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Contestation, pour des raisons substantielles, des pouvoirs non encore ratifiés de la délégation parlementaire de la Fédération de Russie

Résolution 2422 (2022)

Auteur(s) :
Assemblée parlementaire
Origine
Discussion par l’Assemblée le 26 janvier 2022 (6e séance) (voir Doc. 15443, rapport de la commission pour le respect des obligations et engagements des États membres du Conseil de l'Europe (commission de suivi), rapporteur: M. Piero Fassino; et Doc. 15445, avis de la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles, rapporteure: Mme Maria Jufereva-Skuratovski). Texte adopté par l’Assemblée le 26 janvier 2022 (6e séance).
1. L'Assemblée parlementaire rappelle ses Résolution 1990 (2014), Résolution 2034 (2015), Résolution 2063 (2015), Résolution 2292 (2019), Résolution 2320 (2020) et Résolution 2363 (2021), et réitère les recommandations qu’elle a adressées aux autorités russes.
2. L’Assemblée se déclare extrêmement préoccupée par l’escalade des tensions qui menacent la sécurité en Europe et par le renforcement des troupes de la Fédération de Russie le long de la frontière avec l’Ukraine.
3. En particulier, les lois relatives aux agents étrangers, aux organisations indésirables et à l’extrémisme, modifiées récemment, sont incompatibles avec les normes du Conseil de l’Europe et entraînent des conséquences négatives sur la démocratie, l’État de droit et le respect des droits humains.
4. La dissolution de Memorial, malgré de multiples demandes de la communauté internationale, l’une des organisations de défense des droits humains les plus respectées de la Fédération de Russie, porte un coup sérieux à la démocratie et aux libertés d’association et d’expression. Il s’agit d’un tournant et d’un obstacle important au fonctionnement de la société civile indépendante en Fédération de Russie.
5. Le sort de M. Alexeï Navalny, arrêté et détenu malgré l’arrêt rendu par la Cour européenne des droits de l’homme, est extrêmement préoccupant, notamment compte tenu de son rôle dans le processus politique en Fédération de Russie, tout comme les événements qui ont entouré son empoisonnement.
6. L'Assemblée note que, contrairement aux dernières élections législatives et présidentielles organisées en Fédération de Russie en 2016 et 2018 respectivement, elle a été invitée à observer les élections législatives de 2021. Elle regrette néanmoins les lacunes dans le droit électoral et la conduite des élections législatives de 2021 à la Douma, telles qu'elles ont été identifiées par la mission d'évaluation de l’Assemblée et la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise).
7. L’Assemblée exprime sa très vive inquiétude quant à la détérioration de la situation en ce qui concerne le pluralisme, les droits humains et les libertés fondamentales dans la Fédération de Russie, qui s’est manifestée par la répression à l’encontre des opposants politiques, de la société civile indépendante, des voix dissidentes et des journalistes exprimant des critiques.
8. L'Assemblée regrette qu'aucun progrès n'ait été accompli pour donner suite à ses demandes et à ses requêtes dans le cadre de la guerre de 2008 entre la Fédération de Russie et la Géorgie, telles qu'exprimées dans les Résolution 1633 (2008), Résolution 1647 (2009) et Résolution 1683 (2009), ainsi qu'au sujet de l'intervention militaire dans le Donbass et l'annexion illégale de la Crimée par la Fédération de Russie, telles qu'exprimées dans les Résolution 1990 (2014), Résolution 2034 (2015), Résolution 2063 (2015) et Résolution 2132 (2016).
9. L'Assemblée exprime sa plus vive déception de constater qu’aucune des recommandations qui figuraient dans l'ensemble des résolutions intitulées «Contestation, pour des raisons substantielles, des pouvoirs non encore ratifiés de la délégation parlementaire de la Fédération de Russie» n'ont été suivies.
10. En outre, l'Assemblée regrette le manque de coopération de la Fédération de Russie avec l'Assemblée dans la préparation des rapports intitulés «Faire la lumière sur le meurtre de Boris Nemtsov» (Résolution 2297 (2019)); «L'arrestation et la détention d'Alexeï Navalny en janvier 2021» (Résolution 2375 (2021)); «Empoisonnement d'Alexeï Navalny» (Résolution 2423 (2022)) et «Prisonniers politiques en Fédération de Russie».
11. Si les préoccupations susmentionnées justifient des questions quant au respect par la Fédération de Russie de ses engagements et obligations en tant qu'État membre du Conseil de l'Europe, il convient de souligner que l'Assemblée constitue l'unique plateforme parlementaire paneuropéenne de dialogue politique, avec la participation de tous les pays européens, sur les moyens de faire respecter les valeurs et les normes que défend le Conseil de l'Europe, y compris en Fédération de Russie. Il est rappelé que l'Assemblée ne peut jouer un rôle significatif dans ce processus que si la Fédération de Russie est un État membre de l'Organisation qui participe pleinement à ses organes, mécanismes de coopération et activités.
12. À cet égard, il convient de reconnaître l'engagement de la délégation russe à coopérer avec la commission pour le respect des obligations et engagements des États membres du Conseil de l'Europe (commission de suivi). L'Assemblée devrait saisir cette occasion pour exercer une influence sur l'évolution de la situation de la démocratie, de l’État de droit et des droits de l’homme dans la Fédération de Russie.
13. Il convient de souligner que, de manière générale, la Fédération de Russie est un membre actif du Conseil de l'Europe et qu'elle participe intensément à ses nombreuses activités, notamment au titre des conventions concernant le respect des engagements et obligations qu'elle a contractés au sein de l'Organisation.
14. La primauté des décisions de la Cour constitutionnelle de la Fédération de Russie sur le droit international, y compris les décisions de la Cour européenne des droits de l'homme, ne garantit pas aux citoyens russes un recours en matière de droits humains et la possibilité de tenir les autorités pour responsables, ce qui demeure un argument important en faveur de la poursuite de la coopération à tous les niveaux, y compris au niveau parlementaire.
15. Il faut noter que l’Union européenne, l’Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN), l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et aussi les États-Unis, tout en exprimant clairement leurs critiques à l’égard du comportement des autorités russes, n’ont pas interrompu leurs relations avec Moscou et ce, afin de maintenir un dialogue sur la sécurité en Europe et de favoriser une évolution qui verra l’État de droit et les principes démocratiques respectés en Fédération de Russie.
16. En conséquence, l’Assemblée décide de ratifier les pouvoirs des membres de la délégation russe.
17. Dans le même temps, l’Assemblée demande aux autorités russes de donner suite aux recommandations figurant dans les Résolution 1633 (2008), Résolution 1647 (2009), Résolution 1683 (2009), Résolution 1990 (2014), Résolution 2034 (2015), Résolution 2063 (2015), Résolution 2132 (2016), Résolution 2292 (2019), Résolution 2320 (2020) et Résolution 2363 (2021), de mettre pleinement en œuvre la Résolution 2375 (2021) «L'arrestation et la détention d’Alexeï Navalny en janvier 2021», la Résolution 2423 (2022) «Empoisonnement d’Alexeï Navalny» et la Résolution 2297 (2019) «Faire la lumière sur le meurtre de Boris Nemtsov», et en particulier:
17.1 de rappeler dès que possible ses contingents militaires de la frontière ukrainienne et de mettre fin à l'escalade des tensions militaires;
17.2 de répondre aux préoccupations relatives à l’abrogation de la loi de 2012 sur les agents étrangers, telle que modifiée, et à la loi de 2015 sur les organisations indésirables, telle que modifiée, et d’amender la loi relative à l'extrémisme afin de la rendre conforme aux normes du Conseil de l'Europe;
17.3 de ne pas adopter de nouvelles lois imposant des restrictions supplémentaires à la société civile, aux défenseurs des droits humains et aux journalistes;
17.4 de s’abstenir de tout acte conduisant à la violation des droits fondamentaux et des libertés, en particulier la liberté d’association, de réunion et d’expression;
17.5 de coopérer avec toutes les commissions de l’Assemblée et de faciliter les missions de suivi et d’information de l’Assemblée;
17.6 d’intégrer, dans le système juridique russe, les arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme et de les mettre en œuvre;
17.7 de mettre en œuvre sans délai toutes les décisions du Comité des Ministres concernant l'exécution des arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme et les multiples recommandations du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT);
18. En réponse à la ratification des pouvoirs de la délégation russe, l’Assemblée attend un dialogue constructif aboutissant à des résultats concrets. Elle invite sa commission de suivi à poursuivre le dialogue avec les autorités de la Fédération de Russie et à soumettre son rapport sur le respect des obligations et des engagements de la Fédération de Russie dans les meilleurs délais, et au plus tard avant la fin de l'année 2022.