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Cesser l'emprisonnement des journalistes : la Turquie et l'Azerbaïdjan doivent respecter les normes établies par le Conseil de l'Europe

La liberté de la presse est menacée
©Shutterstock

Stefan Schennach (Autriche, SOC), Rapporteur général sur la liberté des médias et la sécurité des journalistes de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe (APCE), a exprimé aujourd'hui sa préoccupation face à la détention de journalistes, un phénomène terrible observé depuis de nombreuses années, surtout en Turquie et en Azerbaïdjan.

Un récent rapport de l'APCE intitulé « Menaces sur la liberté des médias et la sécurité des journalistes en Europe » observe que la Turquie est le pays qui compte le plus grand nombre de journalistes emprisonnés, actuellement 95 selon la Plateforme du Conseil de l'Europe pour renforcer la protection du journalisme et la sécurité des journalistes. « Les journalistes sont placés de manière arbitraire en arrestation provisoire et en détention, ils sont détenus pendant des mois, parfois des années, avant que leur affaire ne soit portée devant les tribunaux. Ces détentions sont le résultat d'un ciblage politisé de journalistes pour leurs reportages critiques ; ceci constitue une violation évidente de la liberté d’expression et du droit des journalistes à la liberté et à la sécurité », a déclaré M. Schennach.

De plus, dans le contexte de la crise pandémique actuelle, la détention dans les pénitenciers constitue un risque injustifié pour la santé, voire la vie. Un projet de loi récent propose de libérer environ un tiers des 300 000 détenus turcs, mais il exclut les personnes détenues pour des infractions liées au terrorisme, et donc la majorité des 95 journalistes en détention, car ils sont accusés ou reconnus coupables d'infractions liées au terrorisme, mais sans justifications solides.

Quant à l'Azerbaïdjan , où l'on compte actuellement 10 journalistes en détention, de nombreux journalistes sont arrêtés sur la base d'accusations falsifiées. Elchin Mammad, rédacteur en chef du journal Yukselish Namine, a été arrêté le 30 mars 2020 « pour avoir volé des bijoux ». Depuis 2015, il a fait l'objet à plusieurs reprises d'enquêtes judiciaires ou policières, d'interrogatoires, de perquisitions à domicile et au bureau. Aujourd'hui, s'il est reconnu coupable, il risque jusqu'à sept ans de prison.

Ibrahim Vazirov, un autre journaliste et blogueur azerbaïdjanais de Kanal24 Internet TV, a été arrêté le 13 avril 2020, quelques jours après que la police lui ait demandé de supprimer les reportages en ligne sur l'impact social et économique de Covid-19. Au cours des semaines précédentes, le journaliste avait produit des reportages vidéo critiquant les mesures de quarantaine du gouvernement. Un cas similaire est arrivé à Mirsahib Rahiloglu, où un journaliste de Reportyor.info, qui avait publié des entretiens avec des citoyens exprimant leur frustration face au manque de soutien financier pendant le confinement, a été arrêté pour « violation des règles de quarantaine » et détenu pendant 30 jours. Natig Izbatov, un journaliste de l'agence de presse en ligne 7gun.az, a été arrêté alors qu'il filmait des interviews de personnes sur les effets économiques de la mise en quarantaine. Il a été condamné à 30 jours de prison pour avoir enfreint les règles de quarantaine, alors qu'il disposait de documents officiels lui permettant de travailler comme journaliste. De plus, il aurait été agressé au poste de police, son téléphone fouillé et des images et des enregistrements supprimés.

« La situation actuelle en Turquie et en Azerbaïdjan est inacceptable. Dans ces deux États membres, la liberté d'expression, y compris la liberté des médias, est violée depuis plusieurs années. Par conséquent, j'appelle la Turquie et l'Azerbaïdjan à cesser d'urgence ces attaques contre les journalistes, afin de respecter les normes établies par le Conseil de l'Europe et de s'en tenir aux valeurs promues par notre Organisation », a conclu le Rapporteur général.