la réglementation du développement, de la conception et de l’application
de l’IA et de la gouvernance électronique, la lutte contre l’ingérence
indue et la garantie d’élections libres et équitables comme moyen
d’élire des institutions et des parlements démocratiques indépendants
et efficaces.
65. Toutefois, les participant·e·s ont également reconnu que les
normes européennes fondées sur des valeurs, élaborées au cours de
plusieurs décennies, ont été conçues pour des périodes de paix et
de progrès; or, l’application de ces normes est affaiblie dans le
contexte actuel marqué par des crises multiples, un recul démocratique
et des nouvelles menaces de guerre hybride dans des espaces alternatifs.
Ainsi, à la lumière des Principes de Reykjavik pour la démocratie
et de la Déclaration de Berne, la portée et l’impact des activités du
Conseil de l’Europe dans le domaine des élections démocratiques
devraient être davantage renforcés, notamment par les moyens suivants:
a l'élaboration d'un ensemble de
normes et de critères pour la préparation, la conduite, l'évaluation
et l'observation des élections après un conflit;
b l'élaboration de lignes directrices générales pour le
vote à l'étranger, qui devraient également couvrir les réfugiés
de guerres et de conflits armés. Ces lignes directrices pourraient
également préciser le niveau de soutien apporté par les autres États
membres du Conseil de l'Europe où résident ces réfugiés lors d'élections
postérieures à un conflit;
c la coordination du soutien international à l'Ukraine pour
la tenue de ses premières élections d'après-guerre afin d'en maximiser
l'impact. Sous l'impulsion de l'Assemblée parlementaire, le Conseil
de l'Europe pourrait jouer un rôle de premier plan dans l'élaboration
d'une feuille de route assortie d'un calendrier pour les premières
élections d'après-guerre en Ukraine, en coordination avec d'autres
acteurs clés;
d l’élaboration d’un cadre commun sur la manière dont les
missions d'observation électorale devraient aborder les crises internationales,
nationales et locales et renforcer leur capacité à évaluer l'intégrité
des élections dans les situations d'urgence ainsi que dans le cyberespace.
Ce cadre devrait garantir que la méthodologie prenne en compte les
nombreux nouveaux défis et technologies en jeu (vote électronique, observation
et suivi des élections à distance et en ligne, campagnes en ligne,
interférences liées à l'intelligence artificielle dans le processus
électoral).
66. Le Conseil de l’Europe et d’autres organisations internationales
devraient également soutenir les efforts de leurs États membres
dans la lutte contre les ingérences indues dans les systèmes et
processus électoraux, notamment en mettant en évidence les lacunes
des cadres juridiques électoraux qui ne garantissent pas le plein
exercice des libertés fondamentales. Le prochain rapport de l’Assemblée
parlementaire sur l’ingérence étrangère fournit une liste d’outils
pour prévenir, détecter et contrer l’ingérence étrangère dans les
élections. Ces outils seront importants pour garantir et maintenir
la confiance du public dans le caractère libre et équitable des
élections.
67. L’Assemblée parlementaire pourrait préparer un rapport spécifique
en guise de suivi des sujets discutés lors de la conférence de Berne,
afin de s’assurer que le premier acte de la participation démocratique
reste libre, sûr et sécurisé malgré les circonstances difficiles.
Annexe 1 – Composition
de la commission ad hoc
Sur la base des propositions des groupes
politiques de l’Assemblée, la commission ad hoc se composait comme
suit:
Président: M. Damien
COTTIER, Suisse
Groupe des socialistes,
démocrates et verts (SOC)
M. Adnan DIBRANI, Suède
Mme Róisín GARVEY, Irlande
Mme Thórhildur Sunna ÆVARSDÓTTIR,
Islande
M. Ion PRIOTEASA, Roumanie
Mme Edite ESTRELA, Portugal
Mme Jelena MILOŠEVIĆ, Serbie
M. Predrag SEKULIĆ, Monténégro
M. Constantinos EFSTATHIOU, Chypre
Mme Cécile HEMMEN, Luxembourg
M. Haluk KOÇ, Türkiye
Groupe du Parti populaire
européen (PPE/DC)
M. Lulzim BASHA, Albanie
M. Corneliu-Mugurel COZMANCIUC, Roumanie
M. Georg GEORGIEV, Bulgarie
Mme Sylvie GOY-CHAVENT, France
Mme Arusyak JULHAKYAN, Arménie
M. Reinhold LOPATKA, Autriche
Mme Isabel MEIRELLES, Portugal
M. Cristian-Augustin NICULESCU-ȚÂGÂRLAȘ, Roumanie
M. Sergiy VLASENKO, Ukraine
Alliance des démocrates
et des libéraux pour l’Europe (ADLE)
M. Damien COTTIER, Suisse
Mme Liliana TANGUY, France
Mme Lesia ZABURANNA, Ukraine
Mme Valentina GRIPPO, Italie
Groupe des Conservateurs
européens et Alliance démocratique (CE/AD)
M. Ian PAISLEY, Royaume-Uni
M. Erkin GADIRLI, Azerbaïdjan
Groupe pour la gauche
unitaire européenne (GUE)
M. Anton GOMEZ-REINO, Espagne
Membres n’appartenant
à aucun groupe politique (NI)
Mme Emine Nur GÜNAY,Türkiye
Mme Serap YAŞAR, Türkiye
M. Ahmet YILDIZ, Türkiye
Membres du Conseil
des Elections Démocratiques de la Commission de Venise (ex officio)
M. Aleksander POCIEJ, Pologne
Mme María Valentina MARTÍNEZ FERRO,
Espagne
M. Davor Ivo STIER, Croatie
Secrétariat
Mme Sylvie AFFHOLDER, Cheffe, Division
de l’observation des élections et de soutien
Mme Ivi-Triin ODRATS, Cheffe Adjointe,
Division de l’observation des élections et de soutien
Mme Sachka SONRIER, Assistante
du Directeur des commissions
Mme Carine ROLLER-KAUFMAN, Assistante,
Division de l’observation des élections et de soutien
Annexe 2 – Programme
de la conférence
Mardi 9
mai 2023
9:00 – 9:30 Inscription des participant·e·s
9:30 – 10:00 Discours de bienvenue
Présidé par: M. Damien Cottier,
Président de la délégation suisse auprès de l'APCE, Président de
la Commission des questions juridiques et des droits de l'homme
de l'APCE
- M. Martin Candinas, Président du
Conseil national suisse
- M. Tiny Kox, Président
de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe
- Mme Claire
Bazy Malaurie, Présidente de la Commission de Venise
- M. Leendert Verbeek,
Président du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil
de l'Europe
10:00 – 11:30 SESSION 1: Pandémie et scrutin – l'impact du
covid-19 sur les élections
Modérateur de la Conférence: M. David
Eades, présentateur en chef, BBC
- L'impact global à court et
à long terme de la pandémie de covid-19 sur les politiques de gestion
des élections et la pratique
- Défis juridiques et préparation
aux situations d'urgence – limites et vulnérabilités
- Dispositions spéciales pour
le vote en cas de pandémie: avantages, risques et durabilité
- Observation internationale
des élections pendant la pandémie: qu'avons-nous appris?
Présidée par: M. Damien Cottier,
Président de la Commission ad hoc, Président de la délégation suisse
auprès de l'APCE
Panélistes:
- Dr. Massimo Tommasoli, Directeur
des programmes mondiaux et observateur permanent de l'Institut international
pour la démocratie et l'assistance électorale (IDEA) auprès des
Nations unies, Stockholm
- M. Eirik Holmøyvik,
Membre de la Commission de Venise du Conseil de l'Europe, Professeur
de droit, Université de Bergen, Norvège
- M. Alexandr Berlinschii,
Secrétaire, Commission électorale centrale de la République de Moldova
- M. Matteo Mecacci,
Directeur, Bureau des institutions démocratiques et des droits de
l'homme (OSCE/BIDDH), Varsovie
- M. Roberto Montella,
Secrétaire général de l'Assemblée parlementaire de l'OSCE, Copenhague
Contributions parlementaires:
- Mme Valentina Grippo, Italie, ADLE
- M. Alexander Pociej, Pologne, PPE/DC
- Mme Cécile Hemmen, Luxembourg, SOC
- Mme Liliana Tanguy, France, ADLE
Échange de vues
11:30 – 11:50 Pause-café
11:50 – 13:00 SESSION 2: Suffrage universel parmi la souffrance
universelle – comment les catastrophes naturelles déforment les
élections
- Catastrophes naturelles peu avant les élections:
des considérations juridiques à la logistique
- Stratégies proactives et réactives
de protection des élections contre les catastrophes naturelles:
gestion des risques et gestion de crise
- Impact des risques naturels
sur la campagne, l'exactitude des résultats des élections et la
validité du processus électoral
- Rétablir la confiance du public
dans l'intégrité des élections à la suite de catastrophes naturelles
- Rôle du soutien de la communauté
internationale aux autorités électorales dans les zones touchées
par des catastrophes naturelles
Présidée par: Mme Despina
Chatzivassiliou-Tsovilis, Secrétaire générale de l'Assemblée
parlementaire du Conseil de l'Europe
Panélistes:
- M. Erik Asplund, Chargé de programme,
programme sur les processus électoraux, point focal sur les risques
naturels et les élections, International IDEA, Stockholm
- Dr Bernd Vöhringer,
Vice-président du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil
de l'Europe et Président de la Chambre des pouvoirs locaux du Congrès, Lord-Maire
de Sindelfingen, Bade-Wurtemberg
- Dr Emre Toros,
Professeur en Science politique à la faculté de Communication, Université
Hacettepe, Ankara / Boursier Fulbright à l’Université Harvard, Cambridge, MA
(2022-2023)
Contributions parlementaires:
- M. Nacho Sánchez Amor, MEP, Espagne, S&D
- M. Ahmed Yildiz,
Türkiye, NI
Échange de vues
13:00 – 13:15 Photo de famille
13:15 – 14:30 Pause déjeuner
14:30 – 16:00 SESSION 3: Des élections équitables en temps
de guerre? – l’impact des conflits armés sur les élections
Panel 1: Maintien de l'intégrité des élections en période
de crise sécuritaire majeure (conflits armés, actes terroristes
majeurs, instabilité politique interne)
- Obligations des États et dérogations
possibles
- Conditions minimales pour la
tenue d'élections conformément aux normes internationales dans les
situations de conflits armés et d'actes terroristes
- Méthodes de vote alternatives
pour les élections dans les zones de conflit
- Effets des crises extérieures
et de la guerre sur les élections nationales et locales
- L’interférence des guerres
hybrides dans les espaces alternatifs (cyberattaques, propagande,
subversion politique,...)
Présidé par: M. Pierre-Alain
Fridez, Vice-président de la Sous-commission de l’APCE sur
les conflits concernant les États membres du Conseil de l'Europe,
Rapporteur du suivi de la République de Moldova, membre de la délégation
suisse auprès de l'APCE
Panélistes:
- M. Simon Geissbühler, Ambassadeur,
chef de la division «Paix et droits de l'homme» au ministère suisse
des affaires étrangères
- M. Stewart Dickson,
Porte-parole thématique du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux
sur l'observation des élections locales et régionales, rapporteur
sur "Les élections locales et régionales en situations de crise
majeure", Vice-Président du Conseil des Elections démocratiques
et membre de l'Assemblée législative d'Irlande du Nord, Royaume-Uni
- Dr. Irena Hadžiabdić,
Experte de la Commission de Venise du Conseil de l'Europe, membre
(et ancienne présidente) de la Commission électorale centrale de
Bosnie-Herzégovine
- M. Vassilis Ntsousas, Chef
des opérations européennes, Alliance pour la sécurité démocratique,
Fond Marshall Allemand, Bruxelles
Contributions parlementaires:
- M. Sergiy Vlasenko, Ukraine,
PPE/DC
- Mme Maria ValentinaMartínez Ferrero, Espagne, PPE/DC
Échange de vues
16:20 – 17:45 Pause-café
Panel 2: Le suffrage après le silence des canons – préparer
l’Ukraine aux élections d’après-guerre
- Délais et conditions minimales
pour l'organisation d'élections nationales et locales (anticipées)
après la levée de la loi martiale (en termes de sécurité, d'environnement politique,
de logistique, de finances, etc.)
- Garantir le droit de vote des
personnes déplacées à l'intérieur et à l'extérieur de l'Ukraine
- Réglementation relative à l'inscription
des électeurs déplacés: comment lutter contre les risques de fraude
électorale?
- Mise en œuvre de méthodes de
vote alternatives dans les situations où les infrastructures physiques
et électorales sont endommagées; mise en place des garanties nécessaires
- Comment les réseaux sociaux
peuvent affecter l'égalité des chances entre les candidat.e.s
- Soutien matériel et technique
à prévoir pour l'organisation et le déroulement paisible des élections
d'après-guerre en Ukraine
Présidé par: M. Nacho Sánchez
Amor, Coordinateur spécial en matière d’observation des
élections pour le Parlement européen (Sociaux-Démocrates).
Panélistes:
- Dr. Volodymyr Venher, Professeur
associé, Département de jurisprudence et de droit public, Université
nationale de Kiev- Mohyla Académie, Directeur Exécutif du Centre
de Recherche de la règle de droit Kyiv-Mohyla, Kiev, Chercheur invité
au Brasenose College et à l’Institut de droit européen et comparé,
Université Oxford (2022-2023), Royaume-Uni
- Mme Olga
Aivazovska, Présidente du réseau mondial des observateurs
électoraux nationaux (GNDEM), Présidente du réseau civil OPORA,
experte internationale en matière électorale, Varsovie
- M. Oleh Didenko,
Président de la Commission électorale centrale d'Ukraine
- Mme Meaghan
Fitzgerald, Directrice des élections, Bureau des institutions démocratiques
et des droits de l'homme (OSCE/BIDDH), Varsovie
Contributions parlementaires:
- Mme Alina
Zahoruiko, Verkhovna Rada,
Cheffe de la sous-commission des elections, Ukraine
- Mme Lesya Zaburanna, Ukraine, ADLE
- M. Sergiy Vlasenko, Ukraine,
PPE/DC
Échange de vues
19:00 Réception pour marquer le 60e anniversaire
de l'adhésion de la Suisse au Conseil de l'Europe, avec la participation
de M. Alain Berset, Président de la Confédération suisse, et M. Bjørn
Berge, Secrétaire Général adjoint du Conseil de l’Europe
Mercredi 10 mai 2023
09:00 – 09:10 Allocution introductive de M. Bjørn Berge, Secrétaire Général
adjoint du Conseil de l’Europe sur «Les élections en temps de crise:
rôle du 4e Sommet du Conseil de l’Europe».
09:15-10:30 SESSION 4: Le numérique est-il un danger? – Comment
le vote électronique, l’IA et la cybernétique transforment les élections
Présidé par: Mme Þórhildur Sunna Ævarsdóttir, Présidente
de la sous-commission sur l'intelligence artificielle et les droits
de l'homme de la commission des affaires juridiques et des droits
de l'homme, femme politique islandaise du parti Pirate, avocat en
droits de l’homme et journaliste.
Panel 1: A la merci du numérique: protéger le vote dans la
guerre numérique
- Atténuer l’évolution des menaces à la sécurité
des technologies numériques sur les processus électoraux (intelligence
artificielle, cyber-attaques, ingérence étrangère, crise énergétique,
catastrophes écologiques) – défis récents
- Lutte contre la cybercriminalité
et la cybersécurité: gestion des crises dans les situations d'urgence
- Faux récits: protéger le vote
dans la guerre de la désinformation
Panélistes:
- M. Thomas Schneider, Chef des Affaires
Internationales à l'Office Fédéral de la Communication, Suisse;
Président du Comité sur l'Intelligence Artificielle du Conseil de
l'Europe
- M. David Eray,
Chef de la délégation suisse au Congrès des pouvoirs locaux et régionaux,
ministre de l’Environnement du Canton du Jura, Porte-parole thématique du
Congrès sur la Digitalisation et l'Intelligence Artificielle
- Dr. Iuliia Spycher,
Chercheuse en digitalisation de l’administration publique, Université
de Berne
Échange de vues
Contributions parlementaires:
- M. Constantinos Efstathiou, Cyprus, SOC
- Mme Viktoryia Podgorna, Verkhovna Rada, cheffe de la sous-commission
sur e-gouvernance, Ukraine
10:30 – 10:50 Pause-café
10:50 – 12:30 Panel 2: Exploiter le pouvoir de la technologie
et de l’innovation – repenser les procédures électorales
- Les
avantages du numérique
- Réévaluer les procédures et
pratiques électorales établies de longue date: assurer des progrès
et des innovations durables au cours des prochains cycles électoraux
- Renforcer la confiance du public
dans la gestion des futurs processus électoraux: défis et opportunités
Panélistes:
- Mme Therese Pearce Laanela, Cheffe
des processus électoraux, International IDEA, Stockholm
- M. Oliver Kask,
juge, Président de la Commission Electorale Nationale d'Estonie, Membre
Suppléant de la Commission de Venise du Conseil de l'Europe, Expert
en matière d’élections
- M. Giorgi Kalandarishvili,
Président de la Commission Electorale Centrale de Géorgie
- Mme Barbara Perriard, Cheffe de la
Division des droits politiques, Chancellerie Fédérale, Suisse
Contributions parlementaires:
- Mme Cécile Hemmen, Luxembourg, SOC
Échange de vues
12:30 – 13:00 Session de clôture
Présidé par: M. Damien Cottier,
Président de la délégation suisse auprès de l'APCE, Président de
la Commission des questions juridiques et des droits de l'homme
de l'APCE
- Remarques finales
de M. Rasťo Kužel, Rapporteur
Général
- Adoption de la Déclaration finale
- Remarques finales de Mme Livia
Leu, Secrétaire d'État aux Affaires Etrangères de la
Suisse
Annexe 3 – Déclaration
finale
1. Nous, participant.e.s
à la conférence organisée par l'Assemblée parlementaire du Conseil
de l'Europe (APCE), en coopération avec le Parlement suisse, à l'occasion
du 60e anniversaire de l'adhésion de
la Suisse au Conseil de l'Europe, représentant des parlements nationaux,
des administrations électorales, des organisations internationales
et d'autres acteurs tels que des universitaires, des praticiens,
des expert.e.s et des représentant.e.s de la société civile, nous
sommes réunis à Berne à la veille du 4e Sommet
des chefs d'État et de Gouvernement du Conseil de l'Europe (Reykjavik,
16-17 mai 2023) pour débattre des récents défis et opportunités
auxquels nous sommes confrontés en matière d’organisation des élections.
2. Nous considérons que des élections libres et équitables sont
les fondements de nos démocraties, qui s’appuient sur les cinq principes
cardinaux du patrimoine électoral européen, c'est-à-dire un suffrage
universel, égalitaire, libre, secret et direct. Or, nos administrations
électorales font face à de nouvelles pressions dramatiques, qui
vont des pandémies sanitaires telles que la covid-19 au retour d'une
guerre à grande échelle en Europe, en passant par les attentats
terroristes, l'ingérence d'États étrangers dans les élections ou
encore les catastrophes naturelles. Si les technologies de l'information
et de la communication (TIC) modernes promettent de nouveaux modes
de scrutin, plus représentatifs, elles sont aussi synonymes de dangers,
car les nouveaux outils puissants de l'intelligence artificielle
(IA) et les cyberoutils élargissent le champ de la désinformation
et de la manipulation avant le scrutin.
3. Lors de notre conférence, un large éventail de sujets et de
propositions a été mis en avant, que nous portons ici à l'attention
de nos gouvernements, des administrations électorales et des observateurs internationaux
afin de soutenir leurs efforts pour résoudre ces problèmes.
L’impact de la covid-19
sur les élections
4. Nous reconnaissons que la pandémie
de covid-19 a mis à mal les droits fondamentaux et les normes électorales,
ainsi que les pratiques et approches régissant la gestion des élections
qui étaient en place ces dernières décennies. La pandémie a rapidement
mis en évidence de graves lacunes dans les cadres constitutionnels
et juridiques, et a incité de nombreux pays à repenser la manière
de mener des élections sûres, techniquement fiables et crédibles,
nécessitant une rapidité et une flexibilité extraordinaires. Parallèlement
aux énormes défis, la crise sanitaire mondiale a fait naître des
opportunités de croissance, de changement positif et d'innovation
qui appellent un réexamen urgent, un ajustement et une application significative
de nouvelles politiques, de nouveaux systèmes et de nouvelles approches
en matière de gestion des élections.
5. Sur la base des enseignements tirés de la pandémie, nous appelons
les administrations électorales à procéder à des examens occasionnels
des règles, normes, méthodes et procédures qui régissent l'organisation
et l'administration des élections, en s’acquittant de leur mandat
avec résilience, agilité et adaptabilité. Les processus consultatifs
et transparents s’avèrent essentiels pour la prise de décision en matière
électorale. Ils devraient associer toutes les parties prenantes
concernées, en particulier les pouvoirs publics, les partis politiques
et les organisations de la société civile, et être transparents
pour les médias et le grand public.
6. Nous considérons que l'observation des élections fait partie
intégrante de la transparence des processus électoraux, qui a beaucoup
pâti de l'absence physique des observateurs lors des élections organisées
pendant la pandémie, pour des raisons de santé ou de sécurité. La
capacité à effectuer une observation complète ou systématique a
été compromise, aggravant ainsi le risque de fraude et de manipulation.
Toutefois, la pandémie a également donné lieu à des innovations
telles que le suivi à distance et en ligne, qui ont été mises en
place pour compenser la présence limitée sur le terrain, et l'observation
à long terme a pris le pas sur l'observation à court terme. Elle
a par ailleurs souligné la nécessité d'élaborer un cadre commun
sur la manière dont les missions d'observation électorale devraient
aborder les situations d'urgence. En outre, nous appelons nos gouvernements
à adresser une invitation permanente à toutes les organisations internationales
ayant un mandat d'observation électorale afin de rendre l'observation
électorale possible et plus systématique dans leurs États membres
respectifs à tous les niveaux, et d’assurer ainsi une meilleure mise
en œuvre des normes électorales et un enracinement plus poussé de
la démocratie
Comment les catastrophes
naturelles déforment les élections
7. La planète subit les effets négatifs
de la crise climatique qui, selon le Groupe d'experts intergouvernemental
sur l'évolution du climat (GIEC) des Nations Unies, accroît la fréquence
de certaines catastrophes naturelles et aggrave leurs conséquences.
Les États membres doivent intégrer dans leur réglementation, dès
que possible, des mesures pour s'adapter au changement climatique
et pour compenser l'impact de la crise climatique, notamment pour
les événements naturels extrêmes. En ce qui concerne l’impact sur
la stabilité politique des États, nous soulignons l'urgence d'adopter
des stratégies pour gérer les risques avant les catastrophes et
pour gérer les crises une fois qu'elles se sont produites. Une approche
globale, permettant de ne laisser personne de côté, et une coopération
renforcée entre pairs aux niveaux local, national et international
sont nécessaires en temps normal comme en temps de crise. Ces relations
sont indispensables pour faire face aux événements naturels extrêmes,
selon des modalités définies et avec des solutions techniques préétablies
servant à atténuer efficacement les risques.
8. Nous appelons les gouvernements à protéger le droit à un «environnement
sûr, propre, sain et durable» et, à cette fin, à identifier les
risques externes susceptibles d’affecter les processus électoraux,
car il est important de déterminer les organismes publics appropriés,
les fournisseurs de services essentiels et les administrations locales
et régionales qui auront le mandat, les compétences et les ressources
pour agir pendant une crise. L'institutionnalisation des processus
de gestion de crise détermine la capacité effective des administrations
électorales et des autres organismes publics à rétablir la continuité
du processus électoral. Un cadre unique combinant les bonnes pratiques
en matière de gestion des risques, de renforcement de la résilience
et de gestion des crises permet de consolider l'approche globale
de la société à l'égard de l'organisation d'élections pendant ou
après une urgence.
9. Nous encourageons les États à modifier leur législation électorale
afin de prévoir la tenue d’élections dans les situations d’urgence
ainsi que des critères clairs pour le report des élections. Nous
appelons également les administrations électorales à former les
responsables des élections à la préparation et à la réaction aux
catastrophes et à mettre en place des plans d'urgence pour assurer
la continuité du processus électoral en temps de crise.
L’impact des conflits
armés et de la guerre sur les élections
10. Nous savons que des élections
sont rarement organisées en temps de conflit armé, car il est quasiment impossible
de respecter les normes démocratiques internationales dans de telles
circonstances. Les conflits armés engendrent des déplacements de
population, à l’intérieur et en dehors du pays. Les déplacements massifs
de population, l’intimidation des électeurs et l’accès limité aux
bureaux de vote constituent des problèmes majeurs. Nous soulignons
la nécessité d’une feuille de route définissant les conditions minimales
à respecter pour l’organisation d’élections nationales et locales
après la levée de l’état d’urgence ou de la loi martiale, ainsi
que les mesures et les jalons qui garantissent que les élections
soient démocratiques et que les médias soient libres et diversifiés.
La feuille de route doit répondre aux problématiques liées à l’absence
de documents d’identité, aux conditions restrictives en matière
de résidence, à l’éducation des électeurs et à l’accès physique
limité aux infrastructures de vote. Les impératifs de sécurité et
les mesures visant à protéger les droits à la vie, à la santé et
à la sécurité doivent être soigneusement mis en balance avec le
droit à la participation politique et l’intégrité du processus électoral.
Une telle feuille de route contribuerait à générer un consensus
politique plus large sur le calendrier et les conditions à remplir
pour la tenue d’élections à l’issue d’un conflit. Nous pensons que
le Conseil de l’Europe, sous l’impulsion de l’Assemblée parlementaire,
pourrait jouer un rôle de premier plan dans l’élaboration d’une
telle feuille de route, en coordination avec d’autres acteurs clés.
11. Nous faisons front commun contre la guerre d’agression menée
par la Russie contre l’Ukraine et appelons nos gouvernements à continuer
d’apporter un soutien sans réserve à l’Ukraine. Quand la guerre
sera finie, il importera de préserver l’intégrité des élections
qui se tiendront en Ukraine à tous les niveaux de fonctions électives,
notamment en allouant des ressources suffisantes pour atténuer l’impact
colossal de la guerre. Pour sa part, le Conseil de l'Europe, en
coopération avec la communauté internationale, soutiendra son Etat
membre l'Ukraine pour s’assurer que les conditions préalables nécessaires
aux élections dans la période d'après-guerre soient remplies.
Comment l’IA et les
TIC transforment les élections
1. Nous rappelons en premier lieu
l’importance de la Convention du Conseil de l’Europe sur la cybercriminalité
(Convention de Budapest) et de ses protocoles, en particulier le
deuxième Protocole additionnel relatif au renforcement de la coopération,
qui sont des instruments essentiels pour garantir l’intégrité des
processus électoraux. Nous appelons à une ratification plus massive
du deuxième protocole, qui propose de nouveaux outils pour accélérer
et améliorer la coopération et la divulgation des preuves électroniques,
notamment la coopération directe avec les prestataires de services
d’autres pays et la coopération dans les situations d’urgence.
2. Nous soulignons et saluons le rôle de premier plan joué par
le Conseil de l’Europe dans l’élaboration de normes à l’ère du numérique
en vue de protéger les droits humains en ligne et hors ligne, en
particulier les travaux en cours du comité sur l’intelligence artificielle
du Conseil de l’Europe qui visent à élaborer un cadre international
juridiquement contraignant sur le développement, la conception et
l’application de l’intelligence artificielle, attendu pour la fin
de 2023. Les Lignes directrices de 2022 sur l’utilisation des technologies
de l’information et de la communication (TIC) dans les processus
électoraux des États membres du Conseil de l’Europe et les Principes
de 2020 pour un usage conforme aux droits fondamentaux des technologies numériques
dans les processus électoraux, tous deux élaborés par la Commission
de Venise, constituent également des documents de référence en la
matière.
3. Nous savons que nos élections sont non seulement menacées
par les conflits armés, mais aussi par les guerres hybrides. Nous
avons assisté à des situations d’ingérence étrangère dans les affaires
électorales et politiques de plusieurs pays de la part de différents
acteurs, souvent facilitée par des catalyseurs nationaux. Nous appelons
nos gouvernements à intensifier la lutte contre les menaces et acteurs
de l’ingérence étrangère et de la manipulation de l'information,
qui visent à fragiliser nos démocraties et nos institutions démocratiques. La
coopération interinstitutionnelle est une condition préalable à
la lutte contre ce type d'interférence.
4. Nous appelons les administrations électorales et les autres
acteurs concernés à renforcer leur capacité à suivre, analyser et
anticiper les cyberattaques et à surveiller les médias sociaux afin
de créer un système d’alerte précoce visant à identifier les discours
de désinformation et à élaborer des réponses adéquates. Les administrations
électorales devraient également améliorer leurs stratégies de communication
et de sensibilisation des électeurs à l’intégrité de l’information,
notamment en les encourageant à vérifier les faits, ainsi que l’éducation
aux médias et à l’information, afin de renforcer la résilience globale
face aux contenus préjudiciables. À cette fin, elles doivent travailler
en étroite collaboration avec la société civile, les établissements
d’enseignement et les médias, et en coordination avec les autres
organismes publics compétents. Les mécanismes de transparence et
de consultation peuvent contribuer à atténuer la désinformation,
la mésinformation et la peur.
5. La hausse des usages et de la dépendance à l’égard des TIC
entraîne l’augmentation des risques d’ingérence et de manipulation
des processus électoraux démocratiques. Les cyberattaques peuvent
saper la légitimité des élections et des mécanismes visant à les
protéger. Nous appelons les administrations électorales et les autres
acteurs concernés à améliorer la cybersécurité et à protéger les
infrastructures essentielles à la conduite des élections – systèmes,
réseaux, logiciels et données connectés à internet – contre toute exploitation
non autorisée, ainsi que la sécurité des technologies hors ligne
relatives aux élections.
6. Certes, l’intelligence artificielle (IA) permet d’automatiser
l’analyse des données et peut améliorer et renforcer le respect
des valeurs et des processus démocratiques, ainsi que les institutions,
notamment électorales, mais son utilisation, en particulier du fait
des algorithmes appliqués par les médias sociaux, est susceptible
de contribuer à polariser la société, entraînant la formation de
groupes distincts qui ne se comprennent plus et sont en conflit
croissant les uns avec les autres. L’intelligence artificielle peut
également avoir d’importantes répercussions sur la dimension de
genre, et générer notamment de l’exclusion fondée sur le sexe, des
préjugés algorithmiques et de la discrimination, un renforcement
des stéréotypes sexistes et une réification des femmes. L’utilisation
de l’IA peut affecter de manière similaire les minorités, provoquant
ou exacerbant la discrimination fondée sur l’origine ethnique ou
sociale, les convictions religieuses, l’âge, le handicap, l’orientation
sexuelle, l’identité de genre ou d’autres caractéristiques. Il est
essentiel que les administrations électorales et les professionnels
comprennent ces dynamiques afin de préserver l’intégrité et la crédibilité
des processus électoraux.
7. Nous reconnaissons cependant les avantages des TIC et invitons
les administrations électorales à renforcer leurs capacités d’exploitation
de leur utilisation de diverses façons, en tirant des leçons de l’expérience
acquise durant la pandémie et en réévaluant les procédures et les
pratiques électorales établies de longue date afin de soutenir les
progrès et les innovations lors des prochains cycles électoraux.
Nous appelons donc les chefs d’État et de gouvernement à réaffirmer
leur engagement à prendre toutes les mesures nécessaires pour lutter
contre les ingérences injustifiées et garantir des élections libres
et régulières afin d’élire des parlements et des institutions démocratiques
indépendants et efficaces, de consolider la démocratie pluraliste,
et de prévenir et de résister à tout recul de la démocratie, y compris
dans les situations d’urgence, de crise et de conflit armé.