10/11/2020 Egalité et non-discrimination
Un webinaire de l'APCE sur la lutte contre la violence à l'égard des femmes dans le sport a été l’occasion d’entendre le témoignage saisissant d'une athlète française qui a subi des abus sexuels dans son sport, ainsi qu'une série d'initiatives de l'ONU, de la FIFA et d'autres organisations sur la manière de prévenir cette violence.
Sarah Abitbol, patineuse artistique française, a expliqué que son but en racontant son histoire, était d'essayer de protéger les autres à l'avenir. Il est encore difficile de parler des abus qu'elle a subis, mais elle a estimé qu'il était important de montrer aux autres que c'était la voie à suivre. Elle voulait expliquer à sa fille de neuf ans comment se protéger à l'avenir. « Nous devons parler aux jeunes de ces choses, de manière appropriée. Si j'avais eu quelqu'un, peut-être un travailleur social ou un autre athlète qui avait vécu cela – et qui m'avait dit clairement ce qu'un entraîneur a le droit de faire, et de ne pas faire – les choses auraient peut-être été différentes pour moi ».
Dagmar Schumacher, Directrice du Bureau de Bruxelles d’ONU Femmes, a présenté l'initiative « Le sport pour l'égalité des générations » de son organisation, qui vise à éliminer la violence dans le sport en donnant aux jeunes athlètes féminines les moyens d'agir, en leur donnant une voix, en remettant en cause les stéréotypes négatifs et en créant une culture de véritable égalité. « Le sport a une énorme capacité à favoriser l'autonomisation des filles – c'est un outil puissant pour transmettre des messages positifs, et une victoire en entraîne une autre ».
Pierre-Emmanuel Luneau-Daurignac, journaliste d'investigation qui a réalisé un documentaire télévisé sur cette question pour la chaîne franco-allemande ARTE, a déclaré qu'il avait été inspiré par une joueuse de tennis française, Isabelle Demongeot, qui a écrit un livre sur son expérience. Il a constaté que les fédérations sportives n'étaient « pas à l'aise » avec cette question, et avaient eu du mal à admettre qu'il y avait un problème. « Il était difficile de recueillir des informations, elles ont reculé quand j'ai fait mon documentaire - et elles le font toujours ». La clé était de changer la culture sportive, en établissant de nouvelles règles dans les fédérations.
Nadezda Knorre, Vice-présidente de WomenSport International, a déclaré que son organisation avait mis en place un groupe de travail sur le harcèlement sexuel il y a plusieurs années, et avait fait des recommandations pour le minimiser au début des années 2000. Les membres de ce groupe de travail ont également donné des conseils aux fédérations sportives nationales et internationales, travaillant par exemple avec le CIO. « Depuis, l'accent a été mis sur les violences psychologiques et physiques, ainsi que sur la négligence », a-t-elle souligné.
Béatrice Barbusse, maître de conférences et Secrétaire Générale de la Fédération Française de handball, a analysé le sujet d'un point de vue sociologique, en soulignant que le sport avait été, socio-historiquement, une « chasse gardée » des hommes, fondée sur la compétitivité, la domination et la force physique. « Le sport est une machine à comparer les gens, à comparer leurs corps. Et il s'agit d'exalter la douleur : si vous ne souffrez pas, vous ne faites pas assez d'efforts ». Dans cette atmosphère, le sexisme s'était institutionnalisé, avec peu de femmes entraîneurs, présidents ou dirigeants sportifs. « Il est urgent de féminiser le sport, afin de créer un climat plus accueillant et moins violent », a-t-elle souligné, ainsi que de fournir des modèles d'entraînement sportif non-intrusifs et non-violents, y compris pour les femmes. Tous ceux qui travaillent avec les jeunes devraient être invités à signer des déclarations sur l'honneur, tandis que les victimes devraient bénéficier d'un soutien complet – psychologique, juridique et social.
Joyce Cook CBE, en charge de la responsabilité sociale et de l'éducation de la FIFA, a déclaré que son organisation avait été en retard sur cette question, comme beaucoup d'autres, mais qu'elle prenait maintenant le problème très au sérieux, avec l'engagement total du Président de la FIFA. La FIFA a mis en place une équipe d'experts à plein temps pour développer des mesures de sauvegarde et de prévention, elle a canalisé cette information dans une « boîte à outils » pour les 211 associations membres de la FIFA, et elle met en place des ateliers régionaux de « formation des formateurs » sur la sauvegarde. Avec l'Open University, elle travaillait également à l'élaboration d'un diplôme sportif pour les agents de sauvegarde, le premier cours de ce type. Lorsque des cas individuels se présentent, la FIFA peut déployer des psychologues et des avocats spécialisés dans les droits humains pour mener des enquêtes, mais elle estime qu'il est nécessaire de créer une nouvelle entité mondiale indépendante pour mener des enquêtes indépendantes.
Le webinaire a été introduit par Zita Gurmai (Hongrie, SOC), rapporteure générale sur la violence à l'égard des femmes et Coordinatrice du réseau parlementaire « Pour le droit des femmes de vivre sans violence », et a été modéré par Killion Munyama (Pologne, PPE/DC), rapporteur de l'Assemblée sur « Pour des règles du jeu équitables – mettre fin à la discrimination à l’égard des femmes dans le monde du sport ».