C Exposé
des motifs, par Mme Circene, rapporteuse
1 Introduction
1. Lors de la 4e réunion des femmes membres de l’Assemblée
parlementaire du Conseil de l’Europe (Strasbourg, 26 juin 2008),
Gisèle Halimi, présidente de l’association «Choisir la cause des
femmes», a présenté son projet de la «clause de l’Européenne la
plus favorisée», une clause qui constituerait «une sorte de bouquet
législatif qui serait offert à chaque Européenne»
Note.
L’originalité de cette proposition réside dans le fait qu’il s’agit
de lutter contre une discrimination horizontale, entre les femmes
qui résident dans différents Etats membres de l’Union européenne.
2. A l’issue de cette réunion, Lydie Err (Luxembourg, SOC) et
plusieurs de ses collègues ont déposé une proposition de résolution
pour «étendre la “clause de l’Européenne la plus favorisée” à tous
les Etats membres du Conseil de l’Europe»
Note. Mme Err a représenté l’Assemblée
parlementaire au colloque européen intitulé «La clause de l’Européenne
la plus favorisée: le meilleur de l’Europe», organisé par «Choisir
la cause des femmes» à Paris les 27 et 28 novembre 2008. Le 5 décembre
2008, la commission sur l’égalité des chances pour les femmes et
les hommes m’a nommée rapporteuse.
2 Qu’est-ce
que la «clause de l’Européenne la plus favorisée»?
3. En juin 1971, Gisèle Halimi, avocate et défenseure
des droits de la femme, et de nombreux intellectuels français ont
créé l’association «Choisir la cause des femmes», qui vise à défendre
le statut de la femme dans la société française. Ses objectifs incluent
la lutte contre le viol, les violences physiques et morales, et
la lutte pour une égale représentation des femmes en politique.
Depuis 2005, une équipe regroupant des chercheuses, des juristes,
des économistes et des sociologues mène un travail important pour
dégager la «clause de l’Européenne la plus favorisée», sur la base
d’une analyse comparée des législations. Ce travail vise à identifier
les lois les plus en faveur des femmes dans les différentes législations
des Etats membres de l’Union européenne et touchant à tous les aspects
de la vie des femmes.
4. Gisèle Halimi a défini en 2008 la «clause de l’Européenne
la plus favorisée» comme un «mécanisme qui permettrait à l’Européenne
de bénéficier du statut le plus élevé pour les femmes déjà en vigueur
dans un pays de la communauté». Mme Halimi s’est attachée à puiser
dans le droit positif déjà existant des 27 pays de l’Union européenne
les meilleures lois qui font aujourd’hui leurs preuves dans un pays
européen
Note. L’ensemble de
ces lois devrait constituer le socle de la législation européenne,
afin d’être indifféremment appliqué dans tous les pays de l’Union
européenne.
5. Cinq thèmes primordiaux pour les droits des femmes ont été
répertoriés: «choisir de donner la vie» (éducation sexuelle, contraception,
avortement); «la famille, havre de paix ou piège pour les femmes»
(le mariage, le divorce, le congé parental, l’autorité parentale);
«violences, femmes battues, femmes violées, femmes prostituées»
(violences conjugales, viol, prostitution, harcèlement); «travail:
l’indépendance économique des femmes, socle de toutes les libertés
des femmes»; et «politique: quelle démocratie pour les femmes?».
Pour chaque thème, l’association a identifié des législations modèles,
les plus avancées dans chaque pays.
6. Aujourd’hui, «Choisir la cause des femmes» mène un travail
de sensibilisation des instances de l’Union européenne et des Etats
membres de l’Union européenne. Ces initiatives incluent la proposition
de créer un intergroupe au Parlement européen sur la clause et d’élaborer
une convention multilatérale qui «associerait la Belgique, l’Espagne,
la Suède et la France [et inviterait] les Parties contractantes
à rendre compatible leur législation avec la clause de l’Européenne
la plus favorisée»
Note. En Belgique, la sénatrice belge
Olga Zrihen, a introduit le 24 Janvier 2007 devant le Sénat belge
une proposition de résolution visant à appliquer la clause de l’Européenne
la plus favorisée
Note. En France, l’Assemblée nationale a
adopté le 23 février 2010 la Résolution no 421 visant à promouvoir
l’harmonisation des législations européennes applicables aux droits
des femmes. De nombreux contacts ont ainsi été établis pour promouvoir
l’harmonisation «vers le haut» des législations dans le domaine
de l’égalité entre les femmes et les hommes au sein de l’Union européenne.
3 S’inspirer de la
«clause de l’Européenne la plus favorisée» pour promouvoir l’avancée
des droits des femmes dans tous les Etats membres du Conseil de
l’Europe
7. L’action du Conseil de l’Europe repose sur le respect
de l’Etat de droit (y compris le principe de non-discrimination)
et le respect des droits de la personne humaine et de la démocratie
pluraliste (y compris l’égalité entre les femmes et les hommes).
Pourtant, il faut constater que l’égalité entre les femmes et les hommes,
considérée comme un critère fondamental de la démocratie
Note, est
loin d’être réalisée. Il faut encore «combler le fossé entre l’égalité
de droit et l’égalité de fait», comme cela a été souligné lors de
la 7e Conférence du Conseil de l’Europe des ministres responsables
de l’égalité entre les femmes et les hommes, qui s’est tenue à Bakou
les 24 et 25 mai 2010.
8. Par ailleurs, selon qu’elles résident dans un Etat européen
ou un autre, les femmes ne jouissent pas des mêmes droits, n’ont
pas accès au même respect de leurs droits fondamentaux et à une
protection égale de leur intégrité – je pense en particulier au
risque d’être exposée aux violences fondées sur le genre – ni aux mêmes
chances d’épanouissement, tant dans leur vie privée que dans leur
vie publique. Je constate qu’il existe donc, dans l’espace du Conseil
de l’Europe, une discrimination «territoriale» subie par les femmes.
Pire encore, on observe malheureusement, à l’échelle mondiale, un
recul des droits fondamentaux, qui, en Europe, malgré les avancées
législatives réalisées, se traduit par une régression des mentalités
qui pousse les femmes à abandonner le marché du travail.
9. Le projet de la «clause de l’Européenne la plus favorisée»
est une initiative innovante, stimulante, qui devrait nous encourager
à adopter les meilleures lois possibles en faveur de l’égalité entre
les femmes et les hommes en Europe. La mise en réseau des expériences
nationales au sein du Conseil de l’Europe, les travaux menés tant
par l’Assemblée parlementaire que par le Conseil de l’Europe dans
son ensemble
Note, ainsi que la volonté
exprimée par le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe Thorbjørn
Jagland de faire de l’égalité entre les femmes et les hommes une
priorité de l’action de notre Organisation au cours des prochaines
années, m’encouragent à poursuivre dans ce sens. Ce rapport entend
identifier, parmi les dispositions législatives des Etats membres
du Conseil de l’Europe, celles qui sont les plus favorables aux
femmes, et proposer que les législateurs dans l’ensemble des Etats
membres du Conseil de l’Europe s’en inspirent.
10. Je considère que l’égalité entre les femmes et les hommes
est encore loin d’être atteinte, non seulement en fait, mais aussi
en droit. Pour que cette question reste prioritaire dans les travaux
des parlements nationaux, et pour mobiliser davantage de parlementaires
autour des thèmes que nous avons identifiés comme prioritaires,
je propose que l’Assemblée rédige un manuel pour promouvoir l’égalité
entre les femmes et les hommes à l’usage des parlementaires, leur
proposant des outils ainsi qu’un recueil des bonnes pratiques législatives
qui pourront inspirer leur action. Ce manuel pourra s’inspirer du Manuel pour combattre la violence à l’égard
des femmes et du Manuel à
l’usage des parlementaires sur la Convention du Conseil de l’Europe
sur la lutte contre la traite des êtres humains déjà
publiés par l’Assemblée.
11. L’objectif de ce rapport est d’identifier les sujets qui pourraient
être retenus pour proposer un «bouquet législatif du Conseil de
l’Europe en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes»,
s’inspirant de la méthode développée par Gisèle Halimi. Lors de
la réunion du 27 mai 2010, la commission sur l’égalité des chances
pour les femmes et les hommes a marqué son accord sur les thèmes
qui pourront être inclus dans le «bouquet législatif du Conseil
de l’Europe». Ce rapport vise à identifier des lois exemplaires
– qui s’inspirent en partie des bonnes pratiques identifiées par
Gisèle Halimi pour ce qui concerne les pays de l’Union européenne
– et à proposer des actions qui pourront être entreprises par les
Etats membres. Cette liste est loin d’être exhaustive et ce travail
d’identification des législations les plus avancées méritera d’être
poursuivi et approfondi.
4 Une proposition
de bouquet législatif pour faire avancer les droits des femmes dans
tous les Etats membres du Conseil de l’Europe
12. L’identification d’un «bouquet législatif en faveur
de l’égalité entre les femmes» parmi les 47 Etats membres du Conseil
de l’Europe est un projet ambitieux. Aussi je propose de limiter
le nombre de thèmes retenus, en privilégiant les domaines qui constituent
des points forts du Conseil de l’Europe, ou sur lesquels l’Assemblée
et/ou le Conseil de l’Europe dans son ensemble ont déjà pris position.
13. Pour définir ce «bouquet législatif type» du Conseil de l’Europe,
et suivant ma proposition, la commission a décidé de retenir les
cinq thèmes suivants, qui seront développés ci-après:
a la lutte contre la violence à l’égard
des femmes en Europe;
b la lutte contre la traite des êtres humains;
c la participation des femmes à la vie politique et publique
et la lutte contre les stéréotypes sexistes;
d la santé génésique (y compris les droits sexuels et reproductifs);
e les femmes et la vie économique.
4.1 La lutte contre
la violence à l’égard des femmes
14. La lutte contre la violence à l’égard des femmes
a fait l’objet de nombreux travaux au sein du Conseil de l’Europe
depuis plusieurs années.
14.1 Dans
sa Recommandation CM/Rec(2007)17 sur les normes et mécanismes d’égalité
entre les femmes et les hommes, adoptée le 21 novembre 2007, le
Comité des Ministres considère que «la violence à l’égard des femmes
est l’une des plus graves violations des droits de la personne humaine et
des libertés fondamentales des femmes»
Note et recommande aux
Etats membres du Conseil de l’Europe «l’application d’une législation
et de procédures judiciaires efficaces pour prévenir la violence à
l’égard des femmes»
Note.
Cette recommandation complète la Recommandation Rec(2002)5 sur la protection
des femmes contre la violence.
14.2 Depuis plus d’une décennie
Note,
l’Assemblée est engagée dans la lutte contre la violence à l’égard des
femmes. Cela s’est notamment traduit par la mise en œuvre de la
dimension parlementaire de la campagne du Conseil de l’Europe «Stop
à la violence domestique faite aux femmes» (2006-2008). Dans sa
Résolution 1582 (2007) sur les parlements unis pour combattre la violence domestique
contre les femmes: évaluation à mi-parcours de la campagne, puis
dans sa
Résolution 1635
(2008) «Combattre la violence à l’égard des femmes: pour une
convention du Conseil de l’Europe», l’Assemblée a invité les parlements
nationaux à adopter et contrôler l’application de sept mesures phares
identifiées par l’Assemblée et considérées comme des normes minimales
Note.
14.3 Pour soutenir les efforts des parlements nationaux, l’Assemblée
a rédigé un «Manuel à l’usage des parlementaires pour combattre
la violence domestique contre les femmes», qui suggère des actions de
sensibilisation ainsi que des actions législatives et normatives
visant à prévenir et combattre cette violation des droits de la
personne humaine. Le
Recueil des actions
et bonnes pratiques, publié par l’Assemblée à l’issue
de la campagne, a permis de mettre en évidence les actions concluantes développées
par les parlements nationaux
Note.
14.4 Aujourd’hui, le Conseil de l’Europe travaille à l’élaboration
d’une convention sur la prévention et la lutte contre la violence
à l’égard des femmes et la violence domestique, qui regroupera un
corpus de normes et standards en matière de protection des victimes,
de poursuites des auteurs, de prévention et de politiques en faveur
de l’égalité entre les femmes et les hommes
Note.
La commission sur l’égalité des chances pour les femmes et les hommes
est étroitement associée à l’élaboration de ce texte et sera amenée
à en promouvoir la mise en œuvre.
15. La lutte contre la violence à l’égard des femmes reste donc
une priorité d’action pour le Conseil de l’Europe. Pourtant, les
législations dans les 47 Etats membres sont inégalement avancées
et le succès de la ratification de la future convention du Conseil
de l’Europe et de sa mise en œuvre au niveau du continent européen
dépendra de la capacité des Etats membres à adopter et mettre en
œuvre des législations efficaces.
16. Dans ce domaine, la loi espagnole du 28 décembre 2004, dite
loi cadre relative aux mesures de protection intégrale contre la
violence de genre, est particulièrement avancée. Elle comprend des
mesures de sensibilisation à la violence de genre dans les écoles
dès le plus jeune âge
Note, ainsi que
de formation du personnel des services publics pour leur permettre
de reconnaître les femmes victimes de violence afin de les diriger
vers les services de police et les centres d’accueil. La loi comprend
également des mesures de protection d’urgence de la victime
Note,
imposant la séparation physique de la victime et de l’auteur des
violences dans un délai rapide en garantissant la protection des
victimes. Elle prévoit des sanctions fortes contre les auteurs de
cette violence, assorties de programmes d’aide spécifiques. Elle
comporte enfin la création de juridictions spécialisées incluant,
dans chaque siège de tribunal, un juge formé spécifiquement aux
violences faites aux femmes; des sections ainsi formées doivent
être inscrites dans les parquets et les cours d’appel. La loi espagnole
pourrait être considérée comme une loi de référence, dont pourraient
s’inspirer les autres Etats membres du Conseil de l’Europe.
17. Depuis 1996, la loi autrichienne relative à la protection
contre la violence au sein de la famille permet à la justice civile
d’édicter au bénéfice de la victime des ordonnances de protection
pouvant en particulier prévoir la jouissance exclusive du domicile
familial, donner à la police la possibilité d’expulser l’auteur
des violences conjugales de ce logement en attendant la décision
du juge, et organiser la coopération entre la police, la justice
et les structures locales d’assistance aux femmes
Note.
18. En matière de lutte contre la violence à l’égard des femmes,
l’Assemblée devrait préconiser aux Etats membres de s’inspirer:
- de la loi cadre espagnole relative
aux mesures de protection intégrale contre la violence de genre,
pour le dispositif complet de mesures qu’elle comporte en matière
de protection et de réhabilitation des victimes et de prévention
de la violence à l’égard des femmes;
- de la loi autrichienne, pour les mesures d’éloignement
du conjoint violent et les dispositifs de coopération multiagences
mis en place pour venir en aide aux victimes.
4.2 La lutte contre
la traite des êtres humains
19. La lutte contre la traite des êtres humains – qui
comprend la traite à des fins d’exploitation sexuelle qui affecte
en particulier les femmes, le trafic d’organes et le travail forcé
– a abouti en 2005 à l’adoption d’une Convention du Conseil de l’Europe
sur la lutte contre la traite des êtres humains
Note.
De plus, la Recommandation CM/Rec(2007)17 du Comité des Ministres
sur les normes et mécanismes d’égalité entre les femmes et les hommes
invite les Etats membres à adopter une législation et des procédures
judiciaires efficaces pour protéger les victimes de la traite et
en punir les auteurs. Dans sa
Résolution
1702 (2010) «Lutte contre la traite des êtres humains: promouvoir
la convention du Conseil de l’Europe», l’Assemblée a invité les parlements
nationaux à promouvoir la ratification et la mise en œuvre de cette
convention ainsi que son mécanisme de suivi.
20. Cette même résolution invite les Etats membres à examiner
la législation en vigueur en Suède et au Royaume-Uni
Note, qui constitue
des lois de référence en faveur des femmes dans le domaine de la
lutte contre la traite des êtres humains, et qui pourraient être
incluses dans le «bouquet législatif» proposé par le Conseil de
l’Europe.
21. Dans son Manuel à l’usage des parlementaires sur la Convention
du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains,
l’Assemblée a identifié plusieurs mesures législatives, qui sont
ici en partie mises en évidence:
22. L’Assemblée devrait préconiser aux Etats membres de s’inspirer:
- des lois suédoises et britanniques
pour lutter contre la traite des êtres humains en érigeant en crime
le fait de payer pour avoir des rapports sexuels avec une femme
prostituée qui a été soumise à la traite ou à des contraintes par
des hommes;
- des lois belges de 2003 sur l’assistance aux victimes
de la traite des êtres humains et contre les pratiques des «marchands
de sommeil»Note;
- de la loi bulgare de 2007 relative au dédommagement financier
et à l’assistance des victimes d’infractionsNote.
4.3 La participation
équilibrée des femmes et des hommes à la prise de décision politique
et publique
23. Après l’adoption de la Recommandation Rec(2003)3,
la participation équilibrée des femmes et des hommes à la prise
de décision politique et publique a été identifiée comme «un élément
crucial de la démocratie» dans le plan d’action adopté lors du 3e
Sommet des chefs d’Etat et de gouvernement du Conseil de l’Europe,
en mai 2005. Le Comité des Ministres a, dans une déclaration de
mai 2009, réaffirmé que la participation égale des femmes et des
hommes à la vie politique est un des fondements de la démocratie
et un des objectifs de l’Organisation.
24. L’Assemblée a adopté une série de résolutions et de recommandations
visant à promouvoir la participation des femmes à la prise de décision
Note. Dernièrement, l’Assemblée a adopté
la
Recommandation 1899
(2010) «Augmenter la représentation des femmes en politique
par les systèmes électoraux» (rapporteuse: Mme Err, Luxembourg,
SOC) et demandé «une réforme du système électoral pour le rendre
plus favorable à la représentation des femmes»
Note, ainsi que l’autorisation
«des mesures de discrimination positive en faveur du sexe sous-représenté»
Note dans les Etats membres du Conseil de l’Europe.
25. Le rapport de Mme Err souligne le cas de la Belgique, un des
10 Etats membres du Conseil de l’Europe ayant adopté des quotas
légaux obligatoires pour les parlements nationaux et ayant prévu
également l’ordre des candidats sur les listes
Note. La loi belge
Note a été par ailleurs
retenue par Gisèle Halimi et pourrait être intégrée dans le «bouquet
législatif» du Conseil de l’Europe.
26. Promouvoir la participation équilibrée des femmes et des hommes
à la prise de décision suppose aussi de combattre les stéréotypes,
en particulier dans les médias, comme l’a souligné l’Assemblée dans
sa
Résolution 1751 (2010)Note.
Les réactions violentes ou tendancieuses suscitées par le rapport
explicatif de cette résolution dans certains médias montrent que
ce sujet reste sensible, controversé et au cœur de la lutte pour l’égalité
pour les femmes et les hommes. L’invisibilité des femmes dans les
médias, leur sous-représentation ou la persistance de stéréotypes
sexistes qui confinent les femmes et les hommes dans des rôles traditionnellement
conférés par la société constituent en effet une entrave à l’égalité
entre les femmes et les hommes.
27. Par ailleurs, l’Assemblée, en instituant le «prix de l’Egalité
entre les femmes et les hommes» en 2009, a souligné le rôle fondamental
des partis politiques pour promouvoir l’accès des femmes aux postes
de décision au sein des partis et aux fonctions élues, et la nécessité
de promouvoir des mesures positives en ce sens. Le prix 2009 a été
décerné au Parti socialiste du Portugal, qui a réussi alors qu’il
était au pouvoir à rendre obligatoire un quota minimal de 33% du
sexe sous représenté pour tous les partis et à toutes les élections, appliquant
ainsi le quota volontairement consenti en son sein à tous les autres
partis
Note.
28. L’Assemblée devrait inviter les Etats membres du Conseil de
l’Europe à s’inspirer:
- de la
loi belge, qui a inscrit la parité dans la Constitution, mis en
place des quotas à tous les niveaux de décision et qui prévoit des
sanctions efficaces en déclarant irrecevables des listes non conformes
à la loi pour toutes les élections;
- de la loi portugaise, pour avoir rendu obligatoire un
quota de 33 % de femmes pour tous les partis politiques et à toutes
les élections.
4.4 La santé génésique
29. L’Assemblée s’est penchée sur le thème de la santé
reproductive à plusieurs reprises. Dans sa
Résolution 1399 (2004) sur une stratégie européenne pour la promotion de la
santé et des droits en matière de sexualité et de procréation, elle
a recommandé aux Etats membres de travailler ensemble à la conception d’une
stratégie européenne pour la promotion de la santé et des droits
en matière de sexualité et de procréation, et d’élaborer, adopter
et mettre en œuvre des stratégies nationales d’ensemble concernant
la santé sexuelle et reproductive. En 2010, dans sa
Recommandation 1903 (2010) «Quinze ans après le Programme d’action de la Conférence
internationale sur la population et le développement», l’Assemblée
a exhorté les Etats membres à «garantir un accès universel à des
services complets de santé sexuelle et génésique, en particulier
l’accès à des méthodes de planning familial abordables, acceptables
et appropriées, à un personnel d’accouchement qualifié et à des
soins obstétriques d’urgence pour prévenir les grossesses non désirées,
les avortements, les maladies sexuellement transmissibles (MST),
les problèmes de santé et la mortalité maternels».
30. En particulier, en ce qui concerne l’avortement, l’Assemblée
a invité les Etats membres, dans sa Résolution 1607 (2008) sur l’accès
à un avortement sans risque et légal en Europe, à dépénaliser l’avortement si
ce n’est déjà fait et à lever les restrictions qui entravent en
fait ou en droit l’accès à un avortement sans risque. Elle précise
que le choix ultime d’avoir recours ou non à un avortement devrait
revenir à la femme, qui devrait disposer des moyens d’exercer ce
droit de manière effective
Note.
31. Dans son chapitre sur «Choisir la vie», Gisèle Halimi met
en évidence le Danemark pour l’éducation à la sexualité dès l’école
primaire et les centres de planification familiale, les Pays-Bas
pour l’accès direct, libre et gratuit à la contraception pour les
mineures et les femmes adultes, la Suède pour le respect du droit
des femmes à disposer de leur corps et le délai légal en matière
d’avortement (dix-huit semaines)
Note.
32. En matière de santé reproductive, et en particulier de l’accès
à un avortement sans risque et légal, il est important que s’assurer
que les femmes puissent exercer dans les faits leurs droits. Dans
ce contexte, et comme l’a souligné Mme McCafferty (Royaume-Uni,
SOC), l’objection de conscience non réglementée constitue une entrave
à l’accès effectif des femmes à des soins médicaux légaux. Dans
ce domaine, le système de santé et de recrutement de certains pays
est organisé de manière à disposer de médecins prêts à fournir ces
services et capables de le faire. Par exemple, les lignes directrices
sur la nomination des médecins à des postes hospitaliers publiées
par le National Health Service au Royaume-Uni recommandent que l’interruption
de grossesse fasse partie des fonctions du poste à pourvoir si des
services adéquats d’interruption de grossesse «ne peuvent autrement
être disponibles», que le descriptif de l’emploi énonce expressément
ces obligations en matière d’interruption de grossesse et que les
candidats soient «prêts à s’acquitter de toutes les tâches qui peuvent
leur être demandées s’ils sont nommés», y compris celles liées à l’interruption
de grossesse
Note.
33. L’Assemblée devrait préconiser de s’inspirer, en matière de
santé reproductive, des lois:
- des
Pays-Bas, pour l’accès direct, libre et gratuit à la contraception
pour les mineures et les femmes adultes;
- du Danemark, pour l’éducation à la sexualité dès l’école
primaire et les centres de planification familiale;
- de la Suède, pour le respect des femmes à disposer de
leur corps;
- du Royaume-Uni, pour leur système de santé et de recrutement
organisé de manière à disposer de médecins prêts à fournir les services
de soins de santé génésique et capables de le faire.
4.5 Femmes et vie économique
34. Le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe a
consacré le principe de la participation des femmes et des hommes
dans la prise de décision, y compris dans la vie économique, dans
sa Recommandation Rec(2003)3. L’Assemblée a notamment travaillé
sur la lutte contre les discriminations sur le marché du travail et
dans les systèmes de pensions
Note,
l’égalité salariale
Note,
et a lancé la préparation du rapport «Davantage de femmes dans les
instances économiques et sociales»
Note.
35. En matière de participation équilibrée des femmes et des hommes
dans la prise de décision économique, la Norvège a mis en place
des quotas imposant au moins 40 % de femmes dans les conseils d’administration,
tant dans le secteur privé que dans le secteur public. L’exemple
de la Norvège peut être proposé comme une bonne pratique législative
et peut, selon le rapporteur sur «le fossé salarial entre les femmes
et les hommes», contribuer à réduire l’écart salarial
Note.
36. L’Assemblée devrait préconiser de s’inspirer:
- de la législation norvégienne,
pour l’instauration d’un quota de 40 % de femmes dans les conseils d’administration
des entreprises;
- des législations scandinaves (notamment islandaise, norvégienneNote, suédoise) instaurant une quote-part
paternelle pour les congés parentaux, qui encouragent les pères
à prendre un congé paternité.
5 Conclusions
et recommandations
37. En définissant un «bouquet législatif en faveur de
l’égalité entre les femmes et les hommes», l’Assemblée pourrait
identifier les législations les plus avancées dans les Etats membres
du Conseil de l’Europe dans les cinq domaines cités. Elle pourrait
encourager les parlements nationaux des Etats membres à s’en inspirer
pour proposer les lois les plus avancées pour l’ensemble des femmes
vivant sur le continent européen.
38. L’Assemblée pourrait inviter les parlements nationaux des
Etats membres du Conseil de l’Europe:
- à inclure, dans leurs priorités de travail et leur agenda
politique, les thèmes identifiés comme prioritaires par l’Assemblée,
à savoir:
a la lutte contre la violence
à l’égard des femmes en Europe;
b la lutte contre la traite des êtres humains;
c la participation des femmes à la vie politique et publique
et la lutte contre les stéréotypes sexistes;
d la santé génésique (y compris les droits sexuels et reproductifs);
e les femmes et la vie économique;
- à consacrer la Journée
internationale de la femme (8 mars) à la promotion du «bouquet législatif»
du Conseil de l’Europe, et notamment à l’évaluation de l’avancée
des droits des femmes dans leur pays.
39. L’Assemblée pourrait décider:
- de lancer la rédaction d’un manuel pour la promotion de
l’égalité entre les femmes et les hommes à l’usage des parlementaires,
qui permettrait d’identifier les stratégies parlementaires à développer
au sein des parlements, ainsi que les bonnes pratiques législatives
pour promouvoir le «bouquet législatif» identifié par l’Assemblée;
- de promouvoir des programmes de coopération parlementaire
(sous réserve des disponibilités financières) pour promouvoir l’égalité
des femmes et des hommes au sein des parlements nationaux.
40. Enfin, l’Assemblée devrait inviter le Comité des
Ministres à assurer à toutes les femmes, quel que soit le pays de
résidence dans l’espace du Conseil de l’Europe, les mêmes droits
à l’égalité entre les femmes et les hommes et une interprétation
uniforme de ces droits, par l’élaboration d’un protocole additionnel
à la Convention européenne des droits de l’homme sur l’égalité entre
les femmes et les hommes.