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Nécessité urgente d’une réforme électorale au Bélarus

Résolution 2371 (2021)

Auteur(s) :
Assemblée parlementaire
Origine
Discussion par l’Assemblée le 21 avril 2021 (12e séance) (voir Doc. 15253, rapport de la commission des questions politiques et de la démocratie, rapporteur: Lord David Blencathra). Texte adopté par l’Assemblée le 21 avril 2021 (12e séance).Voir également la Recommandation 2200 (2021).
1. L’Assemblée parlementaire souligne que les élections libres et équitables constituent le fondement même d’un gouvernement démocratique et la pierre angulaire de la démocratie représentative. Elle regrette vivement que les élections tenues au Bélarus n’aient jamais été conformes aux normes internationales de liberté et d’équité, et que ce système électoral défaillant ait été un facteur déterminant de l’actuelle crise politique, économique et des droits humains que le pays connaît depuis l’élection présidentielle du 9 août 2020.
2. Depuis plus de vingt ans, l’Assemblée, le Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE/BIDDH), la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise) et la société civile du Bélarus signalent les problèmes structurels du système électoral et recommandent, sans succès, de modifier la législation et la pratique électorales.
3. L’Assemblée rappelle qu’elle a dû, pour des raisons indépendantes de sa volonté, décliner l’invitation à observer l’élection présidentielle du 9 août 2020. Cependant, se fondant sur l’évaluation d’observateurs locaux indépendants qui ont conclu à des violations flagrantes des normes internationales en matière d’élections démocratiques, et sachant que le système électoral qui a valu des critiques au Bélarus par le passé est resté inchangé, l’Assemblée conclut aussi que l’élection présidentielle de 2020 n’a été ni libre ni équitable.
4. L’Assemblée est fermement convaincue qu’une réforme complète du système électoral, axée sur la mise en œuvre de toutes les recommandations antérieures de l’Assemblée, de l’OSCE/BIDDH et de la Commission de Venise, demeure essentielle pour poser le cadre de futures élections démocratiques, libres et équitables, capables de refléter véritablement la volonté du peuple du Bélarus et de lui permettre de reprendre confiance dans le processus électoral. Dans ce contexte, il est capital non seulement de réformer le cadre juridique, mais aussi de veiller à l’application de bonne foi de la législation par une administration électorale indépendante et impartiale, jouissant de la confiance du public.
5. Compte tenu de ce qui précède, l’Assemblée exhorte les autorités du Bélarus à mener une réforme globale du système électoral en tenant compte de l’ensemble des recommandations de l’Assemblée, de l’OSCE/BIDDH et de la Commission de Venise, en concertation étroite avec tous les acteurs concernés, en particulier la société civile. À cet égard, elle appelle les autorités du Bélarus à mettre la législation et la pratique électorales en conformité avec les normes internationales en matière d’élections démocratiques et, en particulier:
5.1 à garantir l’indépendance et l’impartialité de l’administration électorale en assurant une représentativité adéquate en son sein et en créant les conditions d’une composition politique équilibrée des commissions électorales à tous les niveaux, à commencer par la Commission électorale centrale (CEC), notamment:
5.1.1 en exigeant que la CEC inclue des représentants nommés par les principaux acteurs politiques, y compris les différents partis politiques et les représentants de la société civile, dotés d’un plein droit de vote;
5.1.2 en établissant des règles claires pour la nomination des membres des commissions électorales de niveau inférieur à la CEC par les autorités locales, y compris l’exigence d’inclure des membres de la commission nommés par tous les candidats;
5.2 à créer une liste électorale nationale accessible au public, afin d’accroître la transparence et le contrôle du processus d’inscription des électeurs;
5.3 à réglementer en détail le vote anticipé au moyen de mesures visant à garantir son intégrité, sa transparence et son caractère d’exception, notamment:
5.3.1 en décrivant de manière détaillée les mécanismes clairs garantissant la sûreté et la sécurité des urnes pendant le vote anticipé;
5.3.2 en limitant le nombre de bureaux de vote pour le vote anticipé;
5.3.3 en autorisant le vote anticipé uniquement dans des cas spécifiques et aux électeurs en mesure de prouver qu’ils ne peuvent pas être présents sur leur lieu de résidence le jour du scrutin;
5.4 à prendre des mesures pour garantir la transparence du dépouillement du scrutin, y compris en exigeant que chaque bulletin de vote soit montré, le vote annoncé, et que les résultats des élections dans chaque bureau de vote soient proclamés et affichés publiquement;
5.5 à permettre aux observateurs nationaux et internationaux d’accomplir leur tâche efficacement et sans entrave, notamment en les autorisant clairement:
5.5.1 à s’approcher des membres du bureau de vote pour vérifier les listes électorales et les signatures et pour observer le décompte des voix de manière directe et efficace, y compris par un accès direct et visuel aux bulletins de vote;
5.5.2 à être présents durant la vérification des signatures soumises pour la nomination des candidats;
5.5.3 à avoir accès à l’entreposage des bulletins de vote et des urnes pendant le vote anticipé, y compris en dehors des heures de travail;
5.6 à soumettre l’inscription des candidats à des critères clairs, complets et transparents, et à des conditions moins restrictives;
5.7 à soumettre toute décision des commissions électorales, y compris les résultats électoraux à un contrôle, et à prévoir la possibilité d’un examen judiciaire de toutes les décisions administratives.
6. L’Assemblée est consciente des appels lancés par des acteurs nationaux et internationaux pour la tenue d’élections anticipées fondées sur le système électoral actuel et souligne que de telles élections ne pourront être jugées raisonnablement libres et équitables que si une CEC véritablement indépendante et impartiale peut garantir, par le biais de dispositions réglementaires, d’ordonnances, de circulaires et d’instructions, que les conditions ci-dessus sont dans toute la mesure du possible respectées et que les observateurs nationaux et internationaux peuvent surveiller de manière appropriée l’ensemble du processus électoral.
7. L’Assemblée souligne que des élections démocratiques ne sont pas possibles sans le respect des droits humains, et notamment des libertés d’expression, de réunion et d’association. Elle condamne avec la plus grande fermeté la vague de violence sans précédent, les arrestations massives, les intimidations et les poursuites judiciaires dont font l’objet les opposants politiques, les défenseurs des droits humains, les journalistes, les professionnels des médias, les observateurs électoraux indépendants et les citoyens du Bélarus à la suite de l’élection présidentielle de 2020.
8. Cette répression violente, outre le fait qu’elle marque un mépris total pour les valeurs fondamentales défendues par le Conseil de l’Europe, constitue un obstacle majeur à la conduite d’une véritable réforme – y compris électorale – dans le pays. Se référant à sa Résolution 2372 (2021) «Les violations des droits de l’homme au Bélarus nécessitent une enquête internationale», l’Assemblée exhorte les autorités du Bélarus à mettre immédiatement un terme à toutes les violences.
9. Rappelant que l’intégration du Bélarus au sein du Conseil de l’Europe selon les valeurs et principes de l’Organisation demeure un objectif stratégique, l’Assemblée appelle les autorités du Bélarus et toutes les parties concernées, y compris tous les représentants de l’opposition et de la société civile, à mener de toute urgence dans le pays un dialogue transversal et inclusif afin de garantir une issue pacifique à la crise actuelle et d'ouvrir la voie aux réformes nécessaires dans l'intérêt de tous les citoyens du Bélarus. L’Assemblée – conjointement avec la Commission de Venise – souligne une nouvelle fois qu’elle est prête à fournir des orientations pratiques et techniques aux autorités du Bélarus en vue d’une réforme électorale. Elle est fermement convaincue que cette réforme et les autres réformes nécessaires ouvriront la voie à un nouveau Bélarus fondé sur les droits humains, la démocratie et l’État de droit.