Réaliser le droit humain à un environnement sûr, propre, sain et durable grâce au processus de Reykjavík
- Auteur(s) :
- Assemblée parlementaire
- Origine
- Discussion
par l’Assemblée le 18 avril 2024 (12e séance)
(voir Doc. 15955, rapport de la commission des questions sociales, de
la santé et du développement durable, rapporteur: M. Simon Moutquin). Texte adopté par l’Assemblée le 18 avril
2024 (12e séance).Voir
également la Recommandation
2272 (2024).
1. L'Assemblée
parlementaire rappelle que le défi du changement climatique représente
une urgence existentielle majeure pour l'humanité, et que cette
urgence découle principalement du déficit d'actions structurelles
et pérennes.
2. L’Assemblée est consternée de constater qu’à ce jour le Conseil
de l'Europe est le seul système régional des droits humains qui
n'a pas encore formellement reconnu le droit à un environnement
sain.
3. Depuis des décennies, l’Assemblée appelle pourtant les États
membres du Conseil de l’Europe à s’engager dans cette voie. Elle
réaffirme en particulier sa
Recommandation 2211
(2021) «Ancrer le droit à un environnement sain: la nécessité
d’une action renforcée du Conseil de l’Europe», adoptée à l’unanimité.
4. L’Assemblée note que, lors du 4e Sommet
des chefs d’État et de gouvernement du Conseil de l’Europe, qui
s’est tenu à Reykjavík les 16 et 17 mai 2023, les chefs d’État et
de gouvernement ont reconnu l’urgence d’efforts supplémentaires
pour protéger l’environnement, ainsi que pour contrer l’impact de
la «triple crise planétaire engendrée par la pollution, le changement
climatique et la perte de biodiversité» et ses effets sur les droits
humains, la démocratie et l’État de droit. Un Groupe de travail
intersecrétariat sur l’environnement a été mis en place en janvier 2024
et a réalisé un inventaire des activités existantes, des activités
prévues et des propositions de nouvelles activités. Il a également
proposé des éléments pour l’élaboration d’une première stratégie
du Conseil de l’Europe en matière d’environnement.
5. L’Assemblée prend également en compte le fait que, en 2024,
le Comité des Ministres devra faire suite aux travaux sur la faisabilité
d’instruments sur les droits humains et l’environnement, et sur
le projet de convention supplantant et remplaçant la Convention
sur la protection de l'environnement par le droit pénal (STE no 172).
6. Consciente de l’importance de ce moment stratégique, presque
un an après le 4e sommet et trois ans après
sa
Recommandation 2211
(2021), l’Assemblée tient à actualiser ses attentes et à participer
à la mise en œuvre du Processus de Reykjavík avec des propositions
concrètes et réalistes.
7. La stratégie post-Reykjavík en matière d’environnement sera
mise en œuvre par et pour les jeunes générations, et devra être
portée par la société civile. La boussole doit donc résolument indiquer
l’avenir et la barre être mise haut car le Conseil de l’Europe et
ses États membres engagent leur responsabilité pour des décennies.
L’Assemblée estime qu’il faut, à ce titre, se montrer très exigeant
en termes de redevabilité: transparence, éthique, accessibilité,
responsabilité, efficacité et fiabilité doivent être les maîtres-mots
de toutes les actions qui seront déployées.
8. L’Assemblée affirme la nécessité pour la future stratégie
de se doter d'une finalité claire sur le plan normatif européen
et encourage les décideurs à se concentrer sur l'élaboration d'un
instrument juridique contraignant reconnaissant un droit autonome
à un environnement sain au sein du Conseil de l'Europe.
9. L’Assemblée rappelle que la nature, le contenu et les implications
d’un droit à un environnement sain sont largement documentés depuis
des décennies et ont fait l’objet d’une foule de productions scientifiques, normatives
et judiciaires.
10. L’Assemblée constate avec satisfaction que la quasi-totalité
des États membres du Conseil de l’Europe reconnaissent une forme
ou une autre du droit à un environnement sain dans leur législation
nationale et que certains systèmes ont déjà intégré une vision écocentrée
de ce droit.
11. Sur le plan de la gouvernance, du fait de son profond impact
sur les modes de vie, la transition écologique ne se fera pas sans
l’assentiment des citoyens. Cela implique, selon l’Assemblée, que
la future stratégie mette en œuvre des mesures concrètes et ambitieuses
visant à favoriser l'acceptation sociale des politiques environnementales,
en garantissant une participation citoyenne réelle et significative
à l'échelle nationale.
12. Au-delà de la conformité aux normes et politiques environnementales,
l'Assemblée encourage les mesures visant à renforcer la résilience
des populations les plus vulnérables et à garantir leur inclusion
sans discrimination dans la transition vers un avenir durable.
13. L’Assemblée est convaincue que le développement de pôles environnementaux
spécialisés à tous les niveaux de gouvernance est garant d’une plus
grande capacité de réaction. Une telle approche devrait être promue
lors de la dotation budgétaire des juridictions. La participation
des parlements nationaux à ce développement et à la politique environnementale
en général impliquerait aussi que ces derniers disposent de structures
spécialisées en leur sein.
14. Au vu de ces éléments, l’Assemblée invite les États membres
du Conseil de l’Europe:
14.1 à poursuivre
sans relâche la réflexion au niveau national sur la nature, le contenu
et les implications du droit à un environnement sain afin que,
à un horizon proche, ce droit soit reconnu dans la loi comme un
droit humain autonome dans chaque État membre;
14.2 à renforcer leurs efforts en vue de promouvoir, dans toutes
les enceintes de gouvernance, la légitimité et la valeur ajoutée
du Conseil de l’Europe en tant que moteur dans l'élaboration d'un instrument
juridique contraignant reconnaissant un droit autonome à un environnement
sain;
14.3 à s’engager dans des projets innovants en vue de changer
les modes de gouvernance en matière environnementale et plus particulièrement:
14.3.1 à encourager la mise en place,
au niveau national, de mécanismes de participation citoyenne effectifs
telles que les assemblées citoyennes pour le climat, pour favoriser l'acceptation
sociale des politiques environnementales;
14.3.2 à encadrer, structurer et valoriser les initiatives locales
tournées vers les populations les plus vulnérables aux problèmes
environnementaux, tels les programmes visant à mobiliser les jeunes
des milieux populaires;
14.3.3 à promouvoir la mise en place de pôles environnementaux
spécialisés à tous les niveaux de gouvernance.