Logo Assembly Logo Hemicycle

La déchéance de nationalité comme mesure de lutte contre le terrorisme: une approche compatible avec les droits de l’homme?

Réponse à Recommandation | Doc. 15006 | 12 novembre 2019

Auteur(s) :
Comité des Ministres
Origine
Adoptée lors de la 1359e réunion des Délégués des Ministres (5 novembre 2019). 2019 - Commission permanente de novembre
Réponse à Recommandation
: Recommandation 2145 (2019)
1. Le Comité des Ministres a examiné avec intérêt la Recommandation 2145 (2019) de l’Assemblée parlementaire intitulée «La déchéance de nationalité comme mesure de lutte contre le terrorisme: une approche compatible avec les droits de l’homme?», qu’il a communiquée au Comité européen de coopération juridique (CDCJ), au Comité de lutte contre le terrorisme (CDCT) et au Comité directeur pour les droits de l'homme (CDDH), pour information et commentaires éventuels.
2. Le Comité des Ministres souligne que la déchéance de la nationalité peut soulever des questions sous l’angle de l’article 15 de la Déclaration universelle des droits de l’homme (droit à la nationalité) et de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme (droit au respect de la vie privée et familiale) et rappelle que la Convention européenne sur la nationalité (STE n° 166) reconnaît le droit à la nationalité et interdit toute privation arbitraire de celle-ci. De plus, bien que l’octroi ou le retrait de la nationalité relève de la décision souveraine de chaque État, toute décision de retrait de la nationalité doit avoir une base légale et ne doit pas avoir un effet discriminatoire. La déchéance de nationalité ne doit pas constituer une mesure de lutte contre le terrorisme si la personne devient de ce fait apatride. Le Comité des Ministres rappelle qu’un apatride est une personne qui n’est considérée comme son ressortissant par aucun État en application de sa législationNote. La déchéance de nationalité devrait également être accompagnée des autres garanties prévues par la Convention européenne sur la nationalité.
3. Le Comité des Ministres relève que la Convention européenne sur la nationalité fournit un cadre juridique suffisant à la fois pour priver de nationalité une personne, à condition que celle-ci détienne au moins une autre nationalité (article 7), et pour protéger les personnes de la déchéance arbitraire de nationalité (article 4). Il encourage les États membres du Conseil de l’Europe qui ne l’ont pas encore fait à envisager de signer et/ou ratifier cette Convention. Il note également que la Convention dispose que les États parties peuvent prévoir la perte de nationalité dans le cas où le comportement d’une personne porte un préjudice grave aux intérêts essentiels de l'État (article 7.1.d). Des orientations sur les modalités d’application de cette disposition par les États parties pourraient en effet être examinées.
4. En ce qui concerne la recommandation 1.1 de l’Assemblée, le Comité des Ministres note qu’une étude comparative sur la législation des États membres du Conseil de l’Europe autorisant la privation de nationalité, pourrait servir de base pour de futures délibérations entre les États membres sur l’utilité de la déchéance de nationalité en tant que mesure de prévention du terrorisme et sur les problèmes juridiques qu’elle peut poser, ainsi que sur d’éventuelles mesures de substitution à la déchéance. Cette étude pourrait s’inscrire dans le cadre des activités de prévention de la Stratégie du Conseil de l’Europe contre le terrorisme (2018-2022), et en particulier de l’activité 3.1 relative à la collecte des meilleures pratiques relatives à la déradicalisation, au désengagement et à la réinsertion sociale. D’éventuelles lignes directrices telles que recommandées par l’Assemblée dans sa recommandation 1.2 pourraient, dans un second temps, s’inscrire dans un ensemble plus vaste de recommandations aux États membres portant sur la déradicalisation, le désengagement et la réinsertion sociale. Le Comité des Ministres tiendra l’Assemblée informée de tout développement dans ce domaine.